70 ans, déjà?
Ca y est, nous avons les 70 ans qui s'approchent. Sept décennies de changements scientifiques, politiques et culturels tels qu'on peut se demander "mais comment diable faisaient-ils avant l'iphone?!". Question légitime au plus haut point, puisqu'il n'existe plus de salut sans la bricole électronique envahissante qui vous leste la poche intérieure comme on lestait les cadavres de plomb au bon vieux temps qui est mort et dont tout le monde se fout. Hé oui: il y a 70 ans, un brun moustachu s'envoyait du cyanure puis se faisait éclater la tête, il y a 70 ans commençait le décompte macabre des recordmen du génocide, il y a 70 ans on disait "vive la fin de la guerre chaude aux bombes incendiaires, vive le début de celle bien froide où les idiots à étoiles se préparent à s'entretuer".
Le souvenir, ah cette madeleine de Proust qui est sans arrêt remise sur la table, ce met fade et nauséabond que chacun assaisonne à sa sauce aigre puante. Depuis les sémites revanchards, en passant par les nostalgiques d'un temps révolu, jusqu'aux arthritiques qui beuglent "que c'était mieux avant tas de jeunes cons!", tout le monde y va de sa chansonnette sur la fin d'un régime spartiate qui a été remplacé par un régime trop gras et arrosé de ketchup. Ainsi, mes frères, nous avons donc décrété que l'hostie était trop immangeable, c'est le burger qui a pris le relai! Mais quel relai… Celui du consumérisme frénétique où l'on arrive dorénavant à vous faire croire qu'une montre se doit de ne plus avoir l'heure mais de vous compter les pas pour vous faire perdre 70 ans de surconsommation, Celui de la conversion du "j'ai besoin" en "J'en ai jamais assez"? Ou bien celui, plus glauque encore, où les bras tendus d'hier sont grimés pour laisser supposer qu'un fascisme modéré serait la solution à tous les maux?
Ne me croyez pas nostalgique des hymnes martiaux, du pas de l'oie ou des envolées lyriques d'un guide hystérique dont l'accoutrement brun terre de sienne est à lui seul une insulte au bon goût. J'ai même peine à croire qu'on puisse, au détour d'une suspicion quelconque, envisager un seul instant que mon esprit puisse s'accommoder des massacres de masse, de la propagande poussée jusqu'à l'absurde, ou le refus de pans entiers de la culture sous prétexte qu'ils ne sont pas issus de gens dont les yeux bleus harpic et la blondeur l'Oréal seraient des signes de reconnaissance. Je n'éprouve aucun désir de voir un tel système reprendre place dans les urnes… D'ailleurs, je n'ai encore rien vu, comme le dirait mon géniteur qui, lui, a eu tout le loisir de connaître le bruit des bottes ferrées, mais c'est un autre sujet. L'essentiel est que le souvenir, cette nécessité absolue de ne rien oublier, c'est dorénavant un outil fort utile pour vous faire immédiatement passer du côté des chemises brunes, tandis que les autres sont en chemises à cols blancs.
La moralité d'une cause n'a pas à être défendue par une instrumentalisation du souvenir ou du devoir de mémoire. C'est beau comme maxime ça, mais cela sous-entend alors qu'on ne se doit d'écouter un discours que lorsqu'il a le mérite de ne pas comparer le présent au passé. Difficile, surtout si l'on envisage d'apprendre des erreurs de nos aïeux… Et pourtant, quoi de plus naturel? Celui qui vous jette à la gueule que le souvenir des actions de nos ancêtres doivent suffire à nous faire taire est le pire des menteurs, car lui-même salit la mémoire de ceux, justement, qui mériteraient qu'on se souvienne d'eux. Le ridicule ne tue pas, mais on devrait envisager de se substituer à la Mort en guise de service public palliatif. Comme je le martèle depuis des années, je n'ai pas défilé avec les porteurs de mort en masse, je n'ai pas poussé dans l'urne de quoi défriser la bonne conscience collective, et encore moins estimé qu'il était plus sain d'avoir un monde où la sélection darwinienne se ferait au butane (ou au zyklon, mais là je m'égare). Pour autant que je sache, les témoins de cette période commencent à se compter sur les doigts des manchots, et à terme il ne restera d'eux que des plaques, des photographies, ou quelques vidéos terribles que même un amateur de film de genre abreuvé de sang et de tripe n'arrive pas à regarder sans avoir un frisson dans le dos.
Donc, toi qui penses me faire la leçon en me braillant que je n'aime pas le juif parce que je défends mon droit à penser qu'il peut avoir tort, toi l'imbécile qui a eu l'idée de faire passer pour un bourreau par héritage génétique et non par les actes, tu défends les mêmes thèses dégueulasses, parce que tu revendiques tout aussi stupidement la supériorité de l'un au détriment de la culpabilité supposée de l'autre. Tu ne me crois pas? Ca te paraît si insensé comme miroir? Pourtant, observons donc! Le brassard noir prenait pour responsable de ses problèmes tout ce qui était différent de lui, et disait donc que c'était d'une responsabilité autre que la sienne s'il y avait des problèmes. Remplaçons donc "brassard noir" par juif et voyons si, d'une part, je me fais censurer ou insulter, et d'autre part si je ne suis pas dans le vrai. L'œil vif de l'observateur sera à l'affût de la réponse, l'œil torve du quidam s'en moquera, et l'œil acéré de l'extrémiste viendra me tancer en disant que je tiens des propos intolérables. Soit, c'est méchant et très résumé, simplifié et même exagéré. Cependant, si l'on y songe… qui a construit des colonies? Qui s'est bâti un mur paranoïaque? Qui estime qu'il faut laisser à l'âge de pierre ses voisins parce qu'il est plus facile de contrôler des gens quand ils n'ont que des pierres pour se défendre?
70 ans plus tard, le débat n'est pas clos, il y a encore cette puanteur des chambres, cette odeur de putréfaction des fosses communes, mais cela non parce que les corps n'ont pas eu le temps de refroidir, mais parce qu'il y a encore trop de gens qui entretiennent le sujet pour s'en servir. Pourquoi oublie-t-on les autres victimes? Pourquoi ne parle-t-on pas des premières victimes, à savoir les Allemands eux-mêmes? Historiquement, je ne vais pas tenir un propos disgracieux comme ceux balancés à la foule par le grassouillet borgne à gueule de bulldog, par contre je vais simplement dire "le malheur, ce n'est pas la chose à utiliser pour défendre ses actes". Il m'est insupportable de bouffer du "vous avez fait ceci". Désolé: es-tu français? Oui? Alors TU es tout aussi responsable, non? Ah non, zut, j'oubliais, tu as le droit de t'extraire du débat parce que "tu" (enfin des ancêtres) a souffert. Et les slaves gazés et réduits en esclavage? Et les pédés à qui l'on collait une étiquette pour être mieux vu des gardes chiourmes à la gâchette facile? Combien de temps cette madeleine continuera à souiller mes meubles, mes journaux, ma télévision de ses miettes grasses et puantes?
Aujourd'hui, on tente de faire dériver la question vers d'autres ennemis. Celui qui avait la kippa devient celui qui porte la djellaba. L'endimanché à chapeau noir devient l'endimanché tout en blanc qui va prier. Quelle différence? L'ennemi est identifié? Pas le moins du monde. L'ennemi, c'est celui qui croit penser, alors qu'il ne fait qu'ânonner. La religion n'est pas une référence absolue pour identifier le salaud, pas plus que la couleur de peau ne devrait être un critère pour quiconque ayant un peu d'humanisme dans son attirail mental. Cependant, bien que la science ait démontré qu'en tant que seule arbitre froide de nos débats stériles sur la commodité d'anéantir "un peuple sous prétexte de protéger le sien, qu'il n'y avait pas de race supérieure, nous en sommes encore à vouloir dire "nous leur sommes supérieurs car nous, nous ne fonctionnons pas comme eux". Raté: chaque culture, chaque religion, chaque personne a le droit et même le devoir de se faire une opinion personnelle. Malheureusement, la majorité des moutons aime à suivre le pâtre à travers les champs (de mine), ceci en bêlant à tue-tête des hymnes guerriers.
N'en avez-vous donc pas assez? N'avez-vous donc pas retenu les leçons de l'Histoire? Les commémorations vont-elle être sereines, légitimes en ne parlant "que" de tout le monde, ou bien cela va-t-il virer à l'absurde pantalonnade où l'on ne parlera que d'un type de victimes, où l'on occultera le rôle et les souffrances des autres? M'est avis qu'il y a aura un mélange des deux, saupoudré de quelques discours ambigus afin que chacun y trouve son bonheur. La politique, seul baromètre réel de nos véritables postures morales, sera alors mise à l'épreuve pour voir si l'on joue encore du "c'est ma faute, ma très grande faute" en se lamentant comme à Jérusalem… Ah merde, l'image est dangereuse, car elle ramène à une pratique religieuse connue!
Ce que j'en dirais moi, si j'étais le président dont nul ne voudrait parce qu'il dit ce qu'il pense même quand il ne faut surtout pas le faire?
Il y a 70 ans se terminait enfin l'un des plus grands carnage de notre temps. La seconde guerre mondiale s'est terminée sur un bilan terrible où des millions d'hommes, de femmes et d'enfants sont morts au nom d'idées xénophobes, au nom d'un mythe monstrueux et criminel, ou au nom d'une puissance militaire assassine. Le monde a vu la création des premières usines de mort, le massacre élevé au rang de production industrielle, et la déshumanisation de celles et ceux qui en subirent les conséquences. Aujourd'hui, 70 ans après, nous ne devons pas oublier ces victimes, nous ne devons pas permettre que de telles atrocités puissent un jour se reproduire.
La seconde guerre mondiale s'est terminée non sur une note d'espoir, mais sur un accord imparfait et dissonant où chacun a tenté d'y trouver son compte. On a écartelé des pays, créé de nouveaux empires, et d'une agression physique on est passé à une menace tacite avec la bombe atomique. La leçon ne fut pas totalement retenue, car au lieu de se massacrer mutuellement, on est allé déporter les combats dans d'autres pays, sur d'autres contrées éloignées, avec le sentiment de bien agir quand il aurait fallu s'abstenir. On en paye encore le prix aujourd'hui, avec une haine tenace envers les héritiers de cet historique que trop lourd à porter.
Le souvenir des horreurs de la guerre doit être préservé. Nous devons tous retenir que la guerre n'est jamais une solution, qu'elle n'apporte que malheur et dévastation. Ceux qui font les guerres n'en portent jamais le fardeau, et ce sont les enfants, les descendants des bourreaux qui doivent trouver le courage de regarder en arrière sans complaisance pour comprendre et ne pas reproduire les erreurs commises. Pourtant, cette action ne doit pas s'accompagner d'un reproche ou d'autoflagellation. Ne demandons pas aux enfants de porter le poids des responsabilités de leurs parents. Un homme se doit d'être jugé sur ses actes, et non sur ceux de ses aïeux. Un homme doit être estimé pour ce qu'il est réellement, pas pour ce qu'il peut représenter. La lumière doit venir du génie de l'homme, de sa capacité à aller vers le progrès, et non éclairer le visage de quelqu'un sous prétexte que ses traits sont trop proches d'un assassin mort et enterré.
J'espère que le futur saura démontrer qu'une unité peut se créer, fondée sur l'humanisme, la cohésion morale, et pas prouver que le monde ne peut être qu'une anarchie sanglante. J'espère, du plus profond de mon cœur, qu'on saura trouver la patience et la curiosité nécessaires à la vie ensemble, avec nos différences, nos désaccords, nos conflits même, mais sans haïr l'autre pour ce qu'il diffère de soi. J'espère enfin que nous tirerons au quotidien les leçons de ce passé terrible, afin d'éviter qu'un jour puisse émerger à nouveau un régime génocidaire et dépourvu d'humanité. Je rêve d'une école qui n'enseignera jamais à nos enfants que la haine est une façon saine de penser, je rêve d'un monde où l'obédience ne sera plus un critère de tri, et où chacun pourra prier sans que l'autre ne se sente en danger ou insulté. Je rêve enfin d'un monde où l'homme aura enfin pris conscience que sa multiplicité lui permet de bâtir un avenir, quand une uniformisation le condamne à répéter ses erreurs les plus terribles.
Le souvenir, ah cette madeleine de Proust qui est sans arrêt remise sur la table, ce met fade et nauséabond que chacun assaisonne à sa sauce aigre puante. Depuis les sémites revanchards, en passant par les nostalgiques d'un temps révolu, jusqu'aux arthritiques qui beuglent "que c'était mieux avant tas de jeunes cons!", tout le monde y va de sa chansonnette sur la fin d'un régime spartiate qui a été remplacé par un régime trop gras et arrosé de ketchup. Ainsi, mes frères, nous avons donc décrété que l'hostie était trop immangeable, c'est le burger qui a pris le relai! Mais quel relai… Celui du consumérisme frénétique où l'on arrive dorénavant à vous faire croire qu'une montre se doit de ne plus avoir l'heure mais de vous compter les pas pour vous faire perdre 70 ans de surconsommation, Celui de la conversion du "j'ai besoin" en "J'en ai jamais assez"? Ou bien celui, plus glauque encore, où les bras tendus d'hier sont grimés pour laisser supposer qu'un fascisme modéré serait la solution à tous les maux?
Ne me croyez pas nostalgique des hymnes martiaux, du pas de l'oie ou des envolées lyriques d'un guide hystérique dont l'accoutrement brun terre de sienne est à lui seul une insulte au bon goût. J'ai même peine à croire qu'on puisse, au détour d'une suspicion quelconque, envisager un seul instant que mon esprit puisse s'accommoder des massacres de masse, de la propagande poussée jusqu'à l'absurde, ou le refus de pans entiers de la culture sous prétexte qu'ils ne sont pas issus de gens dont les yeux bleus harpic et la blondeur l'Oréal seraient des signes de reconnaissance. Je n'éprouve aucun désir de voir un tel système reprendre place dans les urnes… D'ailleurs, je n'ai encore rien vu, comme le dirait mon géniteur qui, lui, a eu tout le loisir de connaître le bruit des bottes ferrées, mais c'est un autre sujet. L'essentiel est que le souvenir, cette nécessité absolue de ne rien oublier, c'est dorénavant un outil fort utile pour vous faire immédiatement passer du côté des chemises brunes, tandis que les autres sont en chemises à cols blancs.
La moralité d'une cause n'a pas à être défendue par une instrumentalisation du souvenir ou du devoir de mémoire. C'est beau comme maxime ça, mais cela sous-entend alors qu'on ne se doit d'écouter un discours que lorsqu'il a le mérite de ne pas comparer le présent au passé. Difficile, surtout si l'on envisage d'apprendre des erreurs de nos aïeux… Et pourtant, quoi de plus naturel? Celui qui vous jette à la gueule que le souvenir des actions de nos ancêtres doivent suffire à nous faire taire est le pire des menteurs, car lui-même salit la mémoire de ceux, justement, qui mériteraient qu'on se souvienne d'eux. Le ridicule ne tue pas, mais on devrait envisager de se substituer à la Mort en guise de service public palliatif. Comme je le martèle depuis des années, je n'ai pas défilé avec les porteurs de mort en masse, je n'ai pas poussé dans l'urne de quoi défriser la bonne conscience collective, et encore moins estimé qu'il était plus sain d'avoir un monde où la sélection darwinienne se ferait au butane (ou au zyklon, mais là je m'égare). Pour autant que je sache, les témoins de cette période commencent à se compter sur les doigts des manchots, et à terme il ne restera d'eux que des plaques, des photographies, ou quelques vidéos terribles que même un amateur de film de genre abreuvé de sang et de tripe n'arrive pas à regarder sans avoir un frisson dans le dos.
Donc, toi qui penses me faire la leçon en me braillant que je n'aime pas le juif parce que je défends mon droit à penser qu'il peut avoir tort, toi l'imbécile qui a eu l'idée de faire passer pour un bourreau par héritage génétique et non par les actes, tu défends les mêmes thèses dégueulasses, parce que tu revendiques tout aussi stupidement la supériorité de l'un au détriment de la culpabilité supposée de l'autre. Tu ne me crois pas? Ca te paraît si insensé comme miroir? Pourtant, observons donc! Le brassard noir prenait pour responsable de ses problèmes tout ce qui était différent de lui, et disait donc que c'était d'une responsabilité autre que la sienne s'il y avait des problèmes. Remplaçons donc "brassard noir" par juif et voyons si, d'une part, je me fais censurer ou insulter, et d'autre part si je ne suis pas dans le vrai. L'œil vif de l'observateur sera à l'affût de la réponse, l'œil torve du quidam s'en moquera, et l'œil acéré de l'extrémiste viendra me tancer en disant que je tiens des propos intolérables. Soit, c'est méchant et très résumé, simplifié et même exagéré. Cependant, si l'on y songe… qui a construit des colonies? Qui s'est bâti un mur paranoïaque? Qui estime qu'il faut laisser à l'âge de pierre ses voisins parce qu'il est plus facile de contrôler des gens quand ils n'ont que des pierres pour se défendre?
70 ans plus tard, le débat n'est pas clos, il y a encore cette puanteur des chambres, cette odeur de putréfaction des fosses communes, mais cela non parce que les corps n'ont pas eu le temps de refroidir, mais parce qu'il y a encore trop de gens qui entretiennent le sujet pour s'en servir. Pourquoi oublie-t-on les autres victimes? Pourquoi ne parle-t-on pas des premières victimes, à savoir les Allemands eux-mêmes? Historiquement, je ne vais pas tenir un propos disgracieux comme ceux balancés à la foule par le grassouillet borgne à gueule de bulldog, par contre je vais simplement dire "le malheur, ce n'est pas la chose à utiliser pour défendre ses actes". Il m'est insupportable de bouffer du "vous avez fait ceci". Désolé: es-tu français? Oui? Alors TU es tout aussi responsable, non? Ah non, zut, j'oubliais, tu as le droit de t'extraire du débat parce que "tu" (enfin des ancêtres) a souffert. Et les slaves gazés et réduits en esclavage? Et les pédés à qui l'on collait une étiquette pour être mieux vu des gardes chiourmes à la gâchette facile? Combien de temps cette madeleine continuera à souiller mes meubles, mes journaux, ma télévision de ses miettes grasses et puantes?
Aujourd'hui, on tente de faire dériver la question vers d'autres ennemis. Celui qui avait la kippa devient celui qui porte la djellaba. L'endimanché à chapeau noir devient l'endimanché tout en blanc qui va prier. Quelle différence? L'ennemi est identifié? Pas le moins du monde. L'ennemi, c'est celui qui croit penser, alors qu'il ne fait qu'ânonner. La religion n'est pas une référence absolue pour identifier le salaud, pas plus que la couleur de peau ne devrait être un critère pour quiconque ayant un peu d'humanisme dans son attirail mental. Cependant, bien que la science ait démontré qu'en tant que seule arbitre froide de nos débats stériles sur la commodité d'anéantir "un peuple sous prétexte de protéger le sien, qu'il n'y avait pas de race supérieure, nous en sommes encore à vouloir dire "nous leur sommes supérieurs car nous, nous ne fonctionnons pas comme eux". Raté: chaque culture, chaque religion, chaque personne a le droit et même le devoir de se faire une opinion personnelle. Malheureusement, la majorité des moutons aime à suivre le pâtre à travers les champs (de mine), ceci en bêlant à tue-tête des hymnes guerriers.
N'en avez-vous donc pas assez? N'avez-vous donc pas retenu les leçons de l'Histoire? Les commémorations vont-elle être sereines, légitimes en ne parlant "que" de tout le monde, ou bien cela va-t-il virer à l'absurde pantalonnade où l'on ne parlera que d'un type de victimes, où l'on occultera le rôle et les souffrances des autres? M'est avis qu'il y a aura un mélange des deux, saupoudré de quelques discours ambigus afin que chacun y trouve son bonheur. La politique, seul baromètre réel de nos véritables postures morales, sera alors mise à l'épreuve pour voir si l'on joue encore du "c'est ma faute, ma très grande faute" en se lamentant comme à Jérusalem… Ah merde, l'image est dangereuse, car elle ramène à une pratique religieuse connue!
Ce que j'en dirais moi, si j'étais le président dont nul ne voudrait parce qu'il dit ce qu'il pense même quand il ne faut surtout pas le faire?
Il y a 70 ans se terminait enfin l'un des plus grands carnage de notre temps. La seconde guerre mondiale s'est terminée sur un bilan terrible où des millions d'hommes, de femmes et d'enfants sont morts au nom d'idées xénophobes, au nom d'un mythe monstrueux et criminel, ou au nom d'une puissance militaire assassine. Le monde a vu la création des premières usines de mort, le massacre élevé au rang de production industrielle, et la déshumanisation de celles et ceux qui en subirent les conséquences. Aujourd'hui, 70 ans après, nous ne devons pas oublier ces victimes, nous ne devons pas permettre que de telles atrocités puissent un jour se reproduire.
La seconde guerre mondiale s'est terminée non sur une note d'espoir, mais sur un accord imparfait et dissonant où chacun a tenté d'y trouver son compte. On a écartelé des pays, créé de nouveaux empires, et d'une agression physique on est passé à une menace tacite avec la bombe atomique. La leçon ne fut pas totalement retenue, car au lieu de se massacrer mutuellement, on est allé déporter les combats dans d'autres pays, sur d'autres contrées éloignées, avec le sentiment de bien agir quand il aurait fallu s'abstenir. On en paye encore le prix aujourd'hui, avec une haine tenace envers les héritiers de cet historique que trop lourd à porter.
Le souvenir des horreurs de la guerre doit être préservé. Nous devons tous retenir que la guerre n'est jamais une solution, qu'elle n'apporte que malheur et dévastation. Ceux qui font les guerres n'en portent jamais le fardeau, et ce sont les enfants, les descendants des bourreaux qui doivent trouver le courage de regarder en arrière sans complaisance pour comprendre et ne pas reproduire les erreurs commises. Pourtant, cette action ne doit pas s'accompagner d'un reproche ou d'autoflagellation. Ne demandons pas aux enfants de porter le poids des responsabilités de leurs parents. Un homme se doit d'être jugé sur ses actes, et non sur ceux de ses aïeux. Un homme doit être estimé pour ce qu'il est réellement, pas pour ce qu'il peut représenter. La lumière doit venir du génie de l'homme, de sa capacité à aller vers le progrès, et non éclairer le visage de quelqu'un sous prétexte que ses traits sont trop proches d'un assassin mort et enterré.
J'espère que le futur saura démontrer qu'une unité peut se créer, fondée sur l'humanisme, la cohésion morale, et pas prouver que le monde ne peut être qu'une anarchie sanglante. J'espère, du plus profond de mon cœur, qu'on saura trouver la patience et la curiosité nécessaires à la vie ensemble, avec nos différences, nos désaccords, nos conflits même, mais sans haïr l'autre pour ce qu'il diffère de soi. J'espère enfin que nous tirerons au quotidien les leçons de ce passé terrible, afin d'éviter qu'un jour puisse émerger à nouveau un régime génocidaire et dépourvu d'humanité. Je rêve d'une école qui n'enseignera jamais à nos enfants que la haine est une façon saine de penser, je rêve d'un monde où l'obédience ne sera plus un critère de tri, et où chacun pourra prier sans que l'autre ne se sente en danger ou insulté. Je rêve enfin d'un monde où l'homme aura enfin pris conscience que sa multiplicité lui permet de bâtir un avenir, quand une uniformisation le condamne à répéter ses erreurs les plus terribles.
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