17 décembre 2010

Perplexité musicale

Je dois avoir passé le cap de la bêtise inhérente au syndrome « Vieux con ». En effet, épargnant mes tympans de la soupe insipide servie tiède sur les ondes, et les yeux du florilège d’images saccadées des chaînes thématiques, je ne suis absolument plus au courant de ce qui se fait dans la musique populaire. Pourtant, ce n’est pas faute d’avoir tenté de me raccrocher aux branches, simplement parce que je n’ai pas spécialement envie de passer pour un ignare quand parle de X ou Y en société. Ceci dit, j’admets non sans une certaine ironie que j’applique dans ces circonstances la fuite bien organisée. J’admets mon inculture, j’énonce mes groupes favoris, puis, une fois le tout déclamé avec un rien de fierté, je file et m’approche du buffet pour y trouver de quoi rassasier mon appétit physique.

Quoi que je puisse dire, il y a tout de même des choses qui se vendent, et plutôt bien apparemment. Il y a toujours les hits, les ventes à plus de 100.000 exemplaires, les concerts, les spectacles, les interviews dans les émissions de variété. Cependant, cela n’en fait pas pour autant des références, et encore moins des choses marquantes. Si je me penche avec curiosité sur ce qui est « à la mode », force est de constater qu’il y a des mouvances qui me mettent au mieux mal à l’aise, au pire hors de moi. Prenons par exemple ces groupes de hip-hop qui caracolent en tête des ventes : paroles fades et sans imagination, ou alors vindicatives et incitant à la violence, ils cumulent toutes les tares et tous les clichés qu’on peut aisément coller sur le portrait des jeunes de banlieues. Et pourquoi diable cela se vend-il alors ? Parce que cela donne un air rebelle que d’écouter ça, parce qu’entonner des paroles virulentes donne un semblant d’épaisseur « politique »… Mais c’est aussi faire le jeu des critiques qui n’hésitent alors plus à faire l’amalgame entre chanteurs et braqueurs de petites vieilles. Déprimant, non ?

A l’autre bout du spectre musical, il y a cette mode des brailleurs et brailleuses qui s’égosillent pour mon plus grand déplaisir. Ils hurlent, donnent de la trachée à tout rompre, ceci avec pour fond de commerce le mielleux des sentiments bouleversés. Ah, du « Je t’aime, tu m’as quitté », ça il y en a des bacs pleins les commerces, du « Je t’ai quitté parce que je ne t’aime plus » (histoire de refaire un tube l’année suivante), vous en trouverez dans les mêmes proportions. Et les ventes ne trahissent pas la passion populaire pour les ritournelles. Allez, admettons, la vie et l’amour sont des thèmes essentiels, mais de là à avaler n’importe quel bouillon supposé parler d’amour, il y a quand même une marche bien haute à franchir ! Et puis, les campagnes de communication n’hésitent pas à insister sur un romantisme à l’eau de fond de cuvette, à tel point qu’on tentera de vous caser et le spectacle, et le disque, et le DVD, voire même le parfum qui va bien avec tout ceci.

Et que penser de ces spectacles jouant à plein sur la nostalgie des quinquagénaires, ou sur une pseudo éducation « musicale » ? On a fait revivre les chansons de ABBA, fait rechanter Joe Dassin, alors à quand le spectacle de Michael Jackson sans Michael ? Tout est bon pour faire vibrer la corde sensible, rien n’est trop glauque pour faire du beurre. Cela n’ôte pas forcément de la qualité aux spectacles en question, mais ils me laissent inquiets sur le devenir de la création musicale. Ah tiens, on m’apprend que Mike Brandt a, lui aussi, le droit à son revival d’entre les morts. Sortez les pelles et les pioches mes frères, on a des cimetières à vider ! Un autre truc étrange au fait : pourquoi ces (censuré) de producteurs ont-ils fait traduire les chansons d’ABBA ? Ces tubes mythiques n’ont pas à passer au filtre du français ! On n’aurait pas idée de traduire Joe Dassin en anglais…. Si ? Et merde !

Et puis le summum, le fin du fin : faire de Mozart un opéra rock. Défendez la chose comme vous le voulez, revendiquez le côté punk qu’a certainement eu ce compositeur de génie en son temps, mais ne tentez surtout pas de me faire avaler que ses œuvres s’accommodent à la sauce électrique ! Bordel, si l’on commence à dire que Mozart c’est « ça », alors je ne m’étonne plus que nos descendants soient des incultes finis ! Par pitié, ne massacrez pas le classique pour faire n’importe quoi avec. On n’a pas à moderniser Beethoven, Haydn, ou quelque compositeur que ce soit. On doit en respecter l’intemporalité, l’incroyable fraîcheur, et ce des siècles après, et en savourer toute l’inventivité, mais certainement pas les remixer pour faciliter leur écoute à des gens qui ne jurent que par le synthétiseur Bontempi ! Pitié !

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