09 octobre 2007

Protestations

On me reproche parfois d’être un rien trop radical et tranché sur mes avis, au point qu’on me fasse le procès d’intention d’être un dictateur en puissance. Certes, j’éprouve quelques difficultés à faire jouer de ma tolérance naturelle envers l’imbécillité récurrente que, nous autres humains, nous mettons sans cesse en branle pour nous entredéchirer, mais tout de même, ce n’est pas parce que j’ai l’air méchant que je le suis hein ? Bon… je vois que la conviction ne perle pas de vos yeux collés à ce texte, un peu comme des jurés face à un criminel terrifiant mais un rien attirant. Je ne suis pas Hannibal Lecter, qu’on se le dise !

Bien entendu, mesdames et messieurs du juré, j’apprécie énormément l’humour noir, le cynisme de certains grands génies de l’Histoire, et même une pointe de passion pour les aspects socio-économiques qui existent en ce monde. Mais je m’élève contre la procédure qui m’est faite, me mettre sur le banc des accusés sous le motif fallacieux de « Agitations anti morale et propagande anarchiste », alors que moi-même, militariste convaincu et défenseur de la bombe atomique je serais prompt à féliciter les hommes en armes… Comment ça je ne suis pas crédible votre honneur ? Bien sûr que je suis sincère ! Bon, évidemment, si l’on doit m’interroger sur la force morale et la détermination première d’un soldat Américain jouant du fusil dans des pays éloignés a des milliers de kilomètres de chez lui, tout de suite là comme ça, à froid, je cherche. Ceci dit, n’allons pas jusqu’à me crucifier parce que je refuse d’avaler des couleuvres de la taille d’un tronc de baobab, soyons un rien réalistes Monsieur le juge … ah je suis supposé me taire là ? Toutes mes excuses…

Ce n’est pas ma faute si, aujourd’hui, on a fait d’une population fière d’elle-même un peuple qui ne se reconnaît plus et qui ne reconnaît plus aucune légitimité à quelque institution que ce soit ! Je peste sans cesse contre la connerie, et me voilà trainé en diffamation et autres chefs d’inculpations infâmants. Je ne suis pas un criminel, encore moins un anarchiste. Bien qu’on soit en train de « fêter » les quarante ans de la mort de Guevara, il serait de bon ton de ne pas m’associer à cet entêté certes séduisant, mais somme toute totalement dévoué à une cause perdue, celle d’un communisme si ardent qu’il en est devenu utopique. Oui je sais, je suis né le même jour que lui, mais à des années d’écart ! Je ne suis pas le Che ! On ne me voit pas sur les maillots, casquettes et pulls des pré-pubères en manque de symboles, et heureusement (je ne suis pas photogénique et puis je suis myope comme une taupe…). Bref, ne me mettez pas derrière les barreaux alors que lui, ils les fumaient !

Reconnaissez, messieurs dames, que je n’ai pas le profil du terroriste : propre sur moi, poli, cultivé (si, si !) et même bon vivant, je n’ai jamais demandé qu’on utilise les explosifs pour résoudre les conflits ou pour militer quelques grandes idées. J’admets bien quelques écarts verbaux en prétendant avec humour que, oui effectivement l’utilisation massive de l’atome saurait rendre paisible quelques parties du globe et ainsi pacifier le monde, mais ce n’était que pures boutades servies à foison pour faire enrager mes interlocuteurs ! Notez au passage que j’estime que l’emploi irraisonné de la bombe est une débilité tant morale que stratégique, et qu’en étant juste pragmatique on ne peut pas voir d’intérêt à se faire sauter mutuellement le caisson à coup de protons et de neutrons.
Quittons le terrain technique : l’Homme est une brute en puissance, une espèce de grenade dégoupillée qui s’amuse à rouler au milieu d’un bac à sable plein de gamins en bas âge. J’y suis pour rien, moi, si le napalm, le phosphore et la mitrailles ont coulés et coulent encore à flot dans ce monde ! Ce n’est pas moi qui ait inventé le principe de Shrapnell ni celui de la mine anti personnel. Qu’on se le dise, je suis innocent !

Tiens, c’est qui l’autre en bure rouge sang ? Ah ? L’avocat général… que dit-il ? Que je suis le symbole d’une société quoi ? Décadente ? Que je représente l’échec de tout un édifice social, et que mes travers sont à eux seuls des marques indélébiles de mon « irrécupérabilité » ? Déjà d’une ce néologisme est pathétique, il parle aussi bien Français que moi l’Alsacien, et d’autre part je ne suis pas plus irrécupérable que lui vu sa fonction de parasite du système pénal. Punaise ! Cancrelat ! Vous faites honte aux idéaux que vos ancêtres ont obtenus par le sang et la sueur. Oui j’ai dit « vos », vu que je suis fils d’immigrés. Ah parce que maintenant ça devient une tare ? On va remettre en place la sélection nazifiée, celle qui parle du « né de parents Allemands » ? Honte sur vous, médiocres et ridicules frontistes. Je suis fier de mes inepties, autant qu’on peut être heureux de ne pas vous voir ailleurs que dans ce prétoire.

Je me sens comme Kafka : on m’accuse d’un crime incompréhensible et j’attends la sentence. Du haut d’un comptoir fait de stuc et de toc, voilà qu’ils s’agitent et tergiversent, comme si ce n’était pas évident que je suis innocent des charges. Et oui, je ne suis pas coupable de prôner l’anarchie, j’insiste même sur l’obligation de voter et d’agir avec discernement. Non je ne suis pas de ceux qui pensent que l’agitation mène à la construction… tiens, ils ne me regardent même pas. Suis-je donc si affreusement coupable pour en arriver à détourner le regard ?
Ils énoncent l’acte d’accusation, souriant avec une dentition carnassière de loups prêts à dévorer l’agneau. Mot à mot ils affutent une exécution qui sera capitale pour moi…

Rhaaa !!! Je me réveille ! Ce n’était qu’un cauchemar ! Ouf !

C’est quoi ces barreaux à ma fenêtre… lucarne ?! Et ho ! C’est quoi cette grille ?!

GARDIEN !

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Quoiqu'il en soit nous sommes tous coupable de quelquechose si petite soit elle...ou monstrueuse personne ne peut se dire avoir les mains totaement blanche