29 septembre 2011

Tout part d’une plaisanterie

On peut parfois se demander si la réalité et la fiction, pour ne pas dire la légende urbaine ne se rejoignent pas pour former notre monde. Loin de moi l’idée de croire tout ce que peuvent prétendre les rumeurs, mais parfois, dans certaines conditions, le doute peut s’immiscer à tel point qu’on peut se dire « Tiens, et pourquoi pas ? L’homme est tellement stupide que cela pourrait fort bien tenir la route cette histoire ! »

Un exemple passablement drôle - pour moi -, qui est supposée s’être passée à proximité des côtes Canadiennes. Le radar retourne au bâtiment de US NAVY qu’il y a quelque chose sur sa trajectoire.
- Ici l’USS [Le nom est censuré, faute de prouver l’authenticité de l’échange], navire inconnu, veuillez vous détourner !
- Je pense qu’il n’y a aucune chance que nous nous détournions de votre route, c’est à vous de vous détourner.
- Je suis le commandant [à nouveau censuré, faute de preuve], et je vous ordonne de changer votre route, sous peine d’avoir des problèmes avec la marine des Etats-Unis !
- Hé, commandant... on n’est pas un bateau, on est un phare, je pense donc que c’est à vous de vous détourner, sous peine de venir vous échouer sur nos côtes.

Allez savoir si cette blague fameuse n’est pas partiellement, voire même totalement authentique ! Sachant que l’armée Américaine n’a guère de honte à se croire toute puissante, m’est avis que l’incident mentionné pourrait tout à fait être vrai, surtout pour peu que le commandant en question fut quelqu’un d’orgueilleux ou prétentieux. Le plus amusant dans cette petite comptine, c’est que dans le fond, cela démontrerait à quel point le pouvoir peut rendre imbécile au possible. Ah ça, dès qu’un homme a une once de pouvoir, celui-ci s’en sert sans vergogne, quitte à passer pour un con dénué de la moindre réflexion. Prenez un douanier (non, pas celui qui fait son boulot, le prétentieux, l’arrogant, le crétin de base quoi), et confrontez le face à la bêtise de ses raisonnements, et éprouvez alors la joie de visiter, gratuitement, au mieux les geôles de la gendarmerie la plus proche, ou alors de vous acquitter d’une bonne amende bien sentie. C’est ainsi : si « le pouvoir corrompt, le pouvoir absolu corrompt absolument » (Lord Acton).

Mais côté plaisanteries idiotes, nous ne sommes pas en reste quand on prend l’actualité ou même l’histoire d’un point de vue tragi-comique. Un autre exemple célèbre sont les « fraises de Grouchy ». Cette histoire incroyable, et pourtant relativement méconnue, a eu pour effet de décrédibiliser un maréchal d’empire, et de soi-disant faire perdre à Napoléon la bataille de Waterloo. Pourquoi diable parle-t-on de fraises ? Parce que le bonhomme aurait, d’après certaines histoires (j’ignore la véracité de la chose, des histoires divergentes sont présentes sur la toile), exigé des fraises pour son dessert, tandis qu’il attendait les ordres de Napoléon. Faute de trouver les fruits en question, celui-ci aurait fait perdre du temps à ses troupes pour son plaisir personnel… Et donc provoqué un retard dans son arrivée sur le champ de bataille, entraînant de fait un naufrage stratégique et militaire pour l’empire. Si telle est l’histoire, alors Grouchy, si compétent qu’il fusse durant sa carrière d’officier, a fini réellement comme un grand imbécile, du genre qui va se trimballer des casseroles sur son nom pour des siècles et des siècles ! Je n’aimerais franchement pas avoir un tel héritage sur les épaules, tant celui-ci semble ridicule.

Et enfin, il y a cette masse d’anonymes, de demeurés profonds qui, au quotidien, emplissent les services d’urgence, appellent le SAMU ou les pompiers, parce que leur maladresse et leur bêtise les ont mis en péril. N’a-t-on pas constaté un décès stupide pour Claude François qui, selon la légende, serait mort électrocuté dans sa baignoire ? Changer une ampoule en étant dans une baignoire… Si ça, ce n’est pas une idée à la con, je ne sais pas ce que c’est ! Quoiqu’il faut pondérer, car, tous les ans, il y a des morts suite à des accidents similaires : une femme se séchant les cheveux dans son bain, un homme se rasant à l’électrique, les faits sont là, bien ancrés dans l’imaginaire des légendes urbaines, tout en étant des réalités. Quelle meilleure preuve que celles-ci pour démontrer que l’homme est un imbécile, non ?

28 septembre 2011

Evanescent

Si vous fermez les yeux, que vous laissez votre esprit d’emplir de souvenirs et d’émotions, vous pouvez revivre, d’une certaine façon, certains évènements de votre existence. Le souvenir, moment magique où l’on s’autorise au rêve éveillé, a ce pouvoir étrange de nous permettre de ressentir à nouveau certaines émotions qu’on a souvent en soi, et qu’on fait taire, sous prétexte qu’elles peuvent être gênantes, ou qu’elles peuvent même infléchir le cours de nos vies. Prenez ces souvenirs d’amours passés, ces situations où vous enlaciez quelqu’un d’autre que l’être qui fait dorénavant partie de votre vie, et interrogez vous, comme moi, sur la valeur de ces évènements. Sont-ils ce miel délicieux et fin qui font qu’on devient nostalgiques, ou bien sont-ils un poison âpre, une sorte de dégradation lente et inexorable de nos sentiments ?

On a beau dire et faire, le présent, tout comme le futur, se construit non seulement sur les faits du moment, mais aussi et surtout sur un passé, qu’il soit bon ou mauvais. Telle une plante s’enracinant dans une terre meuble, la vie, elle aussi, se nourrit des choses aujourd’hui décomposées, et qui servent de terreau aux feuilles, aux fleurs, au tronc qui sont sensés s’élancer vers l’avenir. Cependant, l’aigreur et l’amertume font jaunir nos plus belles intentions, comme si ces deux sentiments n’avaient pour seul pouvoir que d’anéantir les plus beaux espoirs, les plus belles choses que nous portons en chacun de nous. Et ce n’est pas peine de faire des efforts, de vouloir étouffer les pires errances, de vouloir « oublier » tout ce qui a pu, un jour, nous être néfaste. Les mauvaises expériences rendent méfiant, les mauvaises personnes deviennent souvent ce que nous craignons le plus, à savoir une sorte de miroir déformant où tout le monde serait tout aussi fondamentalement mauvais ou cruel. Or, il n’en est rien. Ce n’est pas une seule personne qui fonde l’humanité, c’est l’ensemble des différences qui font une unité, et non l’inverse.

L’improbable chance d’aimer à nouveau est bien souvent douloureuse, car la crainte de réitérer les mêmes souffrances, de revoir le même passé se font plus présentes. On peut aller jusqu’à repousser la main tendue, refuser la chance, de crainte d’être à nouveau déçu, blessé, mutilé par les remords et les regrets. Est-ce là une attitude normale ? On ne s’affranchit jamais réellement de la douleur, on ne fait que la soigner jusqu’à ce qu’elle devienne anodine, ordinaire, un peu comme un accroc à un pantalon qu’on apprécie pourtant plus que les autres. Ce n’est alors pas une raison suffisante pour repousser l’espoir avec virulence, quitte à le regretter ultérieurement. Fuir, c’est une lâcheté courante, à tel point que nombre de destinées sont brisées à cause de la peur, et non de l’échec lui-même. On a peur d’échouer, et paradoxalement on choisit alors l’échec… Comme si assumer volontairement l’échec pouvait nous épargner les larmes et les déceptions !

L’homme est un être tourmenté, souvent perdu dans les limbes de ses propres doutes. Les émotions, comme autant de nuages et de nébuleuses de brouillard, ont cette faculté atroce de déformer, voire même occulter toutes les lumières qui peuvent se présenter sur la courte route de la vie. Alors, nous errons, nous avançons sans visibilité, sans courage, simplement la main tendue devant soi, le cœur chargé de craintes et d’inquiétudes, au lieu de faire simplement un pas devant l’autre, avec la seule détermination nécessaire, à savoir celle qu’il faut vivre, malgré tout, pardessus tout, avec la seule certitude que notre existence a une fin, et qu’on se doit donc de faire pour le mieux avant de passer à trépas. Ce n’est pas au crépuscule qu’on apprécie la chaleur du soleil, pas plus que c’est sous la neige qu’on découvre l’été. C’est chaque seconde, chaque instant qui doit compter, même si des fantômes dansent devant nous, même si les visages familiers d’hier sont aujourd’hui des spectres qui hantent notre quotidien. Pas à pas, jour après jour. Les certitudes ne sont que temporaires, elles naissent dans la facilité, et elles meurent dans l’indifférence. Ce que nous croyions vrai hier n’est plus aujourd’hui, et demain sera source d’autres convictions. La seule chose indispensable alors, c’est de se souvenir de ce qui nous fait avancer… Et de s’y tenir, en serrant parfois les dents, en mordant sans relâche le mors amer, pour qu’un jour on puisse le recracher en se sentant fier d’avoir finalement tiré le poids de notre existence.

Vivre. Ce n’est qu’un mot, une conviction personnelle pour s’assurer de notre propre existence. « Je pense, donc je suis », n’est qu’une forme d’autosatisfaction, ou alors de placebo contre la peur de n’être rien. Nous ne sommes pas que des formes évanescentes, des spectres qui se croisent sans jamais se toucher. Nous sommes cette douce solidité de la Vérité, la Vérité fondamentale : nous vivons, et c’est déjà pas si mal. Alors, si l’on vous reproche d’être, de vivre, reprochez à l’autre de ne pas être Vérité, car c’est mentir à soi et aux autres que de vouloir donner des leçons. Tous, faillibles, frêles, images temporaires et souffrant du passage de l’éternité, nous devrions apprendre que c’est à nous même que nous devrions donner des cours, et non aux autres. La prétention du savoir, l’impérieux désir d’être moralisateur n’amène que déception et solitude. Partagez, apprenez des autres, tout comme vous pouvez leur apprendre de vous. C’est ça… Vivre. Alors, vivez, sans relâche, sans doute, sans peur, car même si la Mort vous rattrape, comme elle me rattrapera un jour, vous pourrez lui sourire en lui annonçant « Je pars, mais le cœur empli de souvenirs, de Vies, d’existences, de Vérités. »

26 septembre 2011

Maton

Ils sont là, debout, les uns à côté des autres, observant face à eux dans une posture stoïque et ferme. Comme prêts à prendre un élan final, la tension est à son paroxysme. Tous, ils sont ressorts humains, tendus, cambrés dans l’effort pour ne pas échouer dans leur poussée. Pourtant, ce ne sont pas des coureurs dans un stade, loin de là, parce que l’échec, le moindre faux pas, et ce n’est pas une mauvaise place qui les attend, mais bel et bien l’élimination. Que faire ? Ne pas réagir, stagner, ou bien tenter sa chance jusqu’au point final, celui qui, en principe, accorde la victoire et la liberté ?

Ils se jaugent les uns les autres, ils scrutent les réactions du surveillant, attendant que son attention se focalise sur autre chose. Que fait-il ? Il se tourne, il regarde ailleurs, et chacun des détenus de ce jeu pervers s’élance frénétiquement vers un destin incertain. Attention ! Il se retourne ! Instant limite, seconde où la vie et la mort se décident… Ils s’arrêtent, feignant l’immobilité, l’inintérêt total pour le gardien qui, le regard noir, ne peut pas les accuser d’avoir désobéi aux ordres. Cela dure une éternité. Il ne veut pas surveiller autre chose, il les tient et les presse par la simple force du pouvoir qu’il détient entre ses mains. Cruel, conforté dans sa pleine et toute puissance, le personnage va leur faire subir l’enfer par sa simple scrutation de l’aire plane qui est sous ses yeux. Sourire en coin, joie d’être le maître face aux esclaves, ce n’est qu’à contre-cœur qu’il se retourne enfin, tenu qu’il est par son rôle à la fois jubilatoire et ingrat.

Alors, dans un élan désespéré, ils reprennent la course, ils se jettent individuellement dans un effort qu’aucun autre ne peut faire pour eux. C’est ainsi, il n’y a pas de solidarité, pas d’entraide, il faut survivre pour soi-même, quitte à ensuite devoir vivre avec des remords. Ils se jaugent, se saluent avec timidité et dépit, comme s’ils sentaient, tous autant qu’ils sont, l’absurdité de leur situation pourtant commune. La règle est pourtant simple : fuir, mais sans être vu. Celui qui est vu est éliminé. Il n’y a rien d’autre, rien de plus, rien de moins, une loi immuable et impitoyable qui ne souffre pas la moindre critique. Commenter ? C’est refuser la loi, refuser le jeu, et donc être éliminé avant les autres. On n’infléchit pas le système, on le subit, et seul le gardien, et bien lui seul, a pouvoir de vie et de mort sur ses victimes en puissance.

Nouveau coup de frein… Vain pour certains. Le gardien rit aux éclats, et désigne de l’index ceux qui sortent définitivement. Un par un, ils disparaissent à jamais de la partie, ils ne sont pas même une trace dans le sable de la cour. Ils étaient là, et maintenant, ils ne sont plus qu’un souvenir pour ceux qui sont encore là. Quelques pas, rien que quelques pas, une foulée, deux tout au plus, et la sortie, la liberté seront là. Le gardien est conscient de cela, et il ajoute alors de la théâtralité à ses regards détournés. Il veut les provoquer, créer une tension les poussant à la faute… Et certains cèdent. Ils foncent, sont pris sous son œil cerbère, et disparaissent, le tout accompagné par son gosier râlant une moquerie cruelle. Le gardien gagne, le coureur perd, telle est la loi immuable.

Enfin, ils ne sont plus que deux…

Plus qu’un seul…

Il lui reste quelques pas à faire ! C’est enfin la délivrance, s’il échappe au maton, il aura sa récompense, sa liberté, sa victoire malheureusement coûteuse à son cœur tant il aura laissé de camarades sur le carreau. Tant pis, il faut vivre, survivre, avancer, ne pas céder à ce pouvoir omnipotent…

Et là, la voix du gardien, toute proche, lance à tue-tête : « Un, deux, trois.. SOLEIL ! »

Victoire du gardien, et sonnerie de fin de récréation, le gardien redevient élève, et les victimes se relèvent pour rejoindre la salle du cours élémentaire.

23 septembre 2011

Lumières

Généralement, les adultes font la leçon aux enfants en leur expliquant tout un tas de choses qu’eux-mêmes ne mettent que trop rarement en application : sois poli, sois propre, respecte ton prochain, tends la main à l’autre avant d’attendre qu’autrui le fasse vers toi… Et ainsi, nous tentons de leur inculquer des évidences, de leur enseigner ce qu’est supposé être un homme, dans sa fragile et insoutenable beauté, alors que l’adulte, lui, sait au fond de son âme que ce ne sont que des rêves, des vœux pour un avenir si possible meilleur pour sa descendance. Mais n’est-ce pas là un mensonge ? N’est-ce pas une hypocrisie que de vouloir préserver de la cruauté, à tel point que cela peut devenir une forme de cruauté indirecte ? Nous espérons, nous soutenons même vouloir un avenir plus radieux, plus harmonieux, alors que nous ne faisons pas grand chose dans cette optique. On pollue, on détruit, on triche, on tue, on se donne bonne conscience en faisant parfois un don quelconque, alors qu’on affame sans vergogne de l’autre côté du monde. Où est notre humanité ? Quand meurt cet esprit candide, cette enfance qui trop vite s’évapore ?

« Certains naissent dans les choux, d’autres dans la merde », telle est l’expression d’une chanson que trop réaliste et dure à entendre. La plupart dans nantis entendent sans écouter, et ce genre de propos les survolent comme peuvent les survoler les pigeons qui hantent la ville sans que personne n’y prenne garde. « Ils reviendront, comme toujours » se dit alors celui qui ne peut ni voir ni entendre, celui qui enterre ses oreilles sous la paume de ses mains, et qui met un voile pudique sur ses yeux de peur que la clarté de l’obscure réalité vienne lui brûler les rétines. Lâches, inconscients, égocentriques, on ne daigne plus alors laisser passer la lumière qu’entre les phalanges légèrement disjointes, juste ce qu’il faut pour que l’éclairage de notre environnement vienne nous éviter la cécité. Un peu comme un nuage venant que trop obscurcir notre quotidien, on se laisse légèrement émouvoir par les images de la pauvreté ou de la souffrance, pour rapidement chasser ces idées noires au profit du désir d’être tranquille, loin de toute douleur, loin de la réalité, loin de tout. « Et le soleil brillera à nouveau sur nos têtes », parce que, au fond, il n’y a pas de saison de la lucidité, juste quelques orages sur un été égoïste, sur un printemps nombriliste, parce que l’automne humide nous dérange, parce que l’hiver glacial n’est bon que pour les autres, pas pour soi.

Perdre la lumière de la Vie, c’est perdre le fondamental de notre existence même, à savoir que l’humanité ne se construit pas seul, que le monde est justement fondé sur l’échange, le contact, la réflexion, l’acceptation de la différence. Pourtant, nous sommes xénophobes, nous hésitons à faire confiance, nous fuyons les autres de peur d’être blessés, comme si l’autre était une menace et non une bénédiction. A nos enfants, nous leur expliquons qu’ils doivent être ouverts, sincères, honnêtes, tandis que nous agissons strictement à l’inverse. Alors, nos enfants dessinent des soleils radieux, des maisons où nous sommes idéalisés, où nos défauts sont gommés par le trait enfantin du fusain sur la feuille de papier. Puis, peu à peu, les enfants comprennent ce que nous sommes vraiment, des êtres faillibles, sensibles, fêlés, parfois même brisés par nos rêves et nos illusions perdues. Nous rêvons tous, nous avons tous des espoirs secrets, et tous, malheureusement, nous portons en nous des regrets, des remords, des tristesses cachées sous les sourires de circonstance. De loin, nous paraissons alors heureux, joyeux, pétris de bonnes intentions, alors que derrière la façade il y a des galaxies de noirceur, de larmes, de ressentiments qu’on étouffe pour que les autres ne se doutent de rien. Puis, un jour, on ne sait jamais pourquoi, cela explose, on surprend, on blesse, parce que finalement nous avons gardés le silence trop longtemps.

Dans la paradoxale et intolérable nécessité d’être à la fois honnête et discret, chacun de nous se débat avec sa conscience, ses sentiments, à tel point que toutes les émotions s’entrechoquent dans nos esprits torturés. Le mot « pourquoi » revient sans cesse, ver pervers qui corrompt sans relâche chaque analyse, à tel point que nous perdons toute objectivité… Pour finalement céder à la morosité, à la noirceur confortable des lamentations, car rien n’est plus simple que de se laisser distancer par la Vie. Vivre, c’est errer, souffrir beaucoup pour être un peu heureux, et non le contraire. Cela attriste la plupart d’entres nous, cela en brise certains, cela en renforce d’autres, mais telle est l’existence humaine, forgée par la faute, le doute, puis, plus rarement, par le bonheur d’être aimé et d’aimer en retour.

Et puis, un jour, vient l’espoir. Maigre, malingre même, souffreteux, mais bien réel. Il est là, attendant qu’on s’en saisisse, qu’on le réchauffe contre soi, qu’on prenne le temps de le soigner. Il vous regarde, chétif chose prête à périr au premier esclandre, mais l’on se bat alors pour lui, coûte que coûte, vaille que vaille, parce que notre dignité est exacerbée, parce qu’on veut vivre et avancer.

22 septembre 2011

La barbe

Encore une fois, j’ai le sentiment qu’il y a eu quelques erreurs de sélection lors du choix des expressions ordinaires. Tenez, par exemple, ce titre vous a sûrement amené à songer à une pilosité masculine, au symbole même de l’existence des nains dans le médiéval fantastique, ou encore à celle blanche et encombrante de l’ancien représentant de commerce de Coca-Cola. Et là, je dis non : je songeais bel et bien à l’antique expression populaire supposée signifier, avec une forme surannée de politesse : « Tu vas la fermer ta grande gueule, oui !? ». Hé oui, la langue française est un florilège d’usage à contre-emploi de mots, de choses, car l’on aime jouer avec les conventions, et l’on va jusqu’à trouver trois voire quatre sens pour un seul et même terme ! On est bons, non ?

Sortons du crin de bouc qui tient lieu de ramasse miettes de table, et songeons donc à toutes ces petites expressions aussi mignonnes que souvent ridicule : « C’est la porte ouverte », ou encore « Il n’y a pas le feu », ou bien l’inusable « On n’est pas aux pièces ». Tiens donc, mais d’où diable ces expressions peuvent-elles provenir ? L’imbécile qui a balancé « y a pas le feu » oublie probablement qu’il y a une sorte de graduation dans le désastre, et qu’il y a plein de subtiles marches à gravir entre le « tout va bien », et le « Foutons le camp, l’immeuble est en flammes ». Mais évidemment, quoi qu’on compare à un incendie, tout de suite, cela semble bien moins dramatique…
« Le on n’est pas aux pièces », on peut le supposer venir d’une chaîne de fabrication, où les ouvriers, robots humains tenus par les cadences du fordisme, pouvaient déclarer sans surprise « Hé, on n’est pas au nombre de pièces faites à l’heure ! ». Avec la sempiternelle flemme de tout conserver, nous avons donc, à mon avis, résumé le tout par cette phrase « on n’est pas aux pièces ». Les Soviétiques, eux, plus imaginatifs, instauraient le « temps pour cent » dans les goulags, à savoir « Combien de temps pour produire cent pièces ». Jusqu’ici, on peut songer à de la rentabilité, mais c’était plutôt « Produis en deux fois le quota, comme ça, si tu claques, j’aurai de la réserver à caser en attendant que ton remplaçant tienne la route ». Cynique, efficace, il ne faut donc pas plaisanter avec les quotas de production !

J’adore écouter ces expressions qui se renouvellent sans cesse. Entre les auteurs, les chanteurs, les acteurs, il y a de quoi pêcher une quantité invraisemblable de petits dictons, d’expressions prêtes à l’emploi, et le net, grand fournisseur de choses aussi inutiles qu’indispensables, ne se prive pas non plus pour présenter des sites dédiés à la gloire du bon mot. Par décence et charité tant pour mes lecteurs, que pour les auteurs de ces « choses », je me contenterai de dire qu’il y a le littré qui se révèle être d’une aide incomparable. Nul besoin de s’arracher le cœur et la rétine en scrutant des sites bariolés, un bon bouquin physique, et en voiture pour la culture !

Et merde, voilà que je case, moi aussi, une de ces expressions qu’il m’arrive d’honnir sans limite ceux qui s’expriment ainsi. Pourquoi ? Parce que la plupart le font dans un français approximatif, intolérablement malade de la vérole des « oublis et autres omissions que l’on tolère à l’oral ». Beurk ! Par pitié, achevez les, piquez les, faites quelque chose pour ces pauvres hères qui ne savent plus à quel dictionnaire se vouer ! Heureusement que la peine de mort ne s’applique pas aux crimes contre la langue, sinon je crains que nous serions privés des deux tiers de notre population. Ceci dit, cela aurait alors réglé bien des problèmes de surpopulation carcérale, de chômage, enfin bref, de bien des soucis de notre société actuelle… De là à coller la peine de mort pour les assassins de la langue dans un programme politique… Quoique : cela aurait bien fait rire Monsieur Desproges, pouffé Coluche, et grogné le reste de la classe politique et analphabète qui nous dirige.

Mais là, c’est un autre débat !

20 septembre 2011

Il y a des héros et des vilains

Et si les vilains et les supers héros n’étaient que des salariés de grandes entreprises dédiées soit à la préservation du monde, soit à son anéantissement ? Qu’est-ce que cela pourrait bien donner ? Hé bien, probablement un service de recrutement des plus original, des salariés improbables, et surtout des patrons qu’aucune autre société dans le monde ne saurait avoir !

Alors, cela vous interpelle ? Allons visiter la société « Flander’s company », dont le métier est de recruter des méchants, des génies du mal, puis d’en louer les services au plus offrant. En gros, leur fond de commerce, c’est le mercenariat à base de Joker (de Batman), de démons sortis tout droit des enfers, ou encore de types aux pouvoirs pour le moins étranges.

Trêve de blabla, allez voir les vidéos de cette société, avec ses salariés si attachants, ses futurs embauchés aussi curieux que déroutants, et laissez vous mener par l’ambiance inimitable de la série !

La Flander's Company!

19 septembre 2011

Un univers de paradoxes

Nous nous interrogeons constamment, et avec une sincère intensité, sur le devenir de l’humanité. Suite à des progrès techniques très rapides, et face à un monde interconnecté à outrance, la notion d’humanité semble quelque peu mise à mal, à tel point que le concept de « monde virtuel » n’est plus un fantasme d’auteur de SF. La majorité des idées conçues, il y a de cela des décennies, sont dorénavant réalités : visiophonie, informatique omnipotente et omniprésente, dématérialisation de la connaissance, et même la mise en numérique des relations humaines font partie de notre quotidien. Discuter avec des inconnus qu’on ne croisera jamais ailleurs que derrière un écran, ne plus se déplacer dans une boutique pour faire un achat, ces habitudes modernes étaient, il y a de cela une décennie, de la quasi science-fiction pour la majorité des citoyens du monde. Dorénavant, il n’y aura plus d’échappatoire : notre monde sera numérique, ou il ne sera pas.

Aussi enrichissante que puisse sembler être cette expérience de la fusion entre le réel et le virtuel, nous ne pouvons constater nombre de paradoxes liés à la nature même de l’être humain. Trop de connexion rend les gens tributaires d’objets et de technologies, à tel point que les en priver peut les rendre aigris, inquiets, tout du moins stressés. C’en est terrifiant : qui n’a pas remarqué l’acharnement compulsif des passants à observer à scruter des fils Facebook, ou ne serait-ce que jouer sur des équipements mobiles ? L’interaction entre le virtuel et notre monde est bien palpable, et nul ne peut plus nier les impacts d’un monde sur l’autre. Le virtuel sert dorénavant des causes politiques (communication lors de révolution, vidéos d’évènements majeurs…), et réciproquement le réel se voit influencé par des mouvances exploitant à fond les capacités du virtuel (création de réseaux sociaux, partage de l’information, distribution à grande échelle de documents…). Et pourtant, paradoxalement, le niveau de confiance qu’ont les gens dans le virtuel semble être en perte de vitesse : crainte du piratage, inquiétude face aux virus ou au vol d’informations personnelles, doutes sur la véracité des faits énoncés sur la toile… L’homme est donc de plus en plus connecté, et paradoxalement de moins en moins confiant dans la nébuleuse qui le tient comme étant un nœud parmi tant d’autres.

Au surplus, ce ne sont pas que les groupes de pensées qui sont impactés par ces changements. Les individualités, les personnalités subissent le même genre de mutations, avec les travers que cela engendre. L’addiction au numérique, révélée au monde dans les jeux vidéos, la fragilité des gens face aux agressions « virtuelles » (insultes, dénigrement, diffamation…), tout ceci révèle une extrême dangerosité des interactions de l’individu avec son monde virtuel. Jusqu’à il y a peu de temps, la toile était présentée comme un monde de liberté, de culture, d’informations sans frontière où chacun pouvait créer une culture participative, en lieu et place de la culture passive issue de la presse et de la télévision. Or, avec le temps, la démocratisation de l’informatique, liée aux campagnes médiatiques supposées nous intéresser à ce monde sans physique, créent à présent un retour quelque peu inquiétant vers des médias à sens unique. Les forums, tout comme les sites personnels, subissent, eux aussi, l’excès de libertés du passé, à tel point que rares sont les journaux qui laissent encore la parole à leurs lecteurs. Quoi en penser ? Que l’individu qui se réfugiait dans le virtuel se sent aujourd’hui scruté, traqué, revendu telle une marchandise. Un clic de souris fait de chacun de nous un consommateur potentiel, et, par le truchement des publicités affichées un peu partout, par l’adjonction de sondages, voire même par l’espionnage de nos données personnelles sur nos historiques de surf, nous sommes des valeurs commerciales. Le trafic de personnes se revend, le moindre espace en pixels se négocie, ce qui sous-entend donc que l’individu est encore plus ciblé, encore plus traqué. D’un monde libre et égalitaire, du moins dans le virtuel, nous sommes à présent dans un monde suspicion, où des lois supposées protéger des intérêts industriels et commerciaux autorisent la traque virtuelle de monsieur tout le monde. Pire encore, c’est une traque systématique, sans ciblage, telle une rafle mondiale menée avec l’assentiment des assemblées et autres créateurs de lois. Qu’est-ce que l’individu alors ? Un pion, pas une entité pensante, juste une adresse, un numéro de série, personne, un grain de sable dans un sablier gigantesque où seule la masse pèse, et où l’individu ne représente rien.

Certains se complaisent dans cette sécurité où des autorités supérieures font de notre monde virtuelle une prison encore plus étriquée que les pires dictatures réelles, où le droit de penser est soumis à un droit de regard inquisiteur, où la culture est soumise au copyright, où l’information est propriété de multinationales peu enclines à les partager avec le monde entier. De toile délocalisant l’intelligence à la périphérie (c’est-à-dire un réseau informatique pouvant se passer des gros serveurs), nous sommes encore à une structure centrée sur des services omniprésents, envahissants (comme Google qui détient des quantités astronomiques d’informations, et qui s’offre le luxe de s’imposer dans les machines via leur fameuse barre de recherche), et surtout dont nous sommes tributaires. J’ai une énorme inquiétude, c’est celle de voir un jour la toile devenir une sorte d’aquarium où nous autres, internautes, serions des poissons nourris d’informations et de données selon le bon vouloir de quelques magnats de l’information. Et c’est, quelque part, déjà le cas tant les groupes d’échelles mondiales détiennent déjà les cordons du réseau : opérateurs capables de nous espionner et de nous dénoncer à des autorités (au lieu d’avoir un rôle de neutralité absolue comme en téléphonie), sites et structures purement commerciales possédant notre vie virtuelle et réelle (Google via les mails, Facebook via le réseau social…), ces différentes structures pourraient donc dicter des lois terrifiantes, donner nos données à des états sans scrupule, voire même prêter assistance à ces dits dictatures pour aider à la traque virtuelle des opposants (et ce cas n’a rien de virtuel, comme en Chine par exemple, où yahoo a déjà été épinglé à plusieurs reprises pour sa participation complaisante à la chasse des dissidents).

Il faut absolument se demander dans quelle mesure nous pouvons accepter cela. Sommes-nous donc de ceux qui vont laisser la toile devenir un marché, au lieu d’un lieu de culture ? Va-t-on voir la toile devenir une tour de Babel qui, parce qu’elle aura osé chercher l’indépendance et l’omniscience, s’effondrera sur elle-même pour devenir un simple esclave des marchés ? Pourquoi laisser les gouvernants imposer des lois sans légitimité morale, pourquoi leur donner le pouvoir de faire de nous des « coupables potentiels », alors qu’un des fondamentaux de la loi est tout le contraire, à savoir « Innocent jusqu’à preuve du contraire ».
Il faut également ne pas se restreindre dans la réflexion vis-à-vis de notre vie virtuelle, à savoir ne regarder que le côté ludique de la chose. Les partis politiques, tous autant qu’ils sont, sont dorénavant visibles sur la toile, et n’hésitent pas, en outre, à se servir de ce média numérique. Alors pourquoi rares sont ceux qui parlent du virtuel dans leur programme ? Pourquoi ne regarde-t-on pas le réseau tel qu’il est, à savoir un extension riche et complexe de notre vie réelle ? La liberté d’expression est présente tant par la voix, que par l’écrit dans le monde virtuel, mais aucun parti ne semble vouloir s’inquiéter de ce fait, à tel point que rares sont les députés, élus locaux, ou encore sénateurs, qui comprennent tout l’enjeu que représente l’avenir de la toile pour tout le monde. A prendre la question à la légère, ou au contraire en faire une question éminemment politique (comme HADOPI ou LOPPSI), nous autres, citoyens, risquons d’y perdre bien plus qu’une simple connexion ADSL déconnectée pour de soi-disant faits de piratages.

La solution ? si vous êtes actifs en politique, si vous connaissez vos élus locaux, si vous les côtoyez, sensibilisez les sur l’importance d’être critique, constructif, et prudent concernant la toile. Laisser trop de libertés au législateur pour en faire un univers fermé et policé, c’est tolérer la censure, et par extension de permettre de bafouer les fondamentaux de la république. A nous tous d’agir, de faire circuler l’information, de ne pas laisser les gens dans l’ignorance crasse qui semble arranger les gouvernants. Il en va de leurs libertés individuelles. Faites circuler la culture, la réalité, étayez vos critiques, discutez en, ne vous laissez pas impressionner par le duel entre un David que nous sommes à titre individuel, et le Goliath, qu’il soit politique ou médiatique. La somme des individualités fait un peuple, et c’est par et pour le peuple qu’un gouvernement existe.

Votez, luttez, défendez vos idées. Qu’elles soient contraires aux miennes, qu’elles soient même dérangeantes selon mon échelle de valeurs, je préfère quelqu’un qui exprime ses idées à quelqu’un se contentant d’observer, dans la docile indolence d’un attentisme confortable. Défendez vos droits, sous peine de devoir ensuite vous battre pour les reprendre.

16 septembre 2011

Je ne peux pas commémorer

Tout d’abord, désolé de ne pas avoir été plus présent ces derniers temps, mes occupations professionnelles se sont liguées pour m’imposer un rythme de travail indécent m’interdisant toute tâche rédactionnelle. Ceci dit, j’espère pouvoir reprendre mes quotidiennes aussitôt que possible, et ainsi vilipender le monde qui m’entoure.

Maintenant, venons en au sujet qui m’intéresse aujourd’hui. Avec force insistance et présence dans les médias, on a tenté de nous vendre du chagrin et de la honte concernant les attentats du 11 Septembre, avec à la clé des commémorations, l’inauguration d’un mémorial, le tout enluminé de documentaires supposés nous donner des clés sur le pourquoi, le comment et le déroulement de cette journée de sinistre mémoire. Loin de moi l’idée de renier la nécessité de ne pas oublier ce carnage incroyable, et encore moins de salir la mémoire des victimes innocentes des attentats, car, me concernant, le terrorisme ne mène jamais à autre chose qu’à la douleur, à l’horreur, et à l’incompréhension d’autrui. On ne se fait pas entendre en posant des bombes, on ne fait que mener à la haine et à une guerre frontale d’anéantissement. Non, ce qui me dérange bien plus, c’est le côté « chagrin obligatoire » que les USA tentent de nous inculquer, un peu à l’instar du chagrin imposé concernant les crimes de guerre du nazisme. Je n’ai pas décidé de la politique Américaine au Moyen-orient, pas plus que je n’ai voté pour le NSDAP dans les années 30. Donc, me forcer à verser une larme m’indispose, à tel point que je trouve cette façon de faire indécente et malsaine.

En soi, le 11 Septembre, je ne peux pas le commémorer, parce qu’il s’agirait alors de choisir mon camp entre les terroristes et les USA. Je n’ai pas de camp, je ne suis pas de ceux qui devraient choisir entre le diktat économique Américain, et la voie religieuse extrême revendiquée par les criminels responsables des attentats. Les uns et les autres se doivent mutuellement leurs malheurs, à tel point que choisir un camp, c’est décider du « moins pire »… Comme s’il existait un moindre mal quand on parle de morts, de gens déplacés, de bombardements, ou bien de civils sacrifiés, de gamins qui se suicident avec une ceinture d’explosifs, ou encore de jeunes veuves prenant les armes pour venger leur famille. Je ne peux donc pas commémorer ce souvenir, ce serait malhonnête pour les victimes des deux camps. On me dira que je suis cruel, intolérant, voire même cynique, mais les faits sont hélas là, en évidence, juste sous notre nez à tous : les terroristes du 11 Septembre étaient des gens menés et guidés par un ancien « collaborateur » de la CIA, un de ces types de l’ombre qui ont appris de l’agence, puis qui ont retournés ces méthodes contre elle ! Que voulez-vous donc commémorer dans des conditions aussi sordides ?

Ce que je peux encore commémorer, ce ne sont pas les attentats, pas plus que les représailles militaires des USA. Ce que je peux célébrer avec tristesse et douleur, c’est le sacrifice humain, le massacre aussi vain que symbolique de milliers de personnes, tout ceci à la gloire d’idéaux fous. Les morts du WTC sont aussi dramatiques que les milliers de civils tués en Irak ou en Afghanistan ; les morts du vol 93 sont aussi fortes et courageuses que celles des résistants Français passés par les armes par la gestapo. Je ne peux pas dire que le 11 Septembre doit être commémoré, mais qu’on n’oublie jamais que ces gens sont morts, et que des familles entières furent éplorées, des enfants devinrent des orphelins, et tout ça pour quoi ? Pour rien, pour de la politique, de la propagande. Les attaques du 11 Septembre ont ensuite été instrumentalisées pour légitimer une augmentation des budgets militaires dans le monde, pour l’instauration de lois liberticides, pour permettre la mise en œuvre de stratégies à long terme… Mais les attentats n’ont certainement pas permis aux USA de se rendre compte de son attitude arrogante et impérialiste, loin s’en faut.

Qu’est-ce qui a changé depuis le 11 Septembre ? Nous sommes devenus paranoïaques, xénophobes, nous tolérons la présence de militaires dans nos rues, nous nous sommes habitués à avoir peur, à tel point que les images de morts et de destructions semblent irréelles, comme tirées d’un film d’action. Sauf que les victimes, elles, sont bien réelles, et elles ne font pas la comédie quand elles tombent. 10 ans, dix longues années et nous n’apprenons rien de ce carnage. Célébrer le 11 Septembre m’a semblé inapproprié, pour ne pas dire tout simplement monstrueusement cynique. Les USA ne comprennent toujours pas, et je pense qu’ils ne comprendront probablement jamais qu’ils ont mis le feu et la haine dans les cœurs, et qu’ils en récoltent les cendres les plus atroces. Dans les débris du 11 Septembre, les USA n’ont pas perdu que des compatriotes, mais surtout et avant tout une capacité à réfléchir et à s’interroger. Cela s’avère finalement être ignoble, car cette grande nation, loin de changer, n’a fait que s’endurcir, se replier sur elle-même, et regarder le monde avec méfiance et circonspection.

Quelle mémoire ? Quel souvenir ? Les USA commémorent les attentats, moi je commémore la mémoire des victimes inutiles. Un mort, c’est un mort de trop. Espérons qu’un jour, nous tous, nous comprendrons qu’il n’est pas possible de vivre en ignorant son voisin, en le méprisant au point de le rendre agressif et revanchard. Mais cela ressemble plus à une vaine prière qu’à un véritable espoir…

13 septembre 2011

Pas le temps....

Tout est dit!

Désolé, et à bientôt.

08 septembre 2011

Quelques réflexions sur l’économie mondialisée : 1

N’étant pas économiste de formation, mes « idées » seront probablement si ce n’est légères et incomplètes, fausses voire contradictoires avec la réalité. Je n’observe malheureusement le monde que par un bout de la lorgnette, à savoir l’éclairage de mes maigres connaissances, le tout pollué par les grands médias de notre temps. En conséquence, n’hésitez pas à me commenter, me critiquer, et en tout cas à corriger toute erreur dans mon propos. L’échange de connaissances étant supposé être le maître des discussions sur la toile, j’aimerais lancer une vaste discussion, avec pour but avoué de produire un texte explicatif un minimum complet et concis à destination des plus néophytes d’entres nous. Donc… bonne lecture et critiques !

La première des interrogations à laquelle il serait bon de donner une réponse claire, c’est de savoir quel est le système qui fait tourner le monde. Bien sûr, on pourrait répondre avec un seul mot générique, à savoir « capitalisme ». Excepté quelques dictatures repliées sur elles-mêmes, le monde semble régi par une économie mondiale, s’appuyant sur les préceptes de la gestion du capital qui sont : le profit, l’usage du capital pour dégager du profit, et la répartition des valeurs en fonction de l’implication économique de chaque acteur. Dans ces conditions, on devrait donc parvenir à un système qui se résumerait en quelques étapes simples : produire, vendre, et répartir le fruit du travail et de la vente en proportion des investisseurs et des marges dégagées sur le travail. Est-ce le cas ? Paradoxalement, le capitalisme ne tend pas vers une amélioration immédiate des conditions de vie des travailleurs, car le travail de l’argent est plus rentable, et surtout moins taxé que le travail de production. Ce constat est donc que le capitalisme est appliqué dans sa phase la plus dangereuse, au titre qu’il ne répartit pas le bénéfice en fonction de l’investissement brut dans la production, mais en fonction de la part active de capital investie supposée rapporter tant par la spéculation de l’actionnariat, que le reversement de dividendes aux actionnaires en question. Nous avons donc un capitalisme qui a pris le visage de la détention des capitaux, et pas le capitalisme d’investissement sur les moyens de production.
Il y a également là un complément à faire : les moyens de productions ne se résument pas aux machines, car, dans l’esprit, la production peut être physique (produits manufacturés), et intellectuelle (création intellectuelle, gestion, administration des biens et des personnes…). On ne peut de toute façon pas réellement dissocier l’esprit de la physique de construction, car l’une est tributaire de l’autre. Sans production physique, les concepts restent sur le papier ; sans réflexion et études (Recherche et développement), pas d’innovation, ceci pouvant faire péricliter des secteurs complets de l’économie (anciennes technologies abandonnées pour de plus efficaces/rentables, cessation d’activités non rentables pour des questions de coûts, ou encore réforme drastique des possibilités de production, suite à des changements de lois sur l’écologie par exemple). Donc, pour le progrès, il faut que la partie recherche et la partie production de masse se concertent, se rejoignent, ceci afin d’abaisser les coûts, augmenter les rendements, tout en maintenant des marges acceptables tant par l’entreprise que les marchés.

Le second aspect à observer, une fois qu’on a admis que les marchés sont pilotés non par l’efficacité des sociétés, mais par la spéculation sur celles-ci, est d’identifier le pourquoi des crises à répétitions qui ébranlent notre système. Il y a un nombre énorme de facteurs, qu’ils soient conjoncturels, économiques, sociaux, ou techniques. Cependant, dans la liste, il y a plusieurs faits qui dérangent, et qui démontrent que le système économique n’est pas dirigé par des réflexions saines sur l’économie, mais au contraire qu’il est souvent dirigé par des idéologies et des politiques. On pourrait croire, à juste titre, que tous les marchands du monde sont intéressés tant par le bénéfice, que par la concurrence. Pourquoi ? Parce que le bénéfice est tributaire de la concurrence active, et réciproquement. Quand deux entreprises se font concurrence, celles-ci doivent trouver des stratégies pour maintenir de bons niveaux de bénéfices, tout en restant compétitifs l’une face à l’autre. Les stratégies élémentaires sont peu nombreuses, bien qu’elles peuvent donner lieu à diverses méthodes de mise en œuvre : réduire les coûts pour augmenter les marges, augmenter drastiquement la production pour abaisser les coûts unitaires, augmenter la valeur ajoutée des produits pour les différencier de ceux des concurrents, ou s’accorder avec le concurrent pour que chacun se fasse sa place sur le marché. La première solution mène généralement aux délocalisations, ce qui est un désastre social et économique ; la surproduction apporte du stock, voire des pertes, ce qui est dangereux pour la société (d’où les politiques de production en « juste à temps », ceci pour ne pas connaître de phénomènes de stockage coûteux et destructeur) ; l’augmentation de valeur ajoutée est une possibilité un peu marginale, car elle imposera à la société d’investir dans l’innovation, de montrer sa différence, au risque de ne pas attirer de nouveaux clients (Apple y est fort bien parvenu par exemple, mais c’est une société parmi des millions dans le monde) ; Les accords sont les seuls qui soient réellement bénéfiques pour les sociétés, mais systématiquement défavorables aux clients (prix abusifs, impossibilité de changer de fournisseur sans retrouver des tarifs analogues…). En clair : le client n’est plus la cible, c’est l’actionnaire que l’on flatte. En conséquence : on ne tente plus de baisser le prix de vente, mais d’augmenter les marges, et donc les dividendes.
En quoi ces démarche sont-elles nocives pour les marchés ? Elles sont dangereuses parce qu’elles incitent à se fier plus au cours d’une action, qu’à la stabilité de l’entreprise qu’elle symbolise. Le principe est affreusement simple : valoriser à l’extrême une société, c’est alors risquer que le cours chute, et que la valeur « réelle » s’évapore sur les places de marchés. Une entreprise peut donc faire faillite, faute de liquidités, alors que les carnets de commandes sont pleins ! L’étonnante facilité qu’ont les marchés à dépouiller une société est effarante, surtout quand on sait que ce genre d’action peut être menée par une société rivale souhaitant couler un concurrent encombrant.
Je disais que l’idéologie pèse plus lourd que le bon sens économique. Prenons quelques exemples concrets pour en comprendre la portée politique au-delà de la logique du commerce. Quand le pétrole se tarira, nombre de lobbies extrêmement puissants (pétrole, transports de frets, automobile, aviation…) seront alors tenus de trouver des énergies alternatives, ceci à des coûts faramineux. Or, le pétrole, simple à exploiter, maîtrisé, et qui plus est maintenu en laisse par les acteurs de la politique mondiale, se doit de rester en place afin de repousser le plus loin possible les échéances de la mutation industrielle indispensable à la fin du carburant fossile. L’automobile en est un bon exemple : pourquoi chercher autre chose, quand il est si simple de faire du bénéfice sur quelque chose de déjà rentabilisé ? Dans cette optique, ces groupes pesant des milliards, des millions de salariés dans le monde, ne peuvent donc pas tolérer qu’on abandonne le pétrole de sitôt. Les gouvernants sont donc pris entre l’idée tragique d’un naufrage industriel, d’un chômage délirant, ceci faute de maintenir des vieux modèles économiques en activité, et la possibilité d’avoir enfin une indépendance énergétique plus grande, surtout dans l’idée de s’affranchir du dollar, indicateur sacré du prix du brut sur les marchés. La conséquence directe est élémentaire : l’état, arbitre politique par excellence, fait de l’ingérence économique en agissant politiquement (guerres pour le pétrole, modulations des taxes pour favoriser/léser des acteurs spécifiques des marchés, absence de politique réellement incitative concernant la recherche de solutions tierces…). Dans ce climat d’inquiétude, les entreprises poussent donc les états à les soutenir, quitte à rester sclérosé dans un modèle qu’on sait condamné.
Le troisième éclairage à observer est l’endettement. Qu’est-ce que s’endetter ? C’est juste prendre des crédits pour financer un train de vie supérieure à sa capacité financière. Schématiquement, cela signifie donc que les états vivent au-dessus de leurs moyens, en dépensant de l’argent qui n’entre pas en revenus directs et indirects (taxes, impôts). Que faire ? Ce train de vie, c’est un moyen commode de s’offrir une paix sociale, mais également d’éviter un effondrement du tissu socioéconomique. En soutenant l’implantation d’entreprises en ZUP, ceci par des avantages fiscaux importants, on perd des rentes fiscales, mais l’on en obtient en contrepartie à travers l’emploi des chômeurs par exemple. Seulement, un modèle où le social gangrène les caisses, c’est un modèle voué à l’échec, car la moindre crise économique poussera encore plus rapidement les états déjà endettés dans le gouffre (plus de chômeurs, donc plus d’aides, moins d’entrées fiscales sur les salaires/charges diverses, donc augmentation des dépenses tout en ayant une baisse des recettes. En clair, le modèle idéal pour une faillite rapide du système).
Le dernier éclairage qui me paraît pertinent est le concept même de l’endettement des états. Quand les états supposent, à tort, que la dette n’est pas un danger, alors tous les états s’endettent, et se doivent mutuellement de l’argent, sans compter celui qui est également à rembourser aux organismes privés (banques en tête). Or, si ces liquidités s’évaporent, et que les états ne remboursent pas, ce sont les banques qui trinquent, car ce sont les fonds des entreprises et des particuliers qui servent de base aux prêts aux états. En poussant au bout le modèle, cela veut alors dire : qui dit défaut de paiement d’un état dit défaut de caisse des banques, qui, faute de liquidités, ne peut payer ses clients pourtant non endettés ! C’est dans ce cercle vicieux qu’on peut perdre ses économies, alors qu’on n’a aucun crédit à rembourser. Le plus frappant, c’est que les citoyens, pourtant conscients de cette folie économique, refusent toute forme de réforme. En effet, réformer, c’est forcément soit réduire les dépenses, soit augmenter les recettes. Les deux modèles peuvent également se mêler pour ne pas ponctionner du différentiel en un seul endroit. Cependant, les choix à faire sont plus que délicats, et nous allons voir pourquoi dans un prochain article…

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07 septembre 2011

Publicité

A en croire les campagnes d’affichage destinées « à nous, les hommes », nous serions tous des types maigrelets, au physique improbable, à l’allure androgyne, et qui, au surplus, seraient des amateurs de soins de la peau/cheveux. Seigneur, pardonnez ce blasphème par avance, mais bordel de Dieu, qui est l’abruti qui a pris le parti de croire qu’un type ordinaire, c’est un mannequin qui s’ignore ? Rien qu’à voir les tronches de premier de la classe à la mèche toujours longue, ou encore les trognes de « voyous » qui feraient soi-disant rêver les femmes, j’ai de quoi me dire « Merde, je dois être difforme, atrocement laid, enfin bref, un monstre ! ». Merci, la publicité, rien de tel pour me travailler le complexe en profondeur, ceci en lieu et place de mon cuir chevelu.

La publicité est un poison, c’est un opium pour celles et ceux qui ont besoin de consommer et de paraître pour se sentir exister. Dramatique, ridicule, il n’en demeure pas moins communément admis que l’on doit se conformer aux canons de la mode en vigueur. Dans ces conditions, je crois que je suis un paria, un de ces types qu’on aimerait enfermer quelque part, mais qu’on doit laisser en liberté, la faute d’avoir un jour mis la clé sous la porte des camps de concentration. Hé, les pourris en costume qui tentent de nous faire bouffer du shampoing par hectolitres, ça ne vous est pas venu à l’esprit que 99% de l’humanité ne ressemble pas à vos affiches ? Sans déconner, il m’est intolérable, et surtout impossible de ressembler un tant soit peu à ces « trucs » que vous osez qualifier « d’hommes ».

Et je ne parle même plus de la situation inacceptable des femmes sur ce terrain, tant on tente de leur fourguer des complexes anti-âge (allez gamine, va te déglinguer l’épiderme, dans dix ans, tu auras des rides, et tu consommeras nos crèmes bidon), des maquillages hypoallergéniques (ouép ma bonne dame, ça n’agresse pas la peau, ça ne fait que la marquer à vie), ou encore des parfums sans odeur ni senteur (là, je dis chapeau les mecs !). La publicité et les cosmétiques sont donc là, à vous attendre au tournant, juste pour vous faire les poches, la peau, les cheveux, puis vous faire vous morfondre, faute d’avoir atteint le niveau promis en filigrane par ces campagnes d’affichage.

Mais merde quoi ! Pourquoi je devrais leur ressembler d’abord ? Qu’ils viennent me le dire en face, au lieu de se réfugier derrière des bouts de papier et des marques à n’en plus finir. Là où cela devient ahurissant, c’est qu’en plus de vous vendre des saletés, les labos et autres entreprises du métier ont trouvé LA combine, le business à ne pas manquer : la cosmétique horaire. Vous ne voyez pas le concept ? « Baume de jour », « soin de nuit », « soin 24H », ça ne vous parle pas ? Il faudrait donc s’asperger la tronche de leurs tambouilles, mais cela toute la journée, quitte à ressembler à un mur venant tout juste d’être enduit. Je me demande même si les couches de baumes à la con ont le temps de sécher entre deux étalages. Colossal… j’imagine même l’acharné(e) qui, afin de ne rien louper, va jusqu’à se créer un agenda pour bien noter, heure par heure, quoi avaler, quoi se mettre sous le nez, quelle crème tartiner sur les cuisses et ainsi de suite. La gloire : vivre dépendant des cosmétiques. Faut le faire !

Quand le paraître devient plus important que l’être, il y a de quoi déprimer, mais aussi de jouer les résistants. Des crèmes ? Non merci, je ne les mange que brûlées. Des baumes ? J’ai une tronche à m’enduire le front de quoi que ce soit d’autre que de ma sueur, ou des baisers tendres de l’être aimé ? Des quoi ? Des soins pour mes cheveux ? Ils sont très bien comme ils sont, merci. J’en viendrais presque à me demander si, par hasard, ce ne serait justement pas l’excès d’usage de ces produits qui provoqueraient bien des problèmes de calvitie, d’allergies cutanées et j’en passe. Ce serait vicieux : vendre un produit comme étant un soin, en sachant qu’il fait des dégâts qu’on pourra, bien entendu, soigner par la suite. Redoutable, économiquement viable, et puis, dans l’absolu, il faut tenir le client par la bourse !

Enfin, je suis heureux de ne pas être une victime de ces cochonneries. Pourquoi ? Pour pouvoir me marrer en voyant un type sortir d’une parfumerie les bras chargés de boites diverses et variées, et l’imaginer s’interroger sur « La crème antirides, avant ou après la crème hydratante au beurre de karité ? ». J’en ris rien qu’en y songeant…

03 septembre 2011

Le choc des mots simples

Suite à la lecture choquante de cet article, j'ai mis la main sur la vidéo originale sous-titrée. Comment peut-on parler de "copyright" sur une oeuvre de cette importance? Honte aux héritiers de cet homme de paix que fut M. Martin Luther King...

Le discours du pasteur King soumis au droit d'auteur!


02 septembre 2011

Le diabolique

C’est amusant comme les mentalités changent. Tandis que notre monde se veut de plus en plus connecté, à tel point que certains petits malins s’amusent à pirater l’électronique embarquée des voitures, nous pouvons constater que cette attitude technophile révèle également une tendance étrange à la dédramatisation. Ainsi, au lieu de maintenir une forme de voile pudique sur le sexe, la violence, les propos « durs », nous les laissons se propager, à tel point que le JT de 20H ressemble dorénavant à un mauvais film gore, où, malheureusement, les victimes ne sont pas des acteurs touchant leur salaire à la diffusion. Dans cet esprit, nous pouvons observer une industrie plus tendancieuse encore, celle du jeu vidéo. Hé oui : la console de papy, le vieux machin en plastoc qui trônait sous la télévision cathodique n’est plus, nous sommes dans un monde de jeu mondialisé, où l’Allemand peut casser du Russe, ceci sans avoir à craindre les foudres du TPI. Et, tout comme pour la télévision, le jeu vidéo s’affranchit de plus en plus des limites « morales » que la société s’imposait par le passé.

Quand Wolfenstein 3D est sorti (ça date !), ce fut un tollé immédiat : massacre d’êtres humains, et qui plus est apparitions à la pelle d’uniformes nazis et de croix gammées. On jouait le héros qui les tuait, mais malgré tout, le jeu fut interdit en Allemagne, ceci parce que tout usage de la croix gammée est strictement réglementé et limité aux documentaires et aux films. Cela vous paraît absurde ? Pas tant que cela, tant le traumatisme est encore énorme, et il ne disparaîtra probablement que le jour où la dernière mémoire des combats sera enfin mise en terre. D’ici là, le nazisme restera quelque chose de tabou, d’inexpressible dans le monde des loisirs, quant bien même il s’agirait de tuer du nazi. La violence, ajoutée à la thématique historique et politique, est donc dérangeante, surtout si le réalisme s’en mêle.

Ce constat pourrait laisser un goût de satisfaction, en se disant « Bon, s’ils censurent ça, après tout, c’est que les autres jeux ne sont pas si violents que ça ! ». C’est une grossière erreur que de penser cela : photo-réalisme, violence à outrance, tous les ingrédients sont maintenant autorisés pour attirer le chaland avide d’émotions fortes. Prenons un second exemple : la série des gran theft auto (GTA) qui mettent en scène un voyou (vous), devant se faire une place dans la mafia, au prix de vols, agressions, meurtres, trafics divers et variés. Rien n’est épargné au joueur, depuis le racket jusqu’au massacre en pleine rue. Pire encore, la prostitution y est vue comme une manière de reprendre des forces ! Choquant ? Déviant ? Pourtant, ces jeux font partie des meilleures ventes de leur temps, sans compter que la richesse de chacun des titres de la saga se révèle meilleur que le précédent. En outre, la durée de vie exceptionnelle de ces jeux mène forcément l’amateur à s’atteler à la tâche, et donc découvrir tous les vices des épisodes.

Faut-il censurer ces jeux ? Interrogeons nous d’abord sur les acheteurs, et sur la nécessité, ou non, de leur tenir la main lorsqu’ils jouent. L’immense majorité des joueurs attirés par les titres comme GTA sont des adultes, responsables, libres de s’offrir tant des films pornographiques en toute quiétude, que d’aller au cinéma voir le dernier film gore insupportable du moment. J’en entends déjà hurler à la mort qu’il y a les enfants à proximité, qu’il faut les écarter de la violence, et donc leur offrir un socle éducatif suffisamment sain pour leur éviter la dédramatisation de la violence. A mon tour de hurler ! La violence, c’est un fondamental humain, cela représente tant de l’argent (industries diverses, depuis les armes jusqu’au cinéma d’action), que notre essence même (les guerres sont aussi vieilles que nous le sommes…). Alors quoi ? Tout laisser passer, tout tolérer, même l’innommable ? Raisonnons encore une fois : si l’on compare les dégâts de la violence ordinaire au cinéma ou à la télévision, et les dégâts que font l’alcool en abus, laquelle des deux choses est la plus meurtrière ? Nous connaissons tous la réponse à cette question, et, bien entendu, nombre de râleurs vont se réfugier derrière la notion du « avec modération ». Quelle hypocrisie, non ?

La violence devenue ordinaire devient réellement gênante quand le réalisme est trop proche de nous. Quand on joue à un jeu où l’on « tue » des adversaires, tant que cela conserve un aspect ludique et une esthétique « cartoon », chacun laisse passer sans être ému outre mesure. Par contre, dès que l’image s’approche trop de la réalité, on braille, on vocifère, on veut interdire… Mais pourtant, est-ce logique de présenter des carnages à la télévision, de ne diffuser que des séries où la thématique est le meurtre, l’enquête autour de celui-ci, voire même la mise en vedette d’un tueur en série (Dexter) ? Il n’y a pas de bonne ou mauvaise censure concernant la violence, parce que celle-ci est pressentie différemment selon les cultures. Par exemple, dans un des épisodes de GTA, c’est un jeune voyou membre d’un gang qui est le personnage central. Nous autres. Européens, ne connaissons pour l’heure ce phénomène de violence urbaine qu’à travers la télévision. Les USA, en revanche, subissent en permanence l’omniprésence des gangs dans les quartiers délabrés des villes du pays. En conséquence, on n’est guère choqué en France, là-bas, par contre…

Je m’interroge sur le sens de cette orgie de haine et de mort. Les jeux se modernisent, deviennent chaque jour plus réalistes, à tel point que tuer un personnage électronique se rapproche de plus en plus de la mort d’un véritable être humain. Mais de là à vouloir faire jouer la censure, je ne suis pas convaincu que cela soit une solution viable à court terme, ni même saine à long terme. La censure d’aujourd’hui comprendra-t-elle la différence entre un titre provocateur (GTA qui en est le parfait exemple), et un autre étant autrement plus malsain ? J’en doute, car il s’agira toujours d’un jugement de valeur, fondé sur la culture personnelle plus que sur celle du moment. On ne peut pas vraiment demander à un quinquagénaire en costume de comprendre les aspirations d’un ado de 16 ans, pas plus que la réciproque.

Doit-on envisager des réunions entre des « syndicats » de joueurs et l’industrie vidéo ludique afin d’instaurer une sorte de code de conduite ? Pourrait-on envisager une forme de comité de surveillance indépendant, afin qu’il soit susceptible de lever des alarmes quand certains jeux vont vraiment « trop loin » ? Je n’en sais rien, et je n’y crois pas trop. La responsabilité individuelle des joueurs est bien trop éloignée des aspects moraux ou culturels. Un joueur a pour but de jouer, non de chercher des raisons morales ou éthiques pour ne pas « tuer » un personnage en pleine partie ! C’est le paradoxe : un joueur rira des aspects trop réalistes, et la population susceptible d’être influencée par cette violence est, à mon sens, trop marginale pour être représentative de l’attitude des joueurs dans leur ensemble. Prenons le massacre de Columbine : on a mis en exergue la passion des tueurs ados pour les jeux vidéos, mais que cela ne fut pas leur motivation pour agir. On peut tout à fait penser qu’un lecteur fanatique de Frankenstein pourrait, chez lui, tenter de redonner la vie des cadavres exhumés, ou bien d’assembler des corps dépecés par ses soins. Alors, on censure Frankenstein ? Certainement pas.

01 septembre 2011

Les valseuses

Non, je ne pense pas le moins du monde à ce film pourtant culte, mais plus à ces danseurs et danseuses que sont devenus les responsables de la justice de par le monde. Autant, l’aspect de la « justice aveugle » peut sembler être une bonne idée, autant l’on peut constater avec regret qu’il s’agit là d’un vœu pieu. Hé oui, d’aveugle, elle serait plus borgne et ivre dans nombre de nations ! Regardez bien, vous qui avez des yeux par paires pour me lire, mais surtout pour scruter le monde qui vous entoure : la justice, c’est comme le couscous, on le voudrait toujours royal et c’est généralement juste la semoule qui vous est gracieusement servie…

Prenons une affaire aussi pathétique que politisée à mort : DSK. Je ne peux guère revenir sur le fond, mais je reviens avec une certaine ironie sur la forme. Entre les déclarations des uns et des autres, et une hypertrophie des médias sur le sujet, il y a de quoi rire jaune ! Cela relève plus d’une comédie surjouée, d’un mauvais Faydeau (ça existe ?) avec des acteurs incompétents, que d’un suivi judiciaire d’une tentative supposée de viol. Je sais, certains sont là à dire que la justice a été achetée, corrompue, que le juge est un vendu et j’en passes ; à l’opposé, d’autres parlent d’une décision légitime et d’une plainte complètement factice faite pour briser DSK. Vous voulez savoir ? Je m’en fous, un peu comme se moquent les poissons d’un rocher artificiel dans un aquarium. Ce qui m’intéresse, ce n’est plus tant qu’il ait été jugé innocent, mais plus que tout ceci tient vraiment d’un carnage légal, et que l’argent, maître des danseuses de luxe, est la seule et unique réponse qui fut propre à faire basculer la balance de la justice. Toujours aveugle et juste ? Je la vois plus comme ayant senti la masse des billets sur un des plateaux, et ce qu’il y ait eu innocence ou culpabilité. Quand les débat sont sabotés, qu’importe la réalité, seule la décision l’emporte.

On va dire qu’il s’agit là des USA, et que nous ne connaissons pas vraiment cela en France. Soit. La justice n’est pas forcément pire ici, mais tout de même, trouvez-vous logique que le secret de l’instruction soit devenu une simple idée ? En théorie, rien n’est supposé filtrer lors d’une enquête, et cela pour protéger toutes les parties. Là, on constate que les « fuites » sont nombreuses, et que les grattes-papiers s’en gavent sans hésitation. A qui la faute ? Est-ce que ceux qui parlent sont payés pour cela, agissent-ils pour saboter les enquêtes, ou sont-ils bêtement des candides écervelés ? Je ne sais pas quoi en penser, en tout cas la justice semble alors danser la carmagnole, bondissant comme un cabri sur les cendre de ses propres fondamentaux. Cela terrifie d’autant plus que chacun de nous, oui tous autant que nous sommes, pouvons un jour être amené à venir témoigner, ou être mis en accusation. Bonjour la vie privée une fois sa tronche étalée dans les journaux, parce qu’un imbécile a eu le malheur de « vendre la mèche » !

Je suis un légaliste, et comme le dit très justement mon ami Thoraval « Le droit, c’est le fondamental sur lequel doit reposer une société ». Cela sous-entend que le droit, et donc les lois, doivent protéger tout le monde, sans regarder à la nationalité, la religion ou la couleur de peau. Hélas, quand les médias s’emparent de la justice, et que celle-ci joue les valseuses de luxe, nous avons le droit à un Outreau de sinistre mémoire, à des accusés bidons maltraités par les tribunaux et les médias, et des familles qui, malgré une décision de justice les innocentant, vivent un calvaire car le doute est dorénavant ancré chez les autres. Justice, toi qui portes un bandeau pour ne pas prendre de décision hâtive, pourquoi acceptes-tu qu’on te fasse regarder ceux que tu juges ? C’est en ça que notre justice est maintenant une valseuse : elle danse selon le cavalier qui la prend dans ses bras, que le danseur soit la richesse, la politique, ou la médiatisation (ce qui, en soi, revient quelque peu au même dans le fond).

Allez, fais nous plaisir, cesse de te dandiner sur la piste, et reviens à tes fondamentaux : donner les mêmes droits à tous, juger avec respect et bon sens, et surtout ne plus jamais céder à la facilité d’offrir à la rue la possibilité de dire qui est coupable, et qui est innocent.