20 octobre 2011

Kadhafi serait mort.

L’actualité ne manque pas de se faire importante à toute heure, et de se faire forte de prendre les gens au dépourvu. En effet, peu d’observateurs ont su identifier les prémices des révolutions arabes, et encore moins la chute de nombre de régimes qu’on supposait indéboulonnables. Or, force est de constater, et surtout d’admettre, que les dites révolutions sont parvenues à mettre à mal les certitudes, à tel point qu’il pourrait, on l’espère en tout cas, avoir une véritable remise en cause des pouvoirs politiques de la région. La fin des dictateurs, la destruction des symboles visiblement honnis, quoi de plus beau ? Tous les Européens semblent être fiers de la mort du despote, certains ont même des phrases osées comme Claude Guéant, qui se serait félicité de son décès ! Désole, mais je crois que cette réaction mérite d’être chroniquée, tout comme l’excès de fierté des membres de l’OTAN.

Prenons les choses dans l’ordre. Tout d’abord, remettons un peu d’histoire dans notre réflexion. Kadhafi, dictateur Libyen bien connu sur la scène internationale, et ce tant pour ses implications dans l’entraînement de groupuscules terroristes, que pour ses frasques lors de ses sorties, a souvent été déclaré comme « indésirable » du monde arabe. Ce statut, apparemment peu enviable, lui a paradoxalement donné une forme d’aura auprès des autres nations de la région, au titre qu’il était un des seuls à oser répondre pied à pied aux nations unies. Que ce soit dans une situation légitime ou non, Kadhafi a donc été non seulement une sorte de héros populaire, mais en plus un acteur des problématiques régionales. Isolée par un embargo, la Libye a donc soutenu le colonel contre vents et marées, décrétant logiquement que la misère était un fait de l’oppression étrangère, et non d’une gestion inacceptable du pays. En tant que producteur de pétrole, tout ceci s’est étrangement et honteusement évaporé, et l’on a accueilli l’homme un peu partout dans le monde, et en France notamment. Ah ça, les barils, ça cause plus que les intentions de démocratisation d’un régime. De ce fait, je trouve plutôt inconvenant, de la part de nombre d’états, d’aller se vanter d’avoir aidé à déboulonner l’associé d’il y a quelques mois seulement. Mais, on le sait bien, amis et politique sont incompatibles, ou alors uniquement sur une période de temps où la dite amitié a un intérêt réciproque…

Allons plus loin. S’il a bel et bien été tué, est-ce une bonne nouvelle ? Certainement pas ! A tous les imbéciles, heureux de savoir l’ancien dictateur mort sous les balles ou les bombes, sachez une chose : tout despote qui se meurt l’arme à la main, sera remplacé par un despote souvent pire que celui qui vient de tomber. Je me refuse à accepter un tel constat, et cette souplesse intellectuelle qui voudrait qu’une fois l’homme décédé, tout irait mieux. Il n’en est jamais ainsi ! S.Hussein exécuté, est-ce pour autant que la résistance s’est effondrée en Irak ? Hitler mort le 30 Avril 1945, est-ce que l’Allemagne s’est immédiatement rendue ? Ne rêvez pas, un dictateur qui périt, c’est potentiellement un comploteur qui viendra se faire passer pour un libérateur, pour ensuite remettre en œuvre les méthodes de son prédécesseur. La seule justice acceptable, ce n’est pas de voir périr un symbole en cours de combat, c’est que le dit symbole soit jugé par le système accepté par les citoyens, et pas autrement. On ne lynche pas un ancien chef d’état, on le juge, on lui donne le droit de se défendre, et, une fois la sanction choisie, on fait exécuter la sentence. Mais pas autrement ! Maintenant, il n’y aura aucune justice des hommes pour ses victimes, et ceux qui furent les tortionnaires de son régime vont hélas certainement perdurer au pouvoir. Vous ne me croyez pas ? Songez-y un instant : on ne casse pas les administrations en virant toutes les petites mains complices, il est impossible d’expurger les rangs des services de l’état de ses éléments ayant collaborés avec le régime. En France, nombre d’anciens collabos restèrent de hauts-fonctionnaires. En Allemagne, combien d’anciens membres de la Gestapo finirent leurs jours comme membres des services secrets ou de la police de la RFA/RDA ? Par conséquent, une purge ne tient qu’au fantasme, sauf à la pratiquer comme Staline, à savoir de manière systématique et violente. Mais est-ce cela que l’on veut pour une nation supposée débarrassée de la dictature ? Certainement pas.

J’aimerais que tous ceux qui, cyniquement, se flattent de savoir Kadhafi mort, combien ont négocié avec lui. Entre les vendeurs d’armes, les négociateurs de matière première, les trafiquants en tout genre, combien de ces bonnes consciences devant les caméras ont de la boue dans l’âme ? France, USA, Grande-Bretagne, ils sont à la fois membres de l’OTAN, des nations unies à des postes clé (le conseil de sécurité), et, en même temps, parmi les plus gros vendeurs d’armes de la planète. Les armes qu’on a vu être utilisées pendant les combats, d’où viennent-elles ? Les filières illégales deviennent légales quand elles servent des intérêts étrangers, et nul doute que nombre de munitions, revendues par des marchands de morts, furent livrées avec la bénédiction expresse des « soutiens » internationaux à la révolution. Tout ça pour quoi ? Pour s’accorder une chance d’avoir un nouveau contact plus malléable, plus sensible aux arguments tels que l’argent ou encore l’influence internationale… tout ce que voulait Kadhafi en somme.

Je vais finalement citer quelques lignes de monsieur Servat, grande plume et chanteur que j’adore.
Je ne hurle pas avec les loups!

Je dis, à vous tous qui m'écoutez : méfiez-vous. Les gentils, les méchants, c'est pour les enfants. Le bien est dans le mal comme la chaleur est dans Ia flamme. La vie est confuse, les héros vieillissent, les martyrs enfantent des bourreaux! Rien n'est simple, même Solidarité! Rappelez-vous, Israël, le Liban, Phnom-Penh libérée, le départ du tyran de Perse Vers I’ Ayatollah, vers le vieil homme à la barbe lumineuse coulait la sympathie comme un fleuve invincible. Et voici : le flot de ferveur est devenu fanatisme. La dictature des croyants a éteint la lumière. Le vieillard noir, assis sur les cadavres, nous l'avons chassé de nos cœurs. Dans nos poitrines, la place était vacante pour accueillir les résistants des vallées afghanes. L'imam, démon obscur, les Afghans, héros clairs et purs, voilà l'image qu'on nous présente! La même religion les guide et les arme. Quand les résistants gagneront quel voile viendra cacher la face de l'Afghanistan? Non, je ne soutiens pas l'envahisseur. Il est exécrable, indigne, brutal, odieux, méprisable, inhumain, dégueulasse! Il doit quitter le territoire afghan tout de suite, aujourd'hui, ce soir, et cesser sa soie guerre honteuse et inutile. Je crie dehors! Mais ne m'en demandez pas plus. L'agression ne change pas l'agressé en héros clair et pur. Ne me demandez pas d'entrer dans le jeu truqué du choix simpliste le Coran ou le Capital, le tchador l'American way of life, le Pape ou le P.O.U.P., les catholiques ou les protestants, l'infarctus ou le cancer, le gaz russe ou l'atome, le coup de poing dans la gueule ou le coup de pied au cul, les SS 20 ou les Pershings. Choisis! Dans les airs se joue un opéra titanesque. A l'ouest les cons d'or. A l'est, les cons d'acier. Au milieu, les pauvres cons! Choisis ton con, camarade!


Lisez bien attentivement… et répercutez cela sur la Libye…

Aucun commentaire: