10 juin 2008

Invasion

Lors d’une récente discussion avec un ami, nous sommes tombés d’accord sur un point essentiel du comportement général des êtres humains, et plus particulièrement sur l’usage de l’invasif (entendre par là l’acte de devenir envahissant) pour nous faire admettre autant l’inacceptable que le superflu. En se penchant sur la question, nous avons constatés que d’une part nous subissons tous l’assaut incessant tant de technologies que d’idéologie, et ce par tous les procédés possibles et imaginables. Concrètement, on pourrait même établir un classement des plus grands envahisseurs des temps modernes. Observons donc ces champions de la prise de position forcée dans la vie de chacun. Partons sur le TOP 3...

Tout d’abord, il y a évidemment les technologies de l’information. Jusqu’à il y a encore quelques années, le tout venant n’était pas tenu d’être joignable où qu’il soit, pas plus qu’il ne se devait de s’être immatriculé sur le réseau via une adresse de messagerie. A présent, je mets au défi qui que ce soit d’accéder aux annonces d’emploi récentes sans se connecter à l’incontournable toile Internet. D’aucun me répondront qu’il s’agit là d’un progrès phénoménal, qu’il offre des perspectives jamais vues, et qui plus que le Web accélère énormément les procédures de recherches. J’en conviens, mais en y réfléchissant de plus près ce « progrès » n’implique-t-il pas implicitement l’obligation de s’équiper ? Oh, je sais, le coût peut s’amortir s’il permet à terme de décrocher l’embauche si attendue, mais pour autant se mettre « à la page » ne garantit en rien l’obtention d’un poste ! De là, une question plus insidieuse sort du néant : s’équiper, oui, mais avec quels revenus ? Soyons logiques : pour pouvoir accéder à Internet il faut payer, et ceci tous les mois, tout comme il faut déjà disposer d’un ordinateur permettant la dite connexion. Une fois ce raisonnement fait on peut donc en conclure que les foyers trop modestes se voient immanquablement exclus de cette évolution de nos mœurs, et qu’ils tentent alors, en s’endettant, de suivre le mouvement. Si l’on prend le même type de raisonnement avec le téléphone portable, on constate le même problème qui devient encore plus aigu : le (futur) salarié devra répondre dans un délai le plus prompt possible à son (futur) employeur afin de se présenter au plus vite sur le lieu de travail. Quid de l’intimité ? Quid de la liberté de mouvement ? A force de vouloir rester connectés nous nous créons des barrières et des camisoles invisibles sous la forme de cartes à puces et d’écrans plats. Pour moi, il est donc évident que l’industrie de l’information est la championne du matraquage, de l’invasion de nos foyers sous la forme du « Si vous ne nous avez pas, vous êtes largués ».

La médiatisation d’un sujet au détriment d’un autre est tout aussi invasif, et ce avec des buts aussi avouables que le besoin d’alimenter la passion des fans, autant que l’inavouable plaisir à enterrer les questions gênantes. Fatalement, quand on prend les deux tiers d’un journal du soir pour y placer des résultats, commentaires et autres interviews de matchs (voir la coupe actuellement en cours), il y a de quoi se demander si le monde s’est assoupi pour la compétition ! Autant le revendiquer tout de suite : quand un championnat s’accorde l’essentiel du temps d’antenne je souffre énormément vu que je n’en suis que les résultats et ce de manière très lointaine. Tout au plus je trouve refuge sur les réseaux câblés qui eux, faute de moyens, ne retransmettent pas les matchs mais se rattrapent sous la forme de rétrospective et autres analyses fumeuses des scores et actions cruciales (d’après eux). Là où cela devient ahurissant c’est que le merchandising s’ajoute par-dessus, comme une couche supplémentaire d’une tarte déjà indigeste. Allez, regardez les rues et avenues : le temps d’une compétition elles deviennent le lieu d’un défilé revendicatif d’une identité nationale (sans limite de frontière, les origines étrangères réapparaissant alors sous la forme d’un maillot, d’un fanion ou bien d’un drapeau placé dans la voiture). Numéro deux donc, le sport dans son ensemble qui me pourrit l’existence non par sa propre essence, mais par l’invasion des médias (et accessoirement de mes temps de repos). J’oublierais presque les conversations d’experts vous déblatérant des analyses d’un niveau d’intelligence proche de celui du cloporte, mais là je diverge.

En troisième position enfin, l’écologie se pose là comme sujet et thème inévitable de ces dernières années. Bien qu’il soit indispensable de gérer notre avenir avec raison, est-il pour autant nécessaire de me faire bouffer des slogans abrutissants, des affiches aussi ridicules qu’obscures que des émissions m’accusant moi de la dernière marée noire. Désolé de vous décevoir les écolos, je suis conscient de la nécessité, mais à ce que je sache les ménages peuvent faire des efforts, mais c’est avant tout aux industries d’adapter leurs produits aux problématiques de demain. Qu’est-ce que je peux y faire, moi, si ces crétins pensent que trois fois plus d’emballage est mieux pour l’image de marque d’une pizza congelée ? En quoi suis-je responsable si la machine à café use et abuse de gobelets non recyclables ? Et puis pourquoi vient-on me dire que les produits pétroliers sont de plus en plus chers ? Les grands groupes maintiennent leurs marges, se gavent sur l’augmentation du tarif du brut (qui lui dépend non du volume mais de la spéculation faite sur celui-ci) et qu’au final, bon gré mal gré nous sommes tenus d’utiliser du pétrole. A ce titre j’objecterais également que c’est essentiellement aux industriels de se poser des questions sur leur façon de consommer : dans un pays capitaliste les gens prennent ce qu’on leur offre, et si l’offre est la même partout les gens prennent la moins chère. C’est ainsi, moins cher signifie souvent plus polluant. Tant que des normes ne seront pas instaurées je ne serai pas ouvert au matraquage du « Economisez de l’énergie » qui tacitement dit « … à place des grandes industries qu’il ne faut surtout pas emmerder ».

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Quand je pense au nouveau logo d'EDF qui veut donner à cette entreprise une image écolo alors qu'au même moment elle utilise à 90% du nucléaire je me dis qu'on se fout vraiment de notre gueule.

JeFaisPeurALaFoule a dit…

Sauf qu'il sera indispensable de se poser la bonne question à savoir si vu notre besoin en énergie, multiplier les éoliennes, construire de nouveaux barrages ou envisager les centrales marémotrices sera rentable tant écologiquement qu'industriellement. A aujourd'hui l'Allemagne, pourfendeuse du nucléaire est obligée de se relancer dans la centrale à charbon pour subvenir à ses besoins, et même d'acheter à l'étranger.

En tant que tel, le fantasme écolo qui dit "zéro nucléaire" est non seulement ridicule en terme de bilan écologique qu'en terme de bilan de production. Le nucléaire n'est bien entendu pas la panacée concernant les déchets, toutefois est-ce aussi grave que le recyclage des autres équipements arrivés en fin de vie?

Anonyme a dit…

N'étant pas Frenchy, on ne m'accusera pas de chauvinisme. Donc, question! Qui a intérêt dans les pays occidentaux à ce que la France perde son avance technologique dans le nucléaire?

JeFaisPeurALaFoule a dit…

Et bien en dehors de la bêtise de quelques lobbies trop heureux d'envisager l'avenir sous un jour noir pétrole, il y aurait aussi toute une population d'écologiste stupides ne se rendant pas vraiment compte de leur bêtise...

Anonyme a dit…

J'aurais dit les USA...