24 mars 2010

Ironie de l’histoire

C’est quand même fou de voir à quel point l’histoire a le sens de l’humour. Pour peu qu’on ait une certaine culture de notre passé commun, certains symboles, noms, ou même personnages semblent nous ramener à des époques pas si lointaines et pourtant aujourd’hui presque oubliées. Ainsi, quelqu’un de né il y a moins de vingt ans n’a entendu parler du mur de Berlin qu’à travers des documentaires ou des commémorations, cette même personne ne connaît du communisme que l’image d’Epinal de Lénine, ou celle, plus terrifiante, de Staline, ou encore elle n’a jamais entendu parler de SS20, ou d’Aeroflot. C’est étrange, pour moi, ces mots, ces noms représentent les grandes craintes de mon enfance, avec Tchernobyl et son nuage, les défilés du premier Mai à Moscou (affichés à la télévision avec un teint volontairement grisâtre pour le rendre encore plus menaçant), et puis cette étoile rouge, signe de dictature et de peur de l’état policier ultime.

Je me suis demandé si je ne devais pas rappeler ce qu’est un SS20, un Antonov, ou encore parler de la sempiternelle Kalachnikov, puis j’ai réfléchi : après tout, à chacun de se mettre au goût du jour, de prendre les renseignements nécessaire à la culture personnelle. A contrario, je me suis aussi dit « Mais que veux-tu que cela leur foute, ce qu’est un SS20 ?! ». Oui, je me parle à moi-même de temps en temps, histoire de soulager mes doutes sous la forme de discussions aussi absurdes qu’improductives. Bref, j’en ai conclu que je me devais de vous dire qu’un SS20 était un missile nucléaire de conception et fabrication Soviétique, et Antonov une marque d’avions de même origine, aujourd’hui disparue. Tout cela sont des symboles d’une époque révolue, celle de l’affrontement manichéen est-ouest, celui de la guerre froide, toute une époque qui a eu ses morts et ses fantômes.

Pourquoi est-ce que je parle d’ironie alors ? Il n’y a rien d’ironique dans l’effondrement d’un système, et encore moins dans la faillite des états. Derrière, ce sont des peuples qui pâtissent, qui se voient affamés par le système capitaliste auquel ils ne comprennent rien ou presque, et ce sont des années de disettes en perspective. Pourtant, l’histoire se moque, elle se rit ouvertement de nous. Il suffit de réfléchir un peu à chaque époque où nous avons pratiqués des excès. Quand les Soviétiques durent se débarrasser de leurs blindés de la seconde guerre mondiale, énormément d’entres eux furent convertis… en bulldozers, voire en tracteurs agricoles. Quand les armes se turent, nombre de fusils furent revendus à d’autres nations pour qu’elles continuent à tuer, ou furent recyclées en n’importe quoi (ce qui a de quoi agacer les antimilitaristes : si cela se trouve, leurs vélos sont issus de la production d’acier de refonte des fusils meurtriers). Bref, l’histoire use et abuse de l’humour. Noir certes, mais de l’humour tout de même.

Auparavant, nous ignorions (pour les européens s’entend), ce qu’est Aeroflot. Un nom parmi tant d’autres, entendu ça et là à la télévision, vaguement identifié comme une compagnie aérienne. Qu’est-ce qu’Aeroflot ? L’équivalent Russe de Air France pour nous. Donc, une énorme structure, devenue moderne de par l’ouverture aux marchés internationaux, et qui, comme toutes les autres compagnies, pratique la libre concurrence. Fut une époque, on aurait parlé d’instrument de Satan (le grand ennemi rouge…), d’une entreprise périclitant avec des moyens obsolètes (et c’était le cas avec un parc d’avions mal entretenus, sans pièces détachées, et à la sécurité des plus douteuse), ou encore d’une compagnie qui ne verra jamais le sol européen.

Ironie de l’histoire encore et toujours…

Air France et Aeroflot sont dorénavant des partenaires commerciaux pour la desserte de nouvelles destinations vers l’est pour la société Française, et en contrepartie des ouvertures vers l’ouverture pour la compagnie Russe. Ironique, non ? Comme quoi, le commerce rapproche plus efficacement que n’importe quelle politique de rapprochement !

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