07 septembre 2009

Sim

Il n’est pas facile de rédiger une épitaphe pour un artiste qui a toujours eu pour vocation de faire rire. Pour un politicien, un malfrat ou encore un ordinaire, rien de plus simple, mais pour un comique, il y a de quoi caler. Celui qui tourne en ridicule son monde, et qui accepte de se ridiculiser pour le rire ne peut pas laisser un souvenir triste. Sim est parti, une embolie s’est chargée de sa carcasse, et c’est franchement triste.

Je vous vois, vous les éternels blasés qui lèvent un sourcil désapprobateur. Je vous vois, et vous maudit ! Sim ? C’était un homme qui a su se moquer de lui-même, de sa « tronche » si particulière, et qui a réussi à en faire un fond de commerce. Prenez le comme vous le voulez, ce fut un comique comme rarement il y en eut. Aujourd’hui, la majorité s’avère prétentieuse, voir même pédante, tout cela sous prétexte de bienséance et de « sens de la dérision ». Dérision ? La dérision, c’est de savoir faire preuve d’ironie sur soi-même, pas de rester politiquement correct. A une époque où se travestir était insoutenable, où se rire du sexe était malsain, Sim sût bâtir des personnages comme la baronne De La tronche en biais. Gonflé ! Cela semble aujourd’hui anodin, mais à une époque où tout était cadré et censuré, il fallait oser. Sim l’a fait, pour le plus grand bonheur de tous.

J’ai ri avec lui, et non pas de lui. Même en se plaçant dans les situations les plus rocambolesques, poussant le ridicule à l’extrême, il le fit toujours avec une tendresse pour le personnage moqué. Jamais ce ne fut méchant, ce fut juste drôle. Un peu comme un clown s’adonnant aux mimiques faisant rire les enfants, Sim se comporta en saltimbanques, en y ajoutant cette rare intelligence de la connaissance de soi. Il avait une « gueule », mais quelle gueule ! N’est-ce pas là le talent même de l’artiste que de savoir exploiter totalement son apparence ? Certains déguisent leurs traits, d’autres en tirent avantages. Lui, il fit les deux. D’ailleurs, quoi de plus hilarant que de le voir déguisé en Olivia Newton John dans une parodie de Grease ? C’était débile, sans queue ni tête, juste fendard. Maintenant, à celles et ceux qui pensent que l’intellect doit toujours tout prendre en charge, remballez vos cervelles ! Ceux sont les plus aigris qui ne connaissent pas le rire gras et honnête du prolétaire ! Faire rire tout le monde, sans distinction… c’est un don, non ?

Contrairement à son aspect franchouillard, Sim était aussi un esprit averti, riche, curieux, et aussi une plume efficace. On ne peut qu’admirer le mélange de culture et de dérision dont il fit preuve, des années durant, comme résident des « grosses » têtes sur RTL. Certes, cela semble être aujourd’hui une émission datée, s’adressant à un public plutôt âgé. Connerie ! Celui qui sait écouter avec attention ces gens de culture, ne peuvent que rire aux bons mots, aux réflexions parfois profondes sous couvert d’humour. Sim a fait partie de cette génération qui fit rire à la radio bien des personnes d’horizons différents. Fédérer sans imposer, se marrer. Tout simplement.

Il en aura tourné des navets, mais toujours avec la même conviction, le même sens du « faut faire rire ». Exploitation ? Cynisme alimentaire ? Quoi qu’on en dise, Sim fait partie de l’imaginaire collectif, c’est un morceau de la culture audiovisuelle Française. Il ne saurait être fait trop de louanges à ce type qui, bien qu’ayant une tronche, a marqué les esprits dans le bon sens du terme. Et puis, moi, il me fera encore rire, bien après son départ pour les cieux.

Enfin… Je le crois bien plus humain que nombre de ceux qui se cachent sous le voile de la bienséance. J’ai souvenir d’une émission où il prit le parti de se travestir, et de faire le « clochard » (qu’on appelle aujourd’hui avec pudeur le SDF) sur le parvis d’une église. Provoquant les passants, il jouait les ivrognes, tant pour tester la générosité que le respect d’autrui pour les petites gens. Et là, la surprise, l’imprévu : un véritable clochard, de ceux qu’on disaient faire partie de « la cloche » s’installe à côté. La discussion, filmée et enregistrée, est surréaliste. Tout à coup, impossible de distinguer qui des deux joue un rôle. Le clochard exagérant son côté bourru et son vocabulaire fleuri, ou bien Sim s’enfonçant dans une discussion de clodos ? Il y a de l’humanité dans le comique qui respecte celui qu’il singe. Il y eut de la part de Sim un profond respect pour cet homme perdu, discutant librement, se marrant avec lui, partageant un vrai litron de cinq étoiles. A tous les jeunes qui ne connaissent pas cet homme, je vous conseille de retrouver ce reportage. Il m’a ému aux larmes, autant qu’il m’a fait hurler de rire.

Monsieur Sim, monsieur Grand homme, merci pour ces fous rires !

1 commentaire:

Anonyme a dit…

je crois que tout est dit, mieux que je pouvais même le penser
tit ange, MERCI cet hommage, ben..il est partagé pour le coup !)