31 décembre 2012

Une année meurt pour qu'une autre naisse

Il m'est difficile de dire que les années se succèdent sans vraiment changer quoi que ce soit. Contrairement aux rochers qui, eux, ne subissent que la vague abrasion du temps et des éléments, l'âme humaine, elle, prend sur elle énormément de choses en très peu de temps. Que ce soit la Vie, la Mort, ou bien les joies et les peines du quotidien, nous vieillissons autrement plus mal et plus vite que n'importe quel chêne plus que centenaire. L'éternité n'est qu'une vaste illusion qu'on vend par la Foi, par l'immortalité de l'âme et du nom, mais qui n'a un sens que pour celui qui y croit réellement. Personnellement, l'éternité, c'est avant tout une bonne publicité pour les bâtisseurs de pyramides, ou pour les vendeurs de chez Roc-Eclerc.

Alors quoi? Une nouvelle année vit parce que la précédente meurt? Quelque part, c'est sur les cendres de notre passé que fleurissent nos violettes de l'avenir. On aura beau croire qu'on peut bouturer le futur à l'envi, on ne pourra jamais que faire "mieux" que le passé, mais pas différemment que cela. Les enfants naissent, les gens meurent, et entre les deux ils vivent comme ils le peuvent, avec le vain espoir d'avoir une éternité de béatitude en récompense de leur labeur. Dites, les gens, la sueur, c'est pour aujourd'hui qu'il faut la verser, pour du concret, de l'authentique, de la Vie, et non pour le ridicule et prétentieux désir d'un niveau supérieur de conscience. A quoi bon vouloir le paradis, si ce n'est pas pour le partager dès maintenant? Il y a là un truc qu'il faudra qu'on m'explique...

Et le théologien de m'engueuler, de railler mon scepticisme maladif à coups d'arguments sur l'âme humaine, sur les bienfaits pour l'au-delà, sur notre capacité à avoir une vie meilleure en se préparant un trépas confortable... Fadaises! Baratin! Soupe à bigotes! Notre avenir se doit d'être celui auquel on aspire maintenant, pas celui qui me fera finir dans l'aspirateur à cendres d'un quelconque crématorium. Je me contrefous de préparer ma paillasse à l'éternité, puisque, déjà, j'ai du mal à la préparer au quotidien! Pourquoi préparer le futur quand le présent n'est même pas propre sur lui?

Je sais bien que la nouvelle année est un prétexte pour, en vrac, des bonnes résolutions sitôt énoncées, sitôt oubliées, pour s'échanger des voeux de bonne santé, pour se satisfaire d'une ripaille trop riche trop grasses, et même, suprême hypocrisie, pour se prendre une cuite au nom de l'année qui vient de disparaître. J'exècre les prétextes, je conchie les obligations, et je maudis les crétins qui pensent qu'il est de notre devoir d'enterrer dignement l'année écoulée. Question mise en terre j'ai eu plus que mon saoul, et je ne vois donc pas de raison d'aller chercher le marteau et les clous pour poser le couvercle d'un 2012 bien épuisant. A ce compte là, je préfèrerais me faire fossoyeur non autorisé, en balançant la dite année dans le premier fleuve venu, la boîte d'isorel lestée des pavés de tristesse qu'elle ma livrée en trop grosse quantité.

Et maintenant? Que vais-je faire? (Non! Je ne chanterai pas du Bécaud!). Me gausser des gens qui pensent que l'avenir renaît à minuit pétante? Me gondoler en écoutant les débiles qui vont décompter les secondes nous séparant du changement d'affichage de mon réveil? Bien sûr! Je vais forcément ironiser sur leur compte, sur l'imbécillité de cet acte de Foi, car, souvenons nous en, un calendrier n'est qu'une façon arbitraire de positionner notre existence sur une "éternité" qui nous dépasse. Et puis franchement, si du jour au lendemain, un scientifique nous annonçait sans frémir "le premier jour est celui du big bang, ce qui nous donne un premier jour de l'année un 15 mars...", qu'est-ce qu'on aurait l'air cons avec notre premier janvier, avec notre Noël du 24 décembre... non? Franchement, si c'est pour passer pour des idiots, autant que ce soit voulu. Donc, je et moi-même (schizophrénie assumée) décrétons que le premier jour de l'année est celui qui me conviendra quand je le voudrai. Donc, aussi bien le 15 mars, que le 14 juin, le 17 novembre, ou pourquoi pas le premier Janvier. Qu'importe la date, fêtons la non pour le renouveau et une nouvelle page dans le calendrier, mais simplement parce qu'on aura une bonne raison de fêter quelque chose. Mais fêter quoi alors, me demandera le cynique engoncé dans sa moquerie. Hé bien, triste sire prisonnier de ta mauvaise foi... Qu'importe! On ne fête pas la Vie, alors fêtons la!

Bonne année? Non. Bonne Vie. Bons Amours. Bonne chance. Bon Avenir!

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