19 novembre 2009

Analyse personnelle de soi

Je me fais parfois l’impression d’être un de ces petits lutins malfaisants qui peuplent les idées noires des gens. Vous savez bien, ces êtres sans véritable forme définie, qui viennent vous chatouiller les pieds quand vous dormez, qui provoquent des accidents aux causes inexpliquées, ou encore qui s’amusent à engendrer des cauchemars dans l’esprit des enfants. Eh oui, je me vois ainsi, bestiole malsaine au regard cynique et cruel, et qui n’hésite jamais à appuyer sur la plaie qui suppure, ou encore à se gausser du malheur des autres. C’est ainsi, je fais preuve de mauvais esprit

Pourtant, je suis comme n’importe quel être humain, né dans la matrice d’une femme ordinaire (mais extraordinaire à mes yeux), éduqué avec quelques règles élémentaires de savoir vivre en société, comme par exemple « tu ne tueras point » (sauf si c’est vraiment un sale con), « tu ne voleras point » et j’en passe. Donc, on va dire une scolarité banale d’un banlieusard sans grand intérêt, et pas plus de misères que n’importe quel imbécile de mon âge. Oh, il y a bien eu cette phase de l’adolescence que je n’ai traité que comme étant un impératif désagréable, où j’ai plus raisonné sur les obligations de l’adulte que sur les qualités comparées des petits et des gros seins. L’éveil à la sexualité passé (sans les misères du faciès moucheté par les hormones en pleine guerre interne), je suis donc devenu le quidam moyen, l’abruti moyen s’abreuvant à la lueur de la télévision, à la bière bon marché, et à la tambouille probablement surchargée en pesticides.

Mais alors, dans ce cycle d’une affligeante banalité, où ai-je bien pu pêcher ce fond de cynisme digne des pires ordures de l’espèce humaine ? C’est à douter des préceptes de (je cite) « l’inné et l’acquis ». Oui ma bonne dame, j’ai bien de manière innée l’envie d’étriper l’être humain, et j’ai bel et bien acquis quelque part diverses explications à cette tendance meurtrière. Le psychiatre, en tout cas le praticien s’essayant à désamorcer mes tempéraments, armé de sa toute puissante science de l’esprit, serait bien en peine face à la grenade dégoupillée que je suis. Tiens le mou du ciboulot, remballe moi donc tes théories fumeuses d’Œdipe ou de je ne sais pas qui : je ne fantasme pas sur ma mère, pas plus que je n’éprouve une quelconque jouissance à envisager un bain de sang. Non, c’est juste un calcul simple : moins il y aura de cons dans mon entourage, mieux je me porterai. Mieux encore, j’améliorerai la condition de fossoyeur, et ma façon de faire sera bénéfique pour l’écosystème. Moins d’humains, moins de pollution.

Ne tiquez pas, je n’ai donc pas eu de formation intellectuelle pour faire de moi l’ordure malséante qui vous pollue le paysage à longueur de journées, pas plus que l’on pourrait prétendre à blâmer mes géniteurs sur cet aspect. Au contraire même, je le crois que trop modérés pour aller espérer que je devienne cet acariâtre aigri que je suis devenu. A vrai dire, je suis même intimement convaincu que ma non formation académique concernant l’écriture a permis, justement, l’émergence de mon mode de pensée. Si j’avais bouffé du Stendhal, Nietzsche, et autres penseurs sous la tutelle d’un professeur bien pensant et gavé d’idées gauchistes, je me serais sûrement tenu à une ligne de conduite sans débordements et sans tache. Malheureusement, j’ai choisi d’aller chercher la connaissance là où elle se trouvait, mais de manière solitaire et sans assistance. Le Gérard d’Aboville littéraire, en quelque sorte. Alors, mélanger des écrits d’une droite fleurant bon le nationalisme avec des ouvrages sur le gauchisme révolutionnaire, en saupoudrant le tout d’une analyse personnelle très orientée et emportée, ça vous donne moi.

Je me suis souvent penché sur les autres, notamment pour clouer leurs cercueils en gloussant de plaisir. J’ai même suggéré qu’on leste les dites boîtes pour garantir qu’elles restassent bien au fond d’un océan lointain, de sorte à éviter tout culte des abrutis que je désirais enterrer en toute discrétion. Et là, en me penchant sur ma propre tombe, je me rends compte qu’à défaut d’avoir une foule larmoyante déposant des fleurs sur mon marbre, je vais sûrement avoir quelques admirateurs qui vont cracher dessus en vomissant des insultes diverses et variées. J’espère honnêtement survivre à ceux que j’ai fustigés, de sorte à ce qu’ils ne profanent pas mon monument… ou alors, plus drôle, je vais me faire incinérer pour que je puisse faire progresser l’avancée des orties sur leurs monuments à eux. Salaud ? Juste pragmatique : on ne s’approche des orties que pour y aller chercher le ballon des mioches, ou pour en faucher la verdeur et s’en débarrasser au plus vite. Il y a bien des cinglés qui en font de la salade ou des tisanes… mais passons.

Où est cette belle humanité dont je suis supposé être doté ? J’ai beau me faire les poches, m’ouvrir la brioche au scalpel, elle semble bien planquée. A moins que ce soit cette tumeur résiduelle qui s’agrippe perpétuellement à mon âme, avec le malin plaisir de la pressurer à chaque fois que j’y attends de moins. Foutue conscience, toujours à me battre les tympans avec du « Tu ne devrais pas dire ça, ce n’est pas bien ». Ta gueule ! Si je le pense, je le dis. Alors quoi ? Je suis malsain ? Oui ! Un sale con parfois ? Encore oui ! Et alors ? Des gens pour me dire le contraire ? Ca fait de moi un humain je crois.

Et merde…

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