06 août 2010

Quand on se bat

Non, je ne vous resservirai pas mes ritournelles sur le devoir de se battre, celui de résister contre l’oppresseur, et tout le blabla de mes obsessions libertaires. Là, ce que j’ai envie d’aborder, et je l’espère, avec la décence et le respect nécessaire à ma réflexion, c’est le combat des anonymes qui sont confrontés directement à la mort, à travers une lutte incessante contre le cabre, l’oursin, la balle de golf, enfin, cette chose qu’ils appellent « tumeur » ou « cancer ». Nous autres, ceux qui, grâce à la chance, sommes encore en bonne santé, nous abordons la question sans réelle pudeur, et surtout sans le moindre abord à la réflexion qui est « Et moi, je tiendrais le coup ? ».

La vie s’éteint déjà à la naissance. L’allégorie d’Hamlet avec le fossoyeur n’est pas innocente : on meurt déjà à notre première prise de respiration, à notre premier cri à la naissance. Ainsi, nous nous savons totalement tributaires d’une vie somme toute courte, fragile, et qui plus est tributaire de choses sur lesquelles nous n’avons aucune prise : la maladie, le cancer, la tumeur maligne, tout ceci peut nous anéantir et nous faire disparaître en quelques mois, voire moins. Et qui blâmons nous alors ? Un Dieu auquel on s’efforce de prétendre croire, une existence aussi vaine que futile, la consommation d’alcool, de tabac, de stupéfiants, ou encore le destin à qui l’on en veut tellement qu’on finit par le maudire. Et en quoi sont-ils responsables ? Est-ce nos choix qui dictent notre destin ? Pas seulement. L’ironie de la vie, c’est qu’elle peut aussi s’arrêter sur un imprévu, un accident où l’on trébuche pour toujours. Le cancer se fout de la classe sociale, il n’éprouve aucun ressentiment envers le pauvre. Il s’installe, il détruit, il nous pourrit, jusqu’à l’extrême fin qui nous emporte ailleurs qu’ici.

Et les combats sont quotidien : ces médicaments qui détruisent autant la tumeur et détruisent les cellules adjacentes, ces douleurs incessantes que même la morphine ne sait stopper, et cette impression permanente de ne pas guérir, mais uniquement d’être en « rémission ». C’est quoi, la rémission ? Le fait d’être entre deux états ? Celui de mort vivant, et de vivant bientôt mort ? Nous sommes coupables de nous plaindre de leurs plaintes, de regarder ailleurs, parce que nous n’osons pas affronter ce qui peut devenir notre futur. Oui, la mort nous attend, tout comme potentiellement le cancer, mais pour autant, nous ne pointons pas avec franchise et honnêteté nos yeux vers ceux qui en souffrent. On se dit juste « à quoi bon se torturer ? ». Et c’est cruel. Détourner le regard, ou bien fixer les yeux comme lorsqu’on regarde des animaux au zoo, c’est tout aussi cruel.

Personne ne rêve de finir ses jours sur un lit d’hôpital. Personne ne fantasme sur une existence rythmée par les rayons, les drains, la pompe à morphine, et les perfusions. Personne ne demande à vivre le calvaire d’être entre deux zones, et parfois même, certains rêvent de passer de l’autre côté, rien que pour en finir avec cette non existence. Pourquoi non existence ? Parce qu’à nos yeux, ils n’existent plus. Ils ne sortent plus comme « dans le temps », ils ne peuvent plus faire du vélo ou même simplement aller au cinéma… Mais ils vivent, ils se battent, et nous les excluons. Tôt ou tard, c’est l’isolement qui prime, qui prend le pas, et ceux qui viennent encore sont ceux qui aiment vraiment. Les amis, les vrais, la famille, du moins ceux qui comptent de manière authentique et sincère.

Et certains s’expriment, ils racontent cette lutte, parfois jusqu’à la guérison, parfois on les raconte à travers des épitaphes déchirants. Ils méritent qu’on les lit, et qu’on les soutient en leur affirmant « Non, vous n’êtes pas seuls. On a tous quelqu’un qu’on aime qui souffre, qui demande à vivre, et qui pourtant sent sa vie s’envoler chaque jour… chaque seconde… »…

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C'est beau un humain, sur "Je dis du bien"

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