21 novembre 2011

Cyclique

Pour les gens ayant des soucis de vue, j’ai bien mis CYCLIQUE et non CYCLISME en titre de ce message. Alors, non, je ne vais pas traiter de la petite reine, pas plus que de la capacité à avoir une urine phosphorescente lors des prélèvements faits sur les coureurs du tour de France ! Le but de cet article est de parler de la capacité qu’a l’histoire à tourner en rond, à reproduire les mêmes erreurs, ceci avec les mêmes causes, et malheureusement les mêmes conséquences désastreuses. Ceci dit, ce phénomène n’a rien de bien nouveau, et je ne suis certainement pas le premier à en parler ! De fait, c’est donc une remarque éculée, usée par le temps et la répétition qui vous attend dans la suite de ce texte.

Trêve de lamentations sur le fait de ne pas être le premier sur le sujet, parlons clairement ! L’histoire est une répétition perpétuelle, et le fait d’oublier le passé est en soi la cause des malheurs futurs. Qu’on soit convaincu qu’il y a un avenir radieux, ou au contraire que nous tendons vers la guerre totale, force est de constater que les étapes cycliques des civilisations sont toujours les mêmes : émergence, croissance, firmament, puis enfin déchéance. Hé oui : toutes les civilisations naissent sur un ou plusieurs évènements fondateurs, elles prennent de l’ampleur, puis sur une période arrivent à un zénith culturel, pour finalement s’effondrer et disparaître à tout jamais. Ces sociétés, nous les analysons ensuite, nous en admirons la sophistication, la richesse, tout en occultant presque totalement ce qui a bien pu les pousser dans les fosses communes de l’histoire. Pourtant, s’intéresser au pourquoi serait, à mon sens, salutaire pour notre destin.

Prenons les dites phases. L’émergence est élémentaire, car elle définit un instant crucial. Typiquement, on peut décréter que notre civilisation actuelle industrialisée s’appuie fermement sur l’apparition de la machine à vapeur, et donc à la révolution industrielle. De la même manière, l’empire romain est « né » à partir de la création de la république, et du pouvoir politique central associé. Dans la même optique de croissance (seconde étape), Rome a envahi ses voisins, tandis que nos nations industrialisées se sont lancées dans la colonisation et l’exploitation des dites colonies. Dans les deux cas, les progrès scientifiques (chimie, construction, métallurgie…) furent nombreux. D’une manière assez amusante, c’est l’âge de bronze et l’âge de l’acier qui marquent l’avancée technologique des deux « empires », tout comme l’avènement de grandes cités urbanisées (Rome et les villes annexes, et Londres ou Paris en contrepoint). De fait, nous avons donc les mêmes manières de progresser, parce que la croissance économique, l’extension des marchés et des débouchés fonctionnent de la même manière depuis toujours !

Et là, c’est l’étape la plus intéressante, du moins d’un point de vue culturel. Une fois l’expansion arrivée à ses limites, soit par l’incapacité à aller au-delà d’un horizon géographique (taille de l’empire, ou bien distance immense pour le transport jusqu’aux colonies), soit par la nécessité de stabiliser les empires (incapacité à gouverner au-delà d’un certain éloignement les territoires conquis, ou bien instabilité politique trop difficile à endiguer), nous en arrivons au zénith économique. Les empires sont riches, boursouflés de suffisance et de certitudes, et l’on tend alors non plus à l’expansion, mais à la sophistication culturelle. C’est dans ce genre de période qu’on améliore le système éducatif, ceci pour créer une nouvelle élite apte à diriger par la loi (et plus par le glaive), qu’on voit apparaître un nombre énorme d’ouvrages majeurs, ou encore qu’on tient de plus en plus compte de la culture dans les décisions politiques. C’est un véritable stade où le théâtre devient aussi important et majeur que l’est la gestion des armées, où l’on se soucie au moins autant de sa toilette que de la gestion des indigents. Et ce summum, ce plateau maximal incite à la consommation : posséder les derniers produits à la mode (animaux exotiques, épices, bijoux dans l’antiquité, produits manufacturés dans notre société actuelle), améliorer le confort du logis… Tout est bon pour se rassurer, car posséder, c’est exister socialement !

Malheureusement, la sophistication implique une dérive dangereuse et vicieuse : les gens se lassent de posséder, et se voient rapidement absorbés par tout ce qui peut paraître stimulant, quitte à ce que cela soit « déviant ». Rome a payé sa sophistication par l’apparition d’une intelligentsia incompétente, gavée de richesses, mais totalement incompétente pour gérer les guerres contre les tribus autrement moins férues de confort. L’empire, pour se préserver, en est même arrivé à payer en or sa tranquillité…. Pour finir par s’écrouler, gangrené de l’intérieur par les luttes intestines et les bricolages politiques hasardeux. Cela ne s’est pas fait en un jour, tout comme ne s’est pas bâti en une bataille, mais n’est-ce pas là la voie que nous suivons ? En un demi-siècle, le confort, l’accession au « luxe » a corrompu une société qui se voue maintenant non plus à produire, mais bel et bien à s’enrichir. Les crises financières en sont un symptôme flagrant, mais le consumérisme l’est bien plus encore, alors qu’on pourrait voir cela comme un progrès. Il n’est en effet plus possible de communiquer sans informatique, tout comme il est devenu presque indispensable de posséder des produits électroniques. Pourquoi ? Parce qu’il faut entrer dans un moule, il faut « suivre », quitte à y perdre sa propre capacité de réflexion. Tenez, Facebook et autres sites connus, ne sont-ils pas finalement le signe de notre désir de sophistication de nos relations ? Au lieu de parler aux gens, on les joint par le web, en perdant de vue qu’ils existent physiquement. C’est inquiétant, non ? Le plus signifiant, c’est surtout l’abord à la pornographie, à la sexualité « débridée ». Toutes les sociétés qui se laissèrent aller à une forme de libertinage assumé finirent rapidement par s’effondrer. Est-ce un éloge de la morale ? Pas du tout ! C’est simplement que si l’élite dirigeante se préoccupe plus de sexe que de politique, force est de constater que l’état est, dans la foulée, condamné à disparaître.

Hé oui ! Nous pourrions bel et bien être sur le déclin, condamnés par notre incurie, prêts à sombrer dans l’anarchie, simplement parce que nous préférons le confort à la réflexion. Le danger est bien réel, palpable, et le dévoiement de notre morale pourrait bien nous coûter autrement plus cher qu’un simple « Nous aurions pu faire plus attention ».

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