31 décembre 2007

Je vous en pose des questions, moi ?!

La phrase est jetée ainsi en pâture à mes lecteurs. Et oui, est-ce qu’on en pose des questions, nous, des bonnes questions je veux dire, pas l’heure qu’il est ou bien si le poisson est frais dans un restaurant ? D’ailleurs, c’est un art consommé du langage de demander des choses qui n’ont pas de sens car généralement on obtient la réponse rassurante et systématiquement attendue dans ces instants où le moment agréable devient idiot : Le serveur répond « Il est du jour monsieur », la fiancée « Oui je suis content d’être avec toi » d’une hypocrisie crasse et même, suprême affront le « Oui » du mariage… Je m’égare. Revenons en donc à la question fondamentale de savoir si nous avons ou non le cran de demander le fondamental à notre cible ou si nous sommes trop trouillards pour aller au bout de nos convictions.

L’art du journaliste est d’interroger sans brusquer ni offusquer son interlocuteur. Diplomate et fin négociant à la Ribben… non pardon, il se doit d’aborder les sujets dangereux sans pour autant placer un champ de mines entre l’interviewé et la réponse. Par exemple, si l’on parle de torture dans le cadre d’opérations militaires on ne dira pas à l’intéressé « Pouvez-vous nier l’existence de ces actes odieux à la vue de ces clichés ? », c’est du ressort de la justice de le faire, mais plutôt « Nous avons pu obtenir ces clichés, vous semblent-ils crédibles ? ». Ménager une porte de sortie est aussi difficile que d’entrer en matière, et ce n’est ni un journaliste ni un tankiste revenant du front qui vous dira le contraire.
Population vivant sur le fil du rasoir, le journaliste devra donc composer une partition subtile au moment clé de sorte à ne tirer que les informations et les faits en les noyant dans l’eau trouble du banal plutôt que d’agresser à l’acide et ainsi brûler ses chances de faire un papier digne de ce nom. Ceci dit, il existe également toute une population de gratte-papiers experts dans l’art de ne rien dire à coup de questionnaires pratiques, anodins et surtout faciles à mettre en page. La palme revient généralement aux commentateurs spécialisés, ceux qui font et sont supposés défaire les carrières des artistes, sportifs ou politiciens. Rares sont ceux qui entrent dans le vif du sujet et se feront un malin plaisir de parler de leurs frasques vestimentaires à la place de la dernière condamnation pour usage et détention de stupéfiants du guitariste assis en face de lui. L’époque est à la modération, pas à l’écorché vif.

Quoi qu’il en soit, nous pouvons dévier ces réalités sur notre quotidien, car celui-ci recèle des perles d’hypocrisie et de mauvaise foi. L’époux qui, rentré la veille au soir ivre mort, demande au matin clair à son épouse si elle va bien, n’est-il point en train de tourner autour du pot. Et elle de répondre « tout va fort bien mon chéri », n’insiste-t-elle pas lourdement sur la sonorité nasillarde du « chéri » ? On me dira qu’il s’agit souvent de convenances mais aussi de peurs de représailles… Certes, j’en conviens, mais faire le faux-cul avec la belle-mère mégère et égocentrique en diable, c’est quoi, la terreur de l’holocauste nucléaire peut-être ?
On néglige les vertus des éclats de voix il me semble. Sous prétexte de ménager les tympans et accessoirement sa réputation auprès des voisins on se targue d’affirmer que tout va parfaitement bien, au risque de passer pour un con fini. Ce qu’on tente de cacher sous le tapis finit toujours par apparaître le long des murs, et la poussière comme les engueulades finissent toujours par se loger là où c’est chiant à régler. Somme toute, refuser de dire ou de demander des vérités, c’est en revenir à l’oppressant déni de soi, cette façon glauque de s’enfermer dans le mensonge par omission ou dans la frayeur d’aborder tout un tas de sujets…
Les conversations peuvent donc être minées, dans tous les sens du terme.

Passons à autre chose : Noël et le jour de l’an, n’est-ce pas là deux fêtes qui symbolisent le royaume du non-dit ? Regardez un peu autour de vous, ces gens que vous supportez pour « faire plaisir » et non par envie. Observez vous dans le miroir, voyez donc ce sourire de faux-cul obséquieux penché au-dessus de l’épaule d’un voisin pénible et fleurant bon l’anisette rance en lui servant un « allez, un dernier pour la route », que vous lui souhaiteriez volontiers fatal… Si si c’est bien de vous tous, de nous tous finalement qu’il s’agit. On s’emmaillote de bons sentiments humant bon la supercherie et l’amertume, on décore le tout de frous-frous souriants aussi faux et vomitifs qu’un abus d’huîtres pas fraîches, et l’on conclue sur le tintement des verres, pardon « flûtes » 100% pur Pyrex en braillant lamentablement « Bonne année ! » qu’on ne souhaite à personne, puisque soi-même on a déjà du mal à s’en convaincre. Qu’il est malsain d’aller creuser dans les réunions de famille !

Tiens au fait, de vérités à vous dire et à vous demander j’en ai deux :
1 – Je suis content d’avoir des fidèles, il y a donc encore des fous sur cette terre.
2 – Même si vous trouvez ça douteux après cette diatribe, pourriez-vous penser à nous donner, à tous un aperçu de qui vous êtes ? NON ! Pas une photo, juste un petit descriptif du pourquoi vous venez… et qui sait, construire un réseau de dingues se haïssant cordialement !

Bonne année ! (dit-il en éclatant de rire)

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