27 mai 2010

Liberté, libertaires... mais faites les taire !

Je hais littéralement les débats d’idées concernant la notion de liberté. A chaque fois, c’est un cirque innommable où chaque demeuré se jugeant apte à émettre une opinion y va de sa petite remarque. A trop écouter la masse grouillante d’experts et autres philosophes de bistrot, on peut même en devenir à peu près aussi ahuri qu’eux, c’est dire ! Et pourtant, depuis quand doit-on tergiverser sur la notion de liberté ? Est-ce donc si complètement abstrait de comprendre ce concept fondamental ? Apparemment, l’équité face à ce terme n’est qu’une vaste farce, d’autant plus que chacun y colle ce qui lui convient…

Prenez un fasciste. Bon d’accord, j’y vais fort, mais prenez le bon fasciste de base, vous savez, l’abruti qui n’a pour seule ressource intellectuelle que sa moelle épinière lui permettant de défiler au pas de l’oie. Pour lui, la liberté, c’est quelque chose que l’on se doit de brider, d’encadrer, et de surtout ôter à de grands pans de la société : communistes, juifs, les pas comme lui, enfin bref, tout ce qui peut se targuer d’avoir un QI acceptable ne peut décemment pas être libre. J’admets avoir souri aux propos démagogues et foncièrement xénophobes de nombre de « guides » de ces mouvances, ne serait-ce que parce que j’ai le cynisme en bandoulière… Mais tout de même, n’est-ce pas aussi une certaine idée de la nation que de vouloir strictement encadrer les libertés ? Ce fasciste, ce petit dictateur en bermuda (pour l’élastique) maillot marcel (pour la respiration des aisselles) ne fait que resservir ce que tous nous pensons aussi : les libertés des uns s’arrêtent celles des autres. Enfin bon, lui, il voit que les siennes devraient avoir la surface d’un continent, à comparer à celles qu’il m’octroierait, soit une pièce bétonnée de trois mètres de côté. Et puis c’est oublier que le sombre idiot susnommé a le droit de vote…

Maintenant prenons l’imbécile qui se proclame libertaire. Mais si, vous en connaissez tous au moins un, le benêt qui va enfiler la veste militaire et y épingler un symbole de paix, celui qui va être de toutes les manifestations pour sauver, en vrac, les bébés phoques, un dissident quelconque, ou encore pour militer contre l’énergie nucléaire, la réforme des retraites, ou la suppression de « son » bureau de poste à côté de chez lui. Ah lui, il aime à dire que la liberté doit être totale, que nulle bride ne saurait entraver l’homme, et qu’au surplus la liberté est inscrite de manière fondamentale dans la constitution et la déclaration des droits de l’homme. Par voie de conséquence, notre hippie sur le retour aura une attitude franchement hostile envers tout ce qui porte un uniforme… Mais ce sera aussi lui qui ira, le premier, dénoncer le petit jeune qui fume en bas de sa terrasse (parce que le tabac c’est tabou, et qu’il veut en venir à bout), appellera police secours parce que le voisin d’au-dessus fait un boucan intolérable (comprendre par là que le dernier né pleure trop fort pour notre fasciste en tenue écolo), et qui, bien sûr, revendiquera un vote socialiste, alors que son bulletin sera de droite. Qu’en penser ? Qu’être hypocrite est un art de vivre, et que ses libertés, encore une fois, semblent plus prioritaires, à ses yeux, que celles des autres.

Dans la masse, il y a également les prétentieux, les pédants, de ceux qui pensent pouvoir vous expliquer que vous êtes trop radical, et que la modération est une façon honnête de fonctionner. Alors, non content de ne pas tenir une position claire, ces tristes sires ont l’art de retourner leurs vestes au gré des courants du moment. La veille, ils diront « pas de peine de mort », et le lendemain l’exigeront pour un nombre précis de crimes ; c’est aussi de ceux qui n’avoueront jamais cautionner les actions policières, tout en se gardant, évidemment, de les trouver normales. Flou, toujours flou, encore plus flou ! A croire qu’ils vivent dans un monde digne d’un Londres noyé dans le brouillard le plus dense… Et puis, ils ont un sens de l’humour des plus acide ces guignols ! Tenez, pour eux, la liberté, c’est quelque chose qui est abstrait, et que l’on se doit de l’adapter à l’instant présent. Ah bon ? Dans ce principe, je peux donc, en tant que dictateur, décréter que les libertés ne servent à rien, et ceci temporairement jusqu’à la fin des actions terroristes des opposants. Donc, concrètement, jusqu’à temps que je sois déposé de mon trône par une révolution ou bien par un cancer quelconque. Et la liberté ? Hé bien, je suppose qu’elle n’est donc qu’une idée, rien d’autre qu’un tableau abstrait où eux cherchent à ne pas être trop pris dans la toile…

Et enfin, il y a les malades, les cyniques, les cinglés de la politique, les types comme moi qui disent que les libertés fondamentales sont celles d’avoir des idées, d’avoir le droit de les exprimer, et qu’en dehors de cela, la liberté, c’est de trouver le plus juste équilibre avec les autres. Emprisonner à tout va comme le fasciste ? Et le jour où le fasciste sera enfermé par ses potes d’hier ? Vivre sans contrainte ni loi ? J’attends avec impatience de voir l’anarchiste sans l’être finir roué de coups, le tout sous le regard bienveillant de la foule qu’il voulait plus libre. Ne pas décider de ce qu’est la liberté ? Alors messieurs dames de la France molle, préparez vous à quelques gros problèmes, car à force de tergiverser, vous ne faites qu’agrandir les fossés sociaux. Ceci dit, le jeu des troisièmes peut faire celui du premier, qui donnera alors de l’autorité aux critiques du second, qui sera alors taillé en brèche par les troisièmes… et ainsi de suite.

Comme quoi, la liberté, c’est finalement de faire et dire des conneries, et de se faire engueuler pour ça. Sans loi ? Point de sanction. Sans sanction, point de société. Amusant, non ?

Aucun commentaire: