03 juin 2009

Vivre décalé

Que ferions nous sans notre téléphone portable ? « Impossible ! », ont répondus une bonne partie des gens sondés il y a quelque temps de cela. Comment ça, impossible ? Depuis quand cet accessoire soit tonitruant, soit vibrant, est-il l’essence même de l’existence ? A croire qu’avoir un prolongement électronique soit devenu un art de vivre, et non un accessoire certes utile, mais tout sauf indispensable. Déclarez donc ne pas avoir de portable, juste pour le plaisir d’observer la réaction des gens… c’est édifiant. Entre surprise, étonnement, et même moquerie, vous passerez alors pour un extraterrestre, voire même un asocial. Ben oui, vous ne le saviez pas ? Le téléphone portable est indispensable aux relations humaines aujourd’hui ! Bougre d’idiot que je fus en traînant les pieds pour m’équiper : le portable, c’est être branché en permanence, pouvoir être joint n’importe où, n’importe quand…

Et ce n’importe quand me gonfle prodigieusement. Merde ! Depuis quand suis-je tenu de répondre à toute heure du jour ou de la nuit ? Je ne suis sûrement ni le bureau des pleurs, ni le service des urgences. Pas question de faire les trois huit du standard personnel, notamment si c’est pour s’entendre raconter de fades banalités enrobées par l’humeur des plus râleurs. La technologie, c’est bien, mais c’est devenu invasif, et ce de manière pernicieuse. Tenez, qu’est-ce qu’on vous demande, au décroché de l’appareil ? « T’es où ? ». Mais où je veux abruti ! C’est dingue tout de même, se voir demander naturellement où nous sommes. Auparavant, appeler un numéro revenait à faire sonner un appareil fixe, dans un bâtiment, bref difficile d’envisager de demander où votre interlocuteur se trouve. Là, par contre, Gestapo et GRU se tiennent la main pour que chaque personne demande « T’es où ? ». Alors, n’hésitez pas à vous amuser de cette foutue manie malpolie : répondez n’importe quoi ! Sur le parvis de la tour Eiffel, en pleine séance de cinéma, sur la terrasse d’un café à Londres, et pourquoi pas, suprême plaisanterie de mauvais goût, un pays très éloigné, ceci en rappelant le coût exorbitant de la communication. Radical pour les emmerdeurs qui se souviennent de votre existence terrestre qu’au moment où ils ont besoin de vous.

J’arrête de maugréer sur le portable, vu que je m’en sers régulièrement… mais tout est du même tonneau : remplaçons la communication par l’équipement ! On vous prête un film ? Petit malin téléchargeant sans vergogne le dernier succès Dreamchose, vous voilà avec un film gravé… au format bidule que, bien entendu, vous ne pouvez pas visionner sur votre lecteur de DVD ordinaire de votre salon. Alors… bonne séance sur l’écran de votre PC en maudissant l’ami en question, qui, lui, se fera une joie de se payer votre fiole en rappelant votre retard technologique. Allons plus loin : à quand la dernière audition d’un CD tel quel, et non d’un fichier mp3 récupéré dieu sait comment ? Pas de baladeur mp3 (si possible avec une pomme dessus) ? Has been ! Et encore, là c’est juste quelques détails amusants, mais c’est de pire en pire. Présentez vous à la caisse d’un commerce, et votre chéquier en main. Moment de solitude quand le commerçant déclarera refuser les chèques de peur des impayés… en sachant pourtant que loi l’oblige à accepter votre moyen de paiement. Refaites la même opération avec une carte bleue, pas de souci. Et que dire du regard interrogateur du même commerçant si vous payez en espèce… Plus la somme est élevée, plus il sera suspicieux avec vos coupures de 100 Euros. Rigolo une fois, pénible à la longue. Et quoi ? Je dépense comme je veux, et si j’ai envie de te les briser, emmerdeur de commerçant de mauvaise foi mais prompt à encaisser les économies, j’en ai le droit !

La liste est devenue incroyable : Télévision à tube cathodique ? Pas assez bien mon fils, faut la HD, tu comprends ? Pas de four à micro-ondes ? Et comment tu la fais, toi, ta tambouille ? Internet ? Mais t’attends quoi, le dernier bouquet de machin chose contient la télé ET le net ! Ben merde alors : bientôt on devra s’abonner à quelque chose rien que pour obtenir la télévision. Ce qui est plus pénible encore, c’est que la publicité, elle, n’a pas quitté nos boîtes aux lettres, et maintenant les chaînes de centres commerciaux (Carrefour par exemple) envahissent les ondes hertziennes ! Font suer : en plus du catalogue papier, me voilà obligé de me coltiner leurs produits à la téloche. Overdose que je dis moi !

Fais suer tout cela… Je vais vivre décalé, sans technologie, au fin fond de la campagne, déconnecté des appareils réseaux et autres saloperies faites pour me pomper tant mes économies que mon temps (et surtout l’air à la longue). Mais là, on va me taxer de rétrograde, de passéiste, d’abruti refusant le progrès. Mais je vous emmerde ! Un livre, c’est du papier, un bon moment avec des amis, ce n’est pas un écran à diodes ou à dieu sait quoi ! Je me fous de cette technologie autant que les vendeurs se foutent de vous (discrètement) en vous voyant vous ruiner pour « le dernier bidule à la mode ! Trop hype ! »

Bon c’est pas tout ça… faut que je trouve un cadeau pour mon géniteur. 61 piges sur la gamelle aujourd’hui, et lui qui aime pas tous ces trucs qui font bzzz et gling gling ! Je lui offre quoi moi ? Une perceuse ?

3 commentaires:

Bill2 a dit…

Heureusement que je sais que ton article est volontairement extrémiste :)

Mais je me reconnais sur certains points.

Je suis ... informaticien.
Sauf que :
- je n'ai pas de portable
- pas de lecteur MP3 (et si j'en avait un, ça serait pas un Apple !)
- et le pire : je ne bois pas de café !

JeFaisPeurALaFoule a dit…

Et il me dit extrémiste alors que je tourne à la caféine/nicotine...

ESCROC!

Thoraval a dit…

Un informaticien qui ne tourne pas au café?!? La Révolution est en marche!...