02 avril 2007

Vingt ans après

Ne vous méprenez pas sur ce titre, il ne s’agit pas d’un énième énumération des qualités de l’œuvre de Dumas dont il s’agit mais tout simplement d’un rappel historique que d’aucun taxerait d’amusant mais qui pour moi reste dramatiquement d’actualité. J’admets qu’on puisse rire de tout, mais avec tout le monde… c’est dur (encore merci Maître…). Si l’on rit de la situation politique actuelle c’est bel et bien au détriment de la structure sociale de notre pays, notamment si l’on considère le cri d’alarme de Balavoine face au président Mitterrand où le jeune rebelle prédisait avec justesse une explosion des banlieues. Plus de vingt ans après les avertissements sont devenus des faits, vingt ans après la diatribe de Desproges contre Le Pen (à réécouter sans restriction) est encore aussi fraîche et valide qu’à l’époque.

J’avoue une certaine circonspection quand on me parle d’évolution sociale, comme si le modèle de fonctionnement d’une nation pouvait changer aussi radicalement qu’après un holocauste et ce sans trace de génocide. La seule chose qui soit immuable c’est que plus un système perdure plus il devient complexe et ingérable. Peut-on croire sans le moindre doute que nos dirigeants soient vraiment aux commandes ou bien vivent-ils simplement sur des rouages totalement indémontables ? si tel est la croyance populaire alors qu’on vienne m’expliquer pourquoi nombre des mesures permettant une « cohésion sociale » ne font qu’empirer la situation et le fossé entre ceux qui gagnent bien et ceux qui se débrouillent tant bien que mal. Il y a là un non sens flagrant, et je ne tiens même pas compte de la population parasitaire qui vit sur le dos d’un état déjà vacillant. Au fait, sur cette dernière phrase merci de ne pas aller chercher une quelconque reconnaissance de la droite des extrêmes : c’est une vérité qui ne s’encombre pas d’une nationalité ou d’une couleur de peau.

Pour autant le rire est-il pincé ou juste sincère quand l’un ou l’autre de ces costumes trois pièces annonce avec effet de manche (je paraphrase) : « Nous allons redresser la France, réduire le chômage… » et j’en passe. Pour ma part l’hilarité primaire se teinte très rapidement de courroux tant je suis agacé par la mauvaise foi ambiante. Non, le politicien ne peut que s’attaquer à de tels chantiers qu’au prix faramineux d’une opinion publique hostile ou bien d’une dictature, chose que nous ne pourrons plus jamais (j’espère) tolérer. La faiblesse d’une démocratie c’est qu’elle dépend totalement de l’opinion des cons citoyens et que de fait toute action efficace sera nécessairement au détriment de tous. M’est avis que seule le totalitarisme saurait agir dans le sens des réformes vitales, cependant sans certitude aucune sur les choix d’orientations pris par les oligarques.

Plus prosaïquement il est donc évident que rare sont les choses qui changent et que deux décennies plus tard les cris d’alarme sur l’oubli d’une proportion non négligeable des habitants qu’on est allé jusqu’à appeler pudiquement « La France d’en bas », et de la même manière sur l’alerte de la montée des extrémismes (la flamme tricolore au deuxième tour et la montée des intégrismes de tout poil) n’ont pas été écoutés, ou pire encore ne pouvaient l’être. L’histoire, ou plutôt l’anecdote voudrait qu’un jour Nixon aurait été abordé par une étudiante qui lui aurait posé des questions auxquelles il ne pouvait répondre, ce à quoi elle conclut « C’est la machine qui vous dirige et non l’inverse ». Cela semble avoir marqué lourdement son esprit tant la phrase lui paru réaliste et proche de la vérité.

Le changement de génération n’est pas une solution fiable pour l’évolution des mœurs, quoi qu’en disent les sociologues. L’éducation est un héritage laissé aux enfants qui eux-mêmes devront en léguer une partie à la génération suivante. Dans l’absolu on pourrait prétendre que l’intelligence doit suffire à éviter qu’une idéologie incongrue se perpétue, mais finalement il est bien rare qu’un enfant aille s’opposer politiquement à ses parents, à l’exception faite si ceux-ci sont ouverts d’esprit et cultivés. A mon avis la progression ne peut donc venir que des phénomènes du type « effet papillon », c'est-à-dire schématiquement qu’un petit évènement engendrera un cataclysme dans la société. (L’effet papillon est la théorie prétendant qu’un battement d’aile peut déclencher un cyclone à l’autre bout de la planète).

Espérons que les vingt prochaines années ne seront pas la perpétuation des modèles actuels car cela aurait pour grande conséquence une désaffection encore plus grande pour la vie politique en général, et la vie sociale en particulier. Le culte du nombrilisme semble faire de plus en plus d’adeptes et je ne ris plus vraiment en réécoutant Desproges, en revoyant les images de l’INA avec Balavoine, et je suis même accablé en décortiquant ma littérature qui me confirme que non ça n’est pas en train de progresser, mais plutôt de regresser…

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