19 octobre 2012

Dites, j'ai le droit de me moquer?

J'avoue, je vais tirer sur l'ambulance et me faire un malin plaisir de me moquer de celles et ceux qui, au détour d'une présidentielle, se sont pris à croire que les miracles tenaient dans le creux de la main d'une seule personne. C'est cruel de ma part, mais franchement, nous avons vécu le syndrome Obama en France en la personne de François Hollande. Le "Yes, we can" en étendard, la revendication du changement face à l'agité représenté par N.Sarkozy, quelle belle image pour rassurer la bienséance sociale face à la préservation des intérêts des riches et des puissants! Et pourtant, le miracle n'aura duré que le temps de dégriser un peu après l'ivresse, pour finir par des colères légitimes d'un électorat au mieux déçu, au pire carrément dépité. Mais au lieu de ne faire que montrer du doigt en poussant des "Ah ah!" moqueurs, allons plus loin dans l'analyse et ... Et puis non, j'ai encore un peu envie de rire, de me payer la fiole des candides ayant crûs qu'un politicien se présentant aux présidentielles pouvait être un bisounours pétris de bonnes intentions.

Maintenant que mon fou rire est passé, revenons aux affaires. Déjà, première erreur de scénario: l'électorat PS "moralement gentil" pensaient qu'en poussant un élu socialiste sur le devant de la scène que cela changerait la conjoncture, ceci jusqu'au miracle économique. Or, force est de constater que, loin de s'améliorer, la situation est à la stagnation, voire à la détérioration. Mais cela, pour le coup, nous serions avisés de ne pas jeter la pierre à Hollande ni à son équipe. Pourquoi? Parce qu'on ne retourne pas une crise en situation florissante en l'instaurant, pas plus qu'on ne peut pousser à la consommation quand la machine économique se grippe. Pour résumer ce qu'on doit admettre: ne faites pas d'un politique un messie, et n'espérez pas voir l'eau se changer en vin par la seule bonne volonté d'un seul homme. Le monde est empêtré dans sa propre folie, et la France, comme toutes les nations, subit le contrecoup de ses excès. C'est comme un lendemain de cuite: on se mange des nausées, une migraine à s'arracher les cheveux, et on met du temps à s'en remettre. Le monde s'est saoulé à la bouteille de la richesse artificielle par la spéculation, et maintenant on remplit les caniveaux avec les gens subissant le coma éthylique. Ni plus ni moins.

Le second point intéressant, c'est cette propension qu'ont les gens à croire que l'unité est une évidence. On met en lumière les divergences d'opinion, les couacs de communication au sein même du gouvernement, et l'on se moque alors ouvertement du président qui semble tout autant dépassé par les évènements qu'il semble incapable d'imposer la moindre orientation. Pour mémoire, l'homme est passé par des primaires qui, d'ailleurs, furent à mes yeux la démonstration que le PS manquait singulièrement d'une tête d'affiche capable de réellement fédérer une gauche mal en point. Résultat des courses: entre les déçus des primaires, ceux qui soutenaient un autre candidat à la présidentielle, et les aigris de n'avoir pas pu obtenir un poste à la hauteur, il me semble difficile d'espérer la moindre cohésion. Si l'on pousse encore plus loin, Hollande subit aussi le phénomène que j'appelle "la prise de conscience". En gros, à mes yeux, il se rend à présent compte de la réalité du chantier que représente la gestion d'un pays baignant dans la crise, ceci en étant cerné de requins se mangeant les uns les autres. Ces batailles médiatiques, où le premier ministre apparaît comme perdu au milieu des communiqués foireux de ses collaborateurs, ce ne sont que les symptôme d'un problème de fond, à savoir que personne ne reconnaît une autorité réelle ni à Hollande, ni à Ayrault. Et à mes yeux, le pire, c'est de voir Harlem Désir, un agitateur douteux, devenir le premier secrétaire du parti. Je crois que là, la gauche va devoir rapidement se sortir de cette ornière, sous peine d'offrir une voie royale à la droite aux prochaines présidentielles, voire même à la première échéance électorale!

Le troisième point, et non des moindres, est selon moi que Hollande a fait une erreur monumentale en voulant jouer la présidence "normale". Quelle ineptie! Quelle bêtise (j'allais dire connerie tiens) que de jouer sur la démagogie de la rémunération! Je craignais qu'on soit face à un président mou, incapable de communiquer avec énergie, et hélas, pour le moment, mes craintes se vérifient. Loin de le croire incompétent, je le crois surtout incapable de mettre en avant le moindre résultat, ou même de défendre des idées parfois difficiles à avaler pour le grand public. A ce titre, Sarkozy, si pénible qu'il fut avec son omniprésence médiatique, avait au moins le mérite de sembler pouvoir parler de tout ouvertement, quitte à dire n'importe quoi, ou bien d'aller au-delà de ses prérogatives. Ensuite, on lui a reproché cette présence, et Hollande a revendiqué d'agir à l'opposé de son rival. Résultat des courses, Hollande passe pour un mou et une tache en comm'.

Dernier aspect redoutable, c'est que tous nous sommes dans l'incapacité d'admettre que nous avons vécus des années fastes grâce à l'endettement, et surtout d'admettre que la France n'est plus une superpuissance à l'échelle mondiale. Nous avons toujours une grande gueule, mais plus les épaules pour l'assumer. Hollande, hélas, en est tout le symbole, tant physiquement que médiatiquement. Ca ne met pas en cause ses compétences, juste son image. Or, c'est sur l'image que jugent ses électeurs... Et l'on est donc dans la déception, la frustration, et en conséquence la mise en avant de son prédécesseur! Je goûte cette ironie, car autant la France ne semblait plus vouloir de Sarkozy, autant il est celui dont on parle le plus en ce moment. Plus que le président en poste, plus que le premier ministre! Expliquez moi ça les gens...

J'ai menti. Je disais en préambule que je ne moquerais pas des électeurs déçus, mais là c'est plus fort que moi. Vous pensiez que les miracles s'opèrent en quelques mois? Que l'on peut redresser les finances publiques sans sabrer dans les effectifs, sans impôts supplémentaires, sans restriction? Par quel miracle? Je me permets d'être méchant sur ce coup, car il ne fallait pas être un génie pour le savoir. Je ne dis pas que Hollande est un mauvais choix, je dis que l'électeur de gauche serait avisé d'ouvrir les yeux, de comprendre qu'on ne peut pas tout avoir, et qu'en définitive, Sarkozy, Hollande, ou tout autre élu fait le même boulot, à savoir de tenter l'impossible qui est de concilier la chèvre et le chou. Une fois cela admis, la présidence Hollande vous semblera de suite moins erratique, bordélique, et plus cohérente.

Ah mais on me dit à l'oreillette "Il avait promis de ne pas toucher aux impôts, et là il nous fait les poches!". Ben oui: les promesses n'engagent que ceux qui les écoutent".

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