15 décembre 2010

Richess

Je dois certainement être de ceux qui s’amusent d’un rien, tant je ris de nous voir nous agiter pour des notions telles que la fortune, le patrimoine, ou encore la saugrenue idée qu’on puisse préserver un maigre pécule. En effet, l’or, l’argent, le pognon, le papier monnaie, toutes ces conceptions humaines de la valeur des choses ne sont là que pour nous signifier notre égoïsme permanent. Quoi de plus prétentieux que de soupirer d’aise face à l’alignement stupide de chiffres sur un bout de papier ? Quoi de moins attirant qu’un bout de métal embouti, qui n’a pour seul but que de vous signifier, quand il vient à n’être plus en poche, que vous allez avoir des problèmes pour vous nourrir ? L’argent, ce n’est pas le malheur des pauvres, c’est le malheur de l’humanité toute entière.

Regardons avec honnêteté notre incapacité à gérer les choses autrement que par sommes et soustractions. On additionne les richesses, on soustrait les impôts, taxes et autres remboursements divers, et ce n’est qu’une fois le tout bien calculé qu’on peut, non sans un grognement d’agacement, constater que nous sommes fauchés. Ah, les comptes d’apothicaires ! Ah, la joie du crédit qui fait faire de l’argent sur de l’argent ! bien qu’on soit tous conscients de cette aberration, nous nous entêtons à jouer avec l’argent, à le dépenser de manière complètement ridicule, et pardessus le marché à nous plaindre qu’il nous manque toujours une certaine somme. Notez que les problèmes du pauvre ne sont pas si éloignés de ceux des riches. En effet, le riche attend que le pauvre dépense, or si le pauvre n’a rien à dépenser, le riche devient donc, en conséquence, moins riche et moins heureux ! Cercle vicieux s’il en est, le riche a donc besoin des économies, si maigres soient-elles, des prolos en manque de pognon.

C’est sidérant de bêtise. L’économie dite de marché, modèle libéral s’il en est, a déjà montré ses faiblesses à plus d’une reprise. D’ailleurs, son effondrement a bien provoqué l’avènement de gouvernements dictatoriaux, de famines inacceptables, de chômage, ou encore de crises longues et douloureuses. Tout cela pour quoi ? Pour avoir voulu valoriser le travail, d’avoir voulu mettre sous la forme de chiffres la force physique et intellectuelle des petites mains. Spéculons, valorisons sans réel bon sens des sociétés aussi vides que la huche à pain d’un prolo mis à la porte de sa PME ! C’est le concept même de la bourse, ce monstre qui absorbe impitoyablement les capitaux du monde, les voit grandir n’importe comment, puis vomit parfois quelques entreprises décrétées non viables parce que pas assez rentables. Amusant, cynique, et parfaitement inapproprié. Ceci étant, cela a fait le bonheur de quelques uns qui, bien entendu, estimeront que s’enrichir vaut bien quelques sacrifices.

De fait, j’ai attendu avec une certaine incrédulité l’action d’un Cantona suggérant de faire s’effondrer le système bancaire, en ôtant tous nos capitaux des banques. Pourquoi pas : après tout, ils bossent avec notre pognon, avec notre labeur, et ne se privent pas de faire n’importe quoi avec... Sans compter qu’ils nous font ensuite payer leurs erreurs ! Pourtant, cela ne fut pas suivi d’effets, et les politiques, faute d’avoir su mettre au pas les financiers, se sont empressés de prévenir les masses qu’il serait dangereux de faire s’écrouler le système mondial. Parce que tolérer que celui-ci se soit remboursé sur notre dos, et que nous n’ayons, à ce jour, aucun recours pour les voir sanctionnés ? J’adore le concept : c’est comme si votre voisin utilisait votre tondeuse, la déglinguait, et trouvait le moyen de vous facturer son usage ! Et c’est bel et bien les préceptes appliqués par les banques, non ? Dommage que monsieur Cantona ait un peu perdu de vue le fait que les gens ont fondamentalement peur de tout perdre, ce qui est malgré tout compréhensible. Stupide, face à la vacuité de la vie, mais compréhensible.

Finalement, nous sommes encore et toujours les prisonniers du monétaire, de l’économique, du financier, du boursier. Que cela nous plaise ou non, les banques ont encore de beaux jours devant elles, notamment parce que tous nous espérons de l’argent facile. Qui n’a pas ouvert un quelconque plan d’épargne, histoire de voir de l’argent faire des petits ? Qui ne s’est pas enthousiasmé à l’idée de toucher plus sans rien faire ? Joli rêve... Si demain quelqu’un trouve comment faire pousser un arbre à billets, je m’empresserai d’aller en planter quelques uns, bien à l’abri des regards envieux du FISC. D’ici là, je vais me contenter de continuer mon labeur, en bon larbin que je suis...

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