28 février 2011

Information bancale

Je me dois d’être honnête : je vilipende constamment tant l’inconséquence que l’incompétence des scribouillards, au titre qu’au mieux ils déforment la vérité, au pire ils passent littéralement à côté de la cible. Ainsi, suivre l’actualité est bien trop souvent un challenge plus qu’une chose aisée pour le tout à chacun, d’autant plus quand la situation se révèle complexe. Ces dernières semaines ont étés le théâtre d’évènements jusqu’à présent improbables, notamment l’effondrement de nombre de gouvernements despotiques au maghreb. Alors, doit-on estimer que le manque de réalisme et de vision des journalistes est pardonnable, puisque même les diplomates se seraient eux-mêmes fourvoyés ? Raisonnons ensemble et interrogeons nous sur l’impact qu’ont eues ces révolutions sur notre façon d’appréhender les médias.

Commençons par un des aspects les plus pénibles : la démission de Michèle Alliot-Marie (MAM pour les pseudos intimes). On lui a reproché, en substance, d’avoir copinée avec les élites de la dictature tunisienne, et d’avoir tenu des propos mal placés, et surtout, au mauvais moment. Qu’elle ait cédée sa place, faute de pouvoir restaurer sa crédibilité, fait partie des évènements assez classiques dans les gouvernements. En revanche, j’affirme qu’elle a joué le rôle de fusible médiatique, assumant ainsi toutes les erreurs de chacun, et surtout notre incapacité générale à faire preuve de discernement. MAM n’est pas, et ne sera jamais l’étendard de l’incompétence Française en matière de politique ; elle n’est qu’un des maillons d’un demi-siècle de politique néo coloniale, d’indulgence infâme envers les despotes, et qui, finalement, au pire moment, a continué cette même politique. Une erreur ? Oui, bien sûr, MAM n’a pas été capable de sentir le changement en Tunisie, mais, mine de rien, qui l’a été ? Cela vous semble normal qu’elle soit la lampiste pour les autres ? Prenons un regard critique : ces mêmes médias qui lui ont décernée la médaille de la « pire pourriture » n’ont pas été plus clairvoyants, pas plus qu’ils ont été capables d’annoncer le vent de révolution là-bas. Etrange comme attitude tout de même : le lundi, on ne parle que vaguement de quelques échauffourées, le mardi on monte un dossier sur la ministre, le mercredi on se félicité de la révolution qui est parvenue à démettre un président visiblement haï. Mais à quand remonte cette situation ? Qui était réellement au courant en France ? Les diplomates, les médias, les politiques, quelques personnes averties… Mais bizarrement, cela n’a jamais fait la une de ces damnés médias. Avant de vouloir faire la leçon aux autres, pensez aussi à être propres ! Le canard enchaîné n’a, à ce que je sache, pas été l’écho permanent du désastre Tunisien… Enfin bon, comme d’habitude hélas !

Il y a un second point qui me met passablement en colère, c’est celui de l’attitude des plus désinvolte de certains diplomates. Ils se sont regroupés pour émettre un document dans le journal « Le monde » pour critiquer la politique diplomatique Française, et ainsi mettre directement en accusation le président de la république. Sur le fond, je peux tout à fait admettre qu’ils soient remontés, car la France pratique à présent une diplomatie réaliste, fondée sur la gestion avant tout économique et politique, plutôt que morale. Moi, ce qui me dérange, c’est la forme et la responsabilité de chacun. Pourquoi avoir laissé ce document sous une forme anonyme ? Je trouve cela indigne de la part de gens qui sont supposés assumer une responsabilité morale, et représenter la France à l’étranger. Auraient-ils craints des sanctions de la part du gouvernement ? Quand on a des opinions, on les assume entièrement, ou on se tait. Mon second écueil sur la forme est la responsabilité d’un diplomate. Quelle est-elle ? Le diplomate n’a pas pour rôle d’avoir une opinion, mais au contraire d’être un porte-parole pour l’opinion de la France, donc celle du gouvernement. Si le système ne leur convient pas, la démission n’a rien d’impossible… Mais j’oubliais que l’honneur n’est pas à mettre en balance avec une carrière. La diplomatie, c’est l’art de connaître le pays étranger, d’avoir des interlocuteurs, se créer des réseaux d’information, et de les restituer aux gouvernants pour qu’ils agissent. Qu’ils reprochent au gouvernement de n’avoir pas tenu compte de leurs alertes, ça n’a rien d’impossible, mais cela impose à tous de les croire sur parole. En revanche, sait-on s’ils ont été eux-mêmes actifs pour s’entretenir avec les opposants aux régimes en place ? Qu’ont-ils faits ou dits à ces opposants ? Quand je parlais d’assumer un rôle de diplomate, je voulais bel et bien dire faire intégralement son travail, tant d’informer le pays étranger où l’on est en poste, que d’être un agent actif du renseignement. Dans ces conditions, ce document n’a, malheureusement, plus aucune valeur, puisqu’il n’est absolument pas assumé par ses rédacteurs. Et l’on vient dire à MAM qu’elle s’est mal comportée ? Ils sont plus odieux qu’elles, car ils ne se montrent absolument pas à la hauteur de leurs responsabilités, tant morale que politique.

Le dernier point qui provoque une crise d’urticaire avec les médias est le sensationnalisme à outrance. Nombre de situations sont décrites avec tellement d’obscurité qu’elles semblent provenir de pays en guerre. Or, pour le moment, l’histoire n’est pas encore écrite, et nous ignorons toujours tous les faits. Montrer des massacres, interviewer quelques témoins pris au hasard, ce n’est pas de l’information, c’est tout juste digne du « nouveau détective ». Cela me met hors de moi, car cela me rappelle les heures sombres de la guerre en Yougoslavie : on désinforme, on déforme les vérités, on crucifie les perdants, on fait des vainqueurs des hérauts. Sont-ils devenus aveugles ? Peut-on glorifier des partis comme celui des frères musulmans ? Ne sont-ils pas l’image de l’islam que nul ne veut voir au pouvoir ? Ils pèsent dans les pays en proie à la révolte, et sont capables de prendre le pouvoir. Comme je l’ai déjà dit, j’espère que la Tunisie, la Libye, l’Egypte sauront se doter d’une véritable démocratie, au lieu de se laisser séduire par l’intégrisme. Le rôle des pays comme la France doit être celui du conseil, de l’assistance, d’apporter des méthodes, des règles, pour que ces nations blessées puissent se reconstruire sans dériver vers un nouvel Iran à la gouvernance atrophiée par la religion. Kadhafi résiste encore un peu à Tripoli. Il s’accroche à un pouvoir qu’il perd un peu plus chaque jour. Nombre de villes sont aujourd’hui hors de contrôle. Et nous parlons, dans les médias, de « villes libérées ». Quelle bêtise leur passe par la tête ?! Une ville libérée, c’est une ville où une autorité, quelque soit celle-ci, gère la situation à travers une « police » de transition. Il n’y a, pour l’heure, pas de gouvernement de substitution, pas plus qu’il n’y a une police qui soit acceptée par la population. Donc non, ces villes ne sont pas libérées, elles sont uniquement « libérées » du contrôle de la capitale. Je crains autant l’anarchie que le despotisme, et nous ne savons pas comment tombera, ou pas, le colonel président.

Les médias relatent des faits en principe, pas des choses modifiées selon notre bon vouloir. La France pratique depuis des décennies le jeu des despotes, car ils ont été les garants d’une immigration contenue, de matières premières peu chères, et de situations politiques stables. La chute des Ben Ali et consoeurs n’apportent pour l’heure qu’une anarchie, et nous risquons bien d’en payer, par contrecoup, un prix plus élevé que celui auquel nous nous attendions. Et là, je ne parle pas que d’une problématique économique avec le pétrole. Quid des gens qui fuient leur pays ? Quid du temps de remise en cause des institutions ? Quid de nos responsabilités vis-à-vis de populations désoeuvrées, faute d’être payées le juste prix de leur labeur ? Quid des prochaines élections ? Les diplomates en place devront composer avec ceux qui prendront le pouvoir. J’attends avec impatience et un certain cynisme le prochain président Tunisien par exemple. Que fera la diplomatie Française, celle qui se prétend moralement irréprochable dans la lettre ouverte du Monde ? Elle fera ce qu’elle devra faire : tergiverser, négocier avec un élu qui pourrait tout aussi bien être un nouveau dictateur… Comme quoi, passer d’un monstre à un autre n’empêchera pas à nos équipes de continuer leur travail… Douce ironie, quand tu me tiens ! Et quelle sera la réaction de l’élu en question ? Va-t-il accueillir la diplomatie Française à bras ouverts, ou va-t-il (comme je le ferais moi) la critiquer ou lui rire au nez en disant juste « Et c’est maintenant que vous considérez que mon pays a besoin de démocratie ? C’est un peu tard ».

A bon entendeur…

23 février 2011

Rien ces prochains jours

Rien ce soir, ni les prochains jours je pense...

Je serai de retour en cours de semaine prochaine.

Stay tuned (comme ils disent!)

Jefaispeuralafoule/Frédéric

22 février 2011

K-PAX

Bien que terriblement occupé par mon activité de bidouilleur informatique, je me dois de vous inviter à regarder un film particulièrement intéressant nommé « K-Pax ». Là où cela devient difficile pour moi, c’est de parler de ce film sans en éventer le scénario, car, dans l’absolu, je suppose que la majorité d’entre vous n’a pas eu le plaisir d’assister à ce beau morceau de cinéma. De fait, je me contenterai d’aborder l’histoire de manière très générale, afin qu’ensuite je puisse attaquer le pourquoi de cette chronique. En effet, je n’ai pas envie d’encenser le film (bien qu’il le mérite vraiment), mais plus de m’intéresser aux réflexions profondes qu’il a provoqué en moi.

Tout d’abord, passons un peu de temps sur le scénario : un homme, semblant errer dans une gare ferroviaire de New York, est arrêté par la police. Sans papier, sans identité, le personnage apparemment un peu « dérangé » prétend être un extraterrestre venant de la planète K-Pax. Non content de cela, celui-ci en apporte un certain nombre de preuves étranges, comme une connaissance astronomique telle que peu de gens dans le monde sont susceptibles de le comprendre, ou encore un métabolisme qui est visiblement insensible aux drogues que les médecins de l’asile lui font ingérer. Est-il réellement ce qu’il prétend être, ou est-ce simplement un des meilleurs mythomane que le monde ait porté ? Tout le fond du problème provient donc d’un doute raisonnable, d’un comportement apparemment décalé mais profondément humain de cet inconnu, et surtout de sa vision sur l’humanité qui nous écorche sans complaisance, voire même un peu de condescendance (vu que nous sommes arriérés par rapport à sa planète).

Maintenant que le jalon de l’histoire est posé, demandons nous un certain nombre de choses essentielles. La toute première est assez simple dans l’absolu, à savoir si nous autres humains, nous serions capables d’accepter qu’un être venant d’ailleurs puisse prendre notre apparence, pour ensuite venir nous voir de l’intérieur, juste comme ça, pour la balade. Nous serions au mieux sceptiques, au pire incrédules, car, finalement, nous n’aurions pas la capacité d’appréhender qu’une intelligence supérieure puisse changer de forme rien que pour nous « saluer ». L’homme est ainsi fait qu’il se croit unique, une œuvre immortelle d’un Dieu quelconque, personnage central de l’existence même de la pensée universelle. Or, comme je l’ai déjà mentionné dans un autre message, rien ne prouve que nous soyons seuls (pas plus que le contraire d’ailleurs). Dans ces conditions, notre incapacité à comprendre au-delà de nos petites connaissances étriquées sera probablement si perturbante que nous n’accepterons pas d’y croire.

Le second aspect révélateur de ce film est, à mon sens, quelques mentions sur notre société humaine. Tout d’abord, quelques explications aussi brèves que lapidaires viennent détruire notre conception de la société. En effet, K-PAX est décrit comme un monde sans loi, sans chef, sans violence, sans dictature ni haine. Selon notre extraterrestre, « la quasi-totalité de l’univers a compris que la violence et le pouvoir n’ont aucun sens », et c’est une vérité universelle. Alors, pourquoi s’entête-t-on à choisir des chefs, à devoir disposer d’une armée, de la police ? Parce que l’homme est à un point si bas de l’échelle de l’évolution qu’elle n’a pas encore compris la vacuité de ces principes. L’autre pendant de cette analyse repose sur l’absence totale de la notion de famille. Notre monde est régi par le concept de « famille », à savoir de gestion de l’éducation des enfants par leurs parents, tout comme la mise en œuvre d’une hiérarchie sociale fondée sur les ancêtres. K-PAX s’est, semblerait-il, affranchi de cette problématique, car tout à chacun se doit de gérer la société, à savoir qu’il n’y a pas distinction entre les descendants des uns et des autres. On peut donc parler d’éducation communautaire, d’évolution des mœurs propre à endiguer tout racisme, toute problématique de « richesse personnelle », au profit d’une richesse collective. L’idée est aussi séduisante que dérangeante, et cela ne fait qu’ajouter à notre image d’attardés profonds.

Le dernier volet de la réflexion porte plus sur l’introspection que nous devrions tous faire. Dans quelle mesure sommes-nous capables de comprendre la différence ? En admettant que l’extraterrestre ne soit qu’un affabulateur, celui-ci se révèlerait donc être un doux rêveur, un chantre du progrès social et moral, mais sans les bouleversements qu’ont tendance à revendiquer les progressistes. Nous sommes plus enclins à démolir le présent pour construire un avenir fantasmé, alors qu’il faut peut-être simplement faire admettre à tous, sans violence ni agressivité, que le progrès passe par chacun de nous. Qu’importe la différence, que cet homme soit un extraterrestre ou non, car son message est autrement plus grand : l’homme ne peut que progresser, car il n’est pas encore suffisamment évolué pour abandonner ses vieux démons. Haine, richesse, violence, xénophobie, nous sommes tous prisonniers de cette enclave morale et matérialiste, à tel point que nous arrivons même à cautionner la violence que ces idées engendrent. Je suis particulièrement séduit par l’idée qu’une société pourrait oublier le pouvoir, que les gens pourraient partager et gérer en commun tant la connaissance que l’éducation. Je rêverais même, pourquoi pas, d’un monde qui saurait enfin prôner l’intérêt commun, au lieu de prôner l’intérêt individuel. Charge à vous de rêver, non ?

21 février 2011

Si c’est blanc, ce n’est pas dangereux

C’est en ayant eu à tenter une réparation sur un sèche-linge que je me suis rendu compte d’une évidence. Ce fut comme une révélation, comme si j’avais honteusement omis de regarder mon quotidien avec soin. Je suis capable d’aller chroniquer une situation à l’étranger, mais je ne suis pas même capable de regarder sous mon nez ! Allez, trêve d’auto flagellation verbale, je vais vous expliquer le fond de ma pensée : ces équipements, ces bidules que je voyais déjà menaçants (voir mes chroniques précédentes) ont su se rendre indispensables ! Quel drame ! Nous voici donc esclaves de ces machins, de ces boites blanches, de ces trucs supposés nous simplifier la vie. C’est à tel point que trouver quelqu’un capable de faire du café sans percolateur relève du miracle (et que celui qui envisage les cafés instantanés s’apprête à goûter de mon ire, car le liquide issu de ces sachets de granules infects n’a jamais été, et ne sera jamais mon nectar favori !)

Hé oui, nous sommes dorénavant tous prisonniers de la beauté émaillée de nos machines savamment conçues pour tomber en panne à périodes régulières. Depuis le lave-linge, jusqu’au four électrique, nous ne pouvons plus nous en affranchir, à tel point que celui qui fait sa lessive à la main ne le fait que parce qu’il a un produit très délicat à préserver, ou que, justement, son lave-linge lui a fait le coup de la panne. Ne vous moquez pas de lui, car nous avons tous connu cette situation aussi ridicule qu’agaçante. Ah, la douce panne de courant qui rappelle à notre bon souvenir que le micro-ondes fonctionne grâce à la fée électricité ! Ah, la joyeuse coupure temporaire de gaz qui s’empresse de vous ôter l’eau chaude ! Ah, la sublime inondation qui provoque la coupure du réseau d’alimentation en eau, et donc l’absence de douche ! C’est donc cela, le confort ? Le confort, c’est un geôlier vicieux qui, sous couvert de confort, vous fera subir les pires supplices quand il disparaîtra pour une raison ou pour une autre.

En fait, si tous les appareils électriques choisissent des tons relativement neutres, ce n’est que pour nous duper. Le blanc, symbole de propreté, de sécurité, sera appliqué sur tous les appareils susceptibles d’être utilisés soit pour nous nourrir, soit pour nous rendre plus propres. Concernant les équipements de divertissement, des couleurs sombres, ternes seront de la partie : un téléviseur, c’est noir ou gris foncé. Une chaîne hifi, c’est nécessairement gris souris ; Qu’importe que les boutons clignotent, jouent les sapins de noël, l’essentiel est de nous faire admettre que le divertissement est dans la machine, et pas la machine en elle-même. Donc, pour le confort essentiel, on ira nécessairement au plus hygiénique, au plus rassurant : blanc, et pas autre chose. Ah, il y a bien des marques qui donnent dans la fantaisie, comme des bouilloires jaunes, des cafetières couleur tabac, mais cela n’est pas la règle… Et maintenant, la règle, c’est aussi d’appliquer des chromes de plastique et des aplats d’inox, parce que cela fait professionnel d’une part, et d’autre part parce que cela semble plus facile à entretenir… Alors remettons les choses à leur place : l’équipement professionnel est en inox (ou chromé) parce que c’est réellement plus simple à entretenir et à désinfecter avec des produits agressifs, mais surtout ne tentez jamais d’appliquer ces dits produits sur votre joli grille-pain couvert de toc d’inox, sous peine de le voir dépolir ou se décomposer. C’est ainsi : nous sommes donc des gogos prompts à avaler toutes les prouesses du marketing pour nous vendre du confort.

Est-ce que je déteste ces bidules ? Pas du tout, j’en apprécie même les vertus. C’est effectivement confortable de pouvoir sécher son linge en une heure au lieu de deux jours de pendaison déprimante dans la salle de bains, c’est réellement un bonheur de réchauffer son plat en trois minutes au lieu de quinze… Mais bordel, qu’est-ce que cela peut me foutre en rogne quand le débile profond qui a tenu lieu d’ingénieur de mes [censuré] a remplacé un bête roulement de quatre sous par une douille en plastoc de deux sous ! Je lui ferais bien subir la « joie » de devoir porter ses propres vêtements à moitié séché, je lui mettrais volontiers l’oreille contre le châssis de sa machine pour qu’il en entende le grognement furieux quand la dite douille se désagrège ! Escrocs ! Feignasses ! Saligauds ! Vous m’avez pourri ma journée à deux titres : au premier, en voyant mes vêtements rester froissés et humides, au second lorsque j’ai dépiauté cette cochonnerie de sèche-linge pour constater qu’il n’y a pas possibilité ni de bricoler, ni de réparer la dite panne. Je suis esclave des machines, et CA M’ENERVE !

18 février 2011

Elle est assise

J’aimais à m’asseoir dans les herbes hautes, surtout au moment du coucher de soleil. Je pouvais voir, depuis ce pré à flanc de colline, le lointain horizon où venait s’assoupir l’astre brillant. L’orange prenait alors la place du bleu, les rares nuages formaient comme un brouillard fin, une toile vaporeuse sur la chaleur encore persistante de l’été. Je sentais la brise sur ma peau, je sentais sur mes doigts le chatouillement des brins de paille ayant séché, et je me souvenais que Ernst me prenait la main, assis ainsi, tous les deux, en silence, à contempler l’apparition des premières étoiles. A présent, c’était Anna qui venait s’asseoir près de moi, puis qui, souvent, s’assoupissait la tête contre mon bras. Alors, j’attendais longtemps, jusqu’à ce que beau-papa vienne nous chercher, jusqu’à ce qu’il l’emporte délicatement pour la coucher dans une chambre mansardée. Que j’aimais ces moments de quiétude, loin de tout, loin des mauvais souvenirs, loin de mes papiers hantés par le souvenir d’un époux disparu depuis plusieurs mois déjà.

Le monde était devenu fou, il avait choisi la voie de la guerre et du sang versé, et j’étais dorénavant veuve de guerre. J’avais tant entendu d’histoires tristes à ce sujet, tant de douleurs exprimées par des larmes et des cris, et pourtant, je n’avais pas saisie l’ampleur de ce sentiment de vide que pouvait laisser la disparition d’un être cher. Comme toutes les autres épouses de soldat, je m’étais rendue à des funérailles, avec parfois une boite vide, faute d’avoir pu rendre un corps présentable à la famille. C’était ainsi : ils creusaient une fosse, on alignait les proches autour du grand trou, des soldats venaient tirer au-dessus du cercueil, puis, après avoir jetées quelques fleurs dans le tombeau, on faisait glisser l’objet dans le bruit saccadé des sanglots. J’ai pleuré les amis partis trop tôt, j’ai honoré leur mémoire en me signant durant la messe, mais pour autant, je n’avais pas vraiment ressentie la souffrance profonde que ces femmes avaient dans l’âme. Puis un jour, comme elles, j’ai reçu une lettre, la dernière des lettres, celle qu’on ne veut jamais recevoir. Laconique, sans chaleur, elle énonçait la disparition, une date parfois très approximative, et un lieu lointain. Mort ? Pas forcément, puisque mon époux, lui, avait été considéré comme perdu au combat, après une défaite de notre armée. Et c’était pire que tout : son sort oscillait donc entre la mort et la détention dans un camp ennemi.

A cet instant précis, je ne sus pas quoi choisir, car entre un époux décédé, et le savoir souffrant mille tortures, mille vengeances de notre ennemi, qu’est-ce qui était préférable ? Je ne pouvais même pas envisager des obsèques, faute de le savoir déclaré définitivement mort au combat. Ainsi fut ma vie, celle d’attendre une certitude, ou bien de se résigner, au bout de nombreuses années, au fait qu’il soit mort sans sépulture décente. On m’a dit que j’avais le droit à l’espoir, mais quel espoir ? Celui qu’il fut en vie ? L’ennemi, tout comme nous, n’éprouvait pas de pitié pour ses prisonniers. Je me refusais à l’idée qu’il fusse un jour retenu loin de nous, affamé, brutalisé, puis un jour peut-être, exécuté avec des milliers d’autres anonymes. Ainsi, l’espoir était donc plus douloureux que le désespoir d’être convaincue qu’il était mort.

Et s’il revient, et que j’ai reprise la route pour la Vie ? Et s’il ne revient pas, et que j’ai attendu en vain son retour ? Que raconter à nos deux enfants ? Que papa est parti pour toujours, ou qu’il n’est absent que pour un court moment ? C’est ça, la vie d’une épouse de militaire, de combattant, celle d’attendre, jour après jour, que les maux deviennent une habitude, que les larmes se changent en sourires, et que les paroles se fassent les moins affreuses possibles. Je ne voulais pas que nos enfants subissent l’atroce vérité, qu’ils soient là, à s’interroger sur cet homme absent des mois durant, et qui ne reviendra peut-être plus jamais. Il est une photo sur une commode, des vêtements dans une armoire, un flacon de parfum dans la salle de bains, mais il est aussi mon époux, mon amour, leur père, celui par qui j’ai connu le bonheur. Alors, ne pas en parler ou mentir, que dire, que faire ?

A celles et ceux qui pensent qu’aimer est difficile, souvenez vous toujours que perdre l’être le plus cher est encore plus difficile encore. Un jour, qui sait, il réapparaîtra dans notre rue. Un jour, peut-être, il frappera à la porte, et me sourira comme il m’a toujours souri. Un jour, je l’espère, il prendra son fils et sa fille dans ses bras, il les embrassera et affirmera, sans se tromper, qu’il ne repartira jamais loin d’eux. Un jour, peut-être, pourra-t-on enfin prendre une photo de nous quatre, ensembles, unis pour toujours sur la gélatine, tous souriants, tous heureux d’avoir retrouvés ce qu’on est supposés appeler la Vie…

17 février 2011

Et si les explorateurs étaient des pourris ?

Bon, il est vrai que derrière la légende, il y a souvent des personnages sombres qui, sous couvert de science et de découverte, recherchaient gloire et fortune aux frais d’un roi ou d’un riche financier. Ainsi, Colomb, dans sa quête de la route ouest pour les Indes, n’a certainement pas agi pour le progrès scientifique, mais très certainement pour que les Espagnols puissent faire du commerce sans les risques inhérents aux caravanes et au transport maritime depuis les Indes Britanniques. Alors, si l’on reprend l’histoire, on doit nécessairement choisir une manière de la présenter, en tout cas d’opérer des coupes dans la vérité. Pour ma part, je me complais à imaginer des personnages bien moins lisses ou propres que ceux de la légende !

Alors imaginons Colomb, durant son voyage vers l’ouest, à destination des Indes… Imaginons ces caravelles, voguant des jours durant, pour effectuer un voyage hors du commun, celui amenant à la découverte d’un nouveau continent pour les Européens. Et imaginons ce quotidien rude, épuisant, mêlant la vie et la mort en un seul endroit étriqué.

« Tu vois quelque chose ? », gueula Colomb à la vigie qui somnolait en haut de son mât. L’homme, épuisé par la privation, la soif, et la chaleur de plomb qui écrasait le navire, ne réagit pas immédiatement, et ce n’est qu’au prix d’immenses efforts qu’il daigna observer l’horizon avec une longue-vue. « Que dalle… », répondit-il ensuite, avec un ton capable de faire s’assoupir un gosse braillard faisant ses dents. Mais qu’est-ce qui avait pris à Colomb d’entreprendre un tel voyage ? Bon, il y avait bien le pognon, la possibilité d’avoir des retombées de l’ouverture d’une nouvelle route commerciale, sans compter la notoriété d’être un précurseur, mais de là à tolérer un équipage fait de bric et de broc, il y avait de quoi désespérer ! Au mieux, le marin moyen était alcoolique, au pire, il ignorait au surplus la moindre notion de manœuvre en mer. Marins, tu parles, juste bons à emplir les tavernes glauques du port, ou de vider des bouteilles de mauvais alcool à fond de cale, mais certainement pas de manipuler avec soin les cordages, les voiles, ou ne serait-ce que de tenir le cap avec la barre.

D’un air agacé, Colomb lissa sa barbe plus que naissante. Il arpentait sans cesse le pont supérieur, cherchant la bonne route pour aller vers une destination inconnue. « Toujours à l’ouest », telle était sa doctrine de conduite de la flottille. Tous naviguaient à vue, afin qu’aucun navire ne se perde, seul, dans cet océan totalement inconnu. Mais voir les autres rafiots, c’était aussi voir la honteuse situation à leur bord. Les vêtements pendaient sur les cordages pour sécher, les plus ivres ronflaient à même le pont, et les plus sobres s’adonnaient à divers jeux d’argent. Comment mener à son terme un voyage, quand tout le monde s’en fout ? Alors, chaque jour, Colomb avait des sursauts de fureur, hurlant ses ordres, agitant les marins hagards et fatigués à ne rien faire. « Pourritures, raclures, si vous ne bougez pas, on va tous crever ! »

En retour, les marins observaient Colomb avec un désespoir grandissant. Son regard d’illuminé, son amaigrissement dû aux privations, ainsi que son entêtement à porter l’uniforme d’apparat malgré la chaleur, tout concourrait à faire passer le chef de l’expédition pour un cinglé fini. « Un coup de soleil, ou alors il s’est foutu la tronche dans une poutre de la cale ! » affirmaient les plus vindicatifs. Hé oui, ce commandant, ce n’était qu’un terrien, un prétentieux en quête de gloire, comptant plus sur le fric que sur la compétence. Il avait les marins qu’il avait daigné payer, c'est-à-dire les plus mauvais, les incompétents, le fond du panier, ceux que personne d’autre ne voulaient embaucher. « Qu’il gueule ce con ! » répondaient les marins en chœur, car, au fond, lorsque le petit chef se mettait à grogner, cela ne les faisait pas pour autant se rapprocher d’une côte quelconque. Ce voyage était condamné d’avance, ils allaient tous crever en mer, à côté d’un demeuré qui aimait à se prendre pour un explorateur…

Puis la terre apparût au loin.

Puis le nouveau monde fut conquis.

Puis Colomb devint une légende, et ses marins restèrent des anonymes.

Moralité : honneur et gloire sont réservés aux pourris !

16 février 2011

Le tribunal

Ces derniers jours ont été particulièrement amers pour les représentants de la justice en France. En effet, ils ont été mis littéralement en accusation pour des lacunes, des incompétences, ce qui, en soi, serait représentatif du délabrement de notre système. Le président lui-même, avec un populisme aussi maladroit que dangereux, a lancé cette polémique qui, pour moi, n’a pas de sens. Le rôle du président n’est pas de vilipender les institutions, mais plutôt de leur donner l’opportunité d’agir avec sérénité, voire même d’en protéger le fonctionnement en s’assurant que les médias ne viennent pas polluer le débat. Or, monsieur Sarkozy, amateur de la messe du 20H00 devant l’éternel, a eu des propos que je trouve malheureux. Toutefois, maintenant que la question du fonctionnement de la justice en France est lancée, nous devons nous poser des questions sur nos souhaits et nos attentes à son encontre.

Le système Français n’est pas récent, et nombre de lois toujours en vigueur sont des héritages de Napoléon 1er. Bien sûr, les réformes successives, ainsi que les tentatives d’ajouts permettent parfois de compenser les éventuelles failles, mais force est de constater qu’au lieu d’améliorer le système, le fonctionnement global est dorénavant pollué par une multitude d’ajustements pas toujours connus, voire de suppressions d’anciennes lois qui, à terme, mènent à des anomalies dans les jugements. Réformer la justice, c’est se poser avant toute chose la question de savoir vers quoi nous tendons : une justice à la Française, ou une justice à l’Américaine ? Le sujet est vaste, car il passe tant par la garde à vue, que par la gestion des condamnés en prison. Réformer, cela sous-entend donc savoir comment nous voulons notre justice : complexe, au risque d’être inefficace, mais capable de s’adapter à chaque jugement, ou simplifiée, avec le travers évident de rendre la justice plus expéditive qu’elle ne l’est actuellement. En d’autres termes : casser pour faire plus dur, ou bien réparer pour faire plus riche ? Les débats à ce sujet font rage, et surtout font stagner la question depuis des décennies.

Nous avons aboli la peine de mort. C’est un fait, c’est pour ainsi dire définitif, car un sujet aussi sensible ne sera probablement pas remis sur le devant de la scène de sitôt. Pourquoi aborder cette question alors ? Parce qu’elle est très représentative du comportement tant des instances dirigeantes, que de l’opinion publique. Je m’explique : Mitterrand avait annoncé cette décision durant sa campagne, en dépit du fait que l’opinion publique semblait en désaccord sur ce changement. Une fois président, l’homme a tenu son engagement, et a donc fait abolir la peine capitale. Trente ans après, la question reste encore dans les esprits, et est sujet à controverse. Très régulièrement, la question de la peine capitale pour les meurtriers d’enfants, pour les multirécidivistes revient à toute vitesse. Il suffit d’un drame médiatisé pour que la foule s’agite et s’interroge. Dans ces conditions, difficile de réformer les lois, car toute modification, si facile soit-elle, sera sujette aux critiques, au refus de la masse, ainsi qu’à l’opposition d’une partie des juristes qui pratiquent au quotidien les lois Françaises. Donc, cela revient à dire que la masse ne doit pas être interrogée, sous peine de faire stagner, encore et toujours, la question de la réforme de notre système de justice.

Allons plus loin. La justice, c’est deux corps distincts mais qui se rejoignent dans la démarche : la magistrature et la police. La première juge les affaires que lui présente la seconde. De là, c’est donc nécessairement un travail en commun qui doit être mené pour aller depuis l’enquête, ensuite la mise en examen d’un prévenu, jusqu’à la mise en détention s’il y a condamnation. On ne peut donc pas dissocier une réforme des lois d’une réforme des rôles, obligations, et prérogatives des organes assurant notre sécurité. Typiquement, la police et la gendarmerie ont été regroupées sous une seule et même autorité ministérielle, chose qui n’était pas le cas auparavant (puisque la gendarmerie est constituée non de fonctionnaires, mais de militaires). De là, peut-on sereinement envisager de revoir les règles sans revoir la position de chacun vis-à-vis d’elles ? A mon sens, c’est un des gros dangers de l’absence de réforme profonde et concertée, à savoir qu’en modifiant trop prudemment les lois, sans communication, nous arrivons à des aberrations, comme un policier procédant à une arrestation en vertu d’une loi qui a été abrogée. Cela semble absurde, mais cela s’est déjà produit, amenant alors à des affaires sans sens ni possibilité de gestion juridique.

Un autre point clé de la justice est, selon moi, de réfléchir sur la manière dont celle-ci est présentée. A aujourd’hui, les médias font le jeu d’une justice soit incompétente, soit corrompue. Certes, les affaires, les travers existent, mais ce n’est pourtant pas la généralité. De la même manière, le rôle de la police doit être rapidement clarifié, car celle-ci reste encore, dans l’inconscient collectif, non comme une source de sécurité, mais plus une source d’ennuis potentiels. La « peur du gendarme » est une réalité, à tel point qu’elle dénote un manque profond de confiance du Français dans ses institutions. Pourquoi ? A force de dénigrer, à force de faire preuve d’un manque concret de respect, nous sommes à présent parvenus à rendre l’image de la fonction de policier plus ingrate que celle d’un voyou ! L’argent roi, la violence par le son et l’image, tout concourt à démolir l’image de la police aux yeux des masses. Et l’effet est pervers : plus l’image est mauvaise, plus le nombre de candidats à la fonction diminue. De fait, pour renouveler les effectifs, le nombre d’agents à diplômer se réduisant, on en vient à réduire la difficulté pour augmenter artificiellement le taux de réussite. En conséquence, on réduit la formation et la compétence des agents de contrôle, ce qui leur donne une mauvaise image de marque… Et ainsi de suite.

L’urgence est concrète sur plusieurs terrains distincts. Il faut absolument mener un débat de fond sur la justice en France, en envisageant sereinement et courageusement une réforme des lois. La seconde partie du chantier sera alors de communiquer sur ces réformes, afin que le public soit sensibilisé à son rôle d’acteur de la vie sociale. Le troisième aspect sera alors d’apporter une amélioration tant dans la taille des effectifs, que de la formation des agents de sécurité publique. Le dernier point, et non des moindres, sera alors de trouver les financements nécessaires à toutes ces opérations. Les lacunes et erreurs commises sont souvent le fait d’un manque concret de formation, d’expérience, tout comme un dimensionnement insuffisant des équipes. Un juge qui doit traiter des dizaines de dossiers par jour, cela marque non pas une compétence, mais une surcharge inacceptable de travail. Il me semble inacceptable de les attaquer sur ce sujet, car il est du ressort de l’état de mettre en œuvre les moyens nécessaires pour que notre justice ne soit plus sclérosée et moins efficace qu’elle ne le devrait. Les délais d’attente s’allongent dans les tribunaux, tout comme le nombre de procédures se multiplie inutilement. La faute à qui ? Aux affaires, tout simplement. Les lois sont si riches qu’elles en viennent à se contredire, ceci offrant alors d’innombrables ressorts pour faire traîner vainement les choses, jusqu’à l’abandon des poursuites, faute de dossier viable.

Je ne crois pas qu’il soit intelligent de la part d’un président d’attaquer ainsi la magistrature. En revanche, je ne trouve pas plus sains que celle-ci se mette ainsi en grève. En effet, celles et ceux dont le sort dépend d’une décision de justice sont souvent mis dans une situation précaire : le prévenu, en détention préventive, peut très bien être acquitté au procès, tout comme le type soupçonné de meurtre peut rester en liberté, et faire d’autres victimes. Je ne suis pas convaincu qu’il s’agisse d’un acte responsable que de jouer ainsi la montre par la grève. J’entends leurs revendications, tout comme je comprends leur colère, mais je ne saurais admettre qu’elle mette une société en péril. De la même manière, je ne saurais cautionner que des fonctions se couvrent mutuellement. Il n’est pas acceptable que des policiers montent un dossier bidon pour couvrir une faute, qu’ils soient naturellement condamnés pour cette fraude évidente, et qu’ensuite leurs collègues se mettent en grève pour contester la décision de justice. La police a besoin de crédibilité, de soutien des politiques, mais certainement d’une attitude corporatiste protégeant les bavures et travers de ses membres. La magistrature, la police, représentent la Loi, celle qui est supposée être notre point d’entrée principal, notre unicité sociale, pas les symboles de la dérive lamentable d’un pays qui n’a pas besoin de ce genre d’affaires.

15 février 2011

Pas le temps!

Tout est dit... A demain, si possible...

14 février 2011

Saint Valentin

Je n’ai pas voulu rédiger un article pour la journée elle-même, parce que j’ai estimé, peut-être à tort, que cette célébration est devenue aussi incongrue que malsaine. En effet, quoi de plus malsain qu’une obligation « morale » de se plier à de fausses traditions, d’autant plus quand celles-ci ne sont que le reflet de notre aie ? Nous perdons aisément de vue le sens profond de la Saint Valentin, parce que tout simplement nous supposons, à tort bien entendu, qu’il faut savoir marquer l’instant. Je le dis sans la moindre hésitation : ridicule ! Je ne vais pas mâcher mes mots, sous prétexte que certains usent de cette fête comme d’une excuse pour sortir, faire un cadeau, ou encore pour jeter un « je t’aime » aussi dissonant que fugace. Cela m’horripile !

L’amour, ce grand mot utilisé à tort et à travers, que l’on couche sans précaution ni respect tant sur des cartes de vœu que dans des poèmes mièvres, cette expression d’un sentiment complexe qu’on résume à trois fois rien… Mais bon sang, pourquoi réduire à des cœurs roses le sentiment le plus noble, le plus fort, le riche dont nous disposons ? Notre nature n’est pas forcément d’aimer, mais plus facilement de haïr. Pourtant, nous trouvons la ressource humaine suffisante pour savoir se donner sans compter, offrir tant son âme que son corps à l’autre, pour finalement envisager de passer sa vie avec l’autre. Alors pourquoi diable massacrer cette force intérieure à coups de clichés comme la Saint Valentin ? C’est assassiner toute la beauté de l’amour, sa grande et indescriptible magie qui, au quotidien, nous donne la motivation nécessaire pour avancer. Ils m’épuisent à coller des vers éculés sur du carton pâte, ils me les brisent en tentant de me faire consommer des saletés en toc pour dire à l’autre « je pense à toi ». Mais je pense à l’autre quand je le veux, et surtout tout le temps ! Oui, ce n’est pas ponctuel, aimer. Aimer, c’est la durée, l’assurance, la conviction fermement ancrée en soi qu’on est entièrement à l’autre !

Je n’éprouve que peu de charité pour ces gens qui, grâce à la Saint Valentin, arrivent à se rattraper aux branches après toute une année d’oublis, de bêtises, et de désintérêt pour l’autre. Tiens, il offre une saloperie à sa moitié, juste histoire de se donner une constance et une bonne conscience temporaire. Fumier ! Tu l’aimes ? Alors dis le lui, montre le lui chaque jour, et pas deux à trois fois par an, histoire de faire « comme les autres ! » Je n’accepte pas cette façon de faire, d’autant plus quand elle cache nos pires travers : irrespect, adultère, mensonge, trahison, ce n’est pas un paquet cadeau le jour dit qui est supposé laver tous nos péchés. C’est quand même un comble de s’entendre dire « Et toi, tu fêtes la Saint Valentin ? » D’une, je n’y suis pas tenu, et deux si j’étais amené à le faire, ce serait uniquement pour le plaisir d’être avec l’autre, pas pour suivre la bêtise générale dont est malheureusement teintée cet évènement. Rien que par l’abondance des symboles, j’en viens à haïr l’esprit même de cette date. Désolant, énervant, agaçant, tous les épithètes possibles me viennent à l’esprit pour copieusement insulter ceux qui véhiculent cette idéologie.

J’ai foi en l’amour, le sentiment, la généreuse sensation de chaleur en soi. Je n’ai jamais vraiment eu fois en l’Homme pour en comprendre toute l’ampleur. Combien de personnes perdent de vue l’importance que revêt le cœur dans la vie ? Nous sommes tous pareils, faibles, lâches, mais cela n’excuse pas pour autant notre attitude pathétique face à nos sentiments. Nous devons plus de respect aux autres que nous en devons à nous-mêmes, ce qui, en soi, serait une garantie de paix sociale et d’équité. Hélas, il faut établir une Saint Valentin pour qu’on n’oublie pas qu’aimer, c’est important ! Alors, si je suis le raisonnement, il est normal que les gens meurent de faim, parce qu’on a pas de jour instauré pour donner à manger à ceux qui en ont besoin. Nous ne sommes pas foutus de cesser la violence, parce qu’on n’a pas de jour pour l’empêcher. Débile, sans fondement, je ne crois pas que c’est en maintenant une telle tradition qu’on obtient le moindre résultat.

Je crois fermement que l’amour est notre seul véritable trésor. Le temps a su effacer les visages, les voix, et même les civilisations des hommes. Pourtant, l’amour, lui, a traversé les âges. On peut parler des plus belles histoires d’amour du passé, parce qu’elles sont aussi marquantes, si ce n’est plus, que les évènements du même temps. César a aimé Cléopâtre. Napoléon a aimé Joséphine. J’ai aimé, et j’aimerai toujours. Je ne me compare pas à ces illustres. Je nous compare tous à eux, car chacun de nous a une histoire d’amour à raconter. Etrangement, c’est notre seul point commun à tous : nous avons tous aimé quelqu’un, nous aimons tous quelqu’un, nous croyons tous en ce sentiment, si douloureux qu’il puisse être. Au lieu de faire la course au dernier objet parce que « Merde, j’ai failli oublier, c’est la Saint Valentin ! », faites la course au « Aujourd’hui, des fleurs, demain, un petit mot doux sur la table de la cuisine, Samedi, je l’emmène faire un resto… et puis, si j’ai assez mis de côté, on se fera un week-end en tête à tête, quelque part à la campagne » ; Vivez, aimez, mais ne cédez plus à la facilité !

En transition

Tout comme une bonne majorité de gens, je n’ai pas vu venir les révoltes et révolutions qui sont parvenues à destituer les deux dictatures qu’étaient la Tunisie et l’Egypte. Dans les deux cas, je me suis posé la question de savoir si la transition pourrait se faire de manière raisonnée, ou au contraire si le pouvoir serait, ou pas, brigué soit par l’armée, soit par des partis fondamentalistes. Là, l’Egypte est parvenue à expulser Moubarak, et c’est l’armée qui s’est mise en place pour gérer l’espoir national de démocratie. Bien entendu, tout le monde espère que cela va tenir sur la durée, mais nombre de questions me semblent essentielles à observer, ne serait-ce que parce qu’un changement immédiat et total de régime est impossible.

Tout d’abord, il est indispensable de se souvenir que ce n’est pas le peuple qui a appelé l’armée à son secours, mais que c’est l’armée elle-même qui a bougé. Les détails exacts me semblent encore flous, je ne me permettrai donc pas de présumer du comment, du moins pour le moment. En revanche, ce qui est certain, c’est que l’armée a agi contre les soutiens de Moubarak durant les émeutes, tout comme elle s’est posée en garante de la sécurité nationale. Cela va à l’encontre des aspirations des frères musulmans qui, eux, ont pris plus ou moins le contrôle de la rue. Aujourd’hui, le Caire est une ville où règne une ambiance étrange, oscillant entre le bonheur de voir le despote partir du pouvoir, et l’inquiétude, car les frères musulmans assurent en ce moment le service d’ordre, la police étant absente des rues. J’ignore concrètement comment cela va se prolonger, car il y a encore des manifestations, et les militaires menacent de procéder à des arrestations si celles-ci ne cessent pas dans les plus brefs délais. La question concrète du « qui contrôle » est donc bien d’actualité, et cela pourrait très vite mal tourner, ne serait-ce que parce que les militaires sont loin d’être des symboles de paix et de démocratie.

Le second aspect inquiétant est que la prise de pouvoir par une armée peut être le révélateur soit d’une volonté réelle de protection de la population, soit être l’expression d’une ambition personnelle d’un chef. En effet, la destitution de Moubarak a été suivie de décisions politiques majeures telles que l’interruption de la constitution, ainsi que le démantèlement des gouvernants. Dans ces conditions, l’armée a les mains libres pour instaurer une dictature. D’un point de vue purement politique, ces actes sont logiques, car la constitution ne garantissait justement pas les libertés fondamentales au peuple. Cependant, s’en départir totalement n’ajoute pas la moindre perspective de liberté pour autant. On ne peut donc pas certifier qu’une telle mise à plat des lois n’engendrera pas l’apparition d’un dictateur, d’autant plus si celui-ci dispose de l’appui de ses subordonnés. A ce jour, l’armée semble plutôt prête à soutenir l’élan démocratique, et j’espère que cela conduira effectivement tant à des élections libres, qu’à une prise de conscience collective que la responsabilité d’une révolution incombe à tout le peuple, et pas à quelques chefs supposés représenter la masse.

Le troisième aspect inquiétant est plus profond. On ne déboulonne qu’un chef, voire une assemblée nationale, mais ce n’est pas pour autant qu’on supprime tous les anciens rouages du pouvoir. A l’instar de la disparition de Vichy, et du retour de la quatrième république, les purges opérées dans les administrations n’ont été que partielles, voire pire encore, avec le maintien en place de collaborateurs actifs avec le pouvoir nazi. Dans ces conditions, difficile de croire que les anciens fonctionnaires privilégiés vont devenir tout à coup actifs dans la démocratie, notamment de par leur influence dans les mécanismes de l’état. Une phrase est très signifiante : « Quand un président part, les fonctionnaires restent ». C’est supposé définir que l’obédience politique des fonctionnaires ne doit pas influencer ni leur attitude, ni leur travail. Or, dans un état dictatorial, un fonctionnaire zélé est forcément actif dans l’activité antidémocratique. Peut-on donc leur faire confiance pour assurer une activité sérieuse, au service des gens, sans trace des anciennes attitudes et procédures qui faisaient de l’Egypte une dictature ? Toute la question se posera là, et tous les pays ayant opérée une transition vers la démocratie furent confrontés à de tels problèmes.

Enfin, le dernier écueil est probablement le plus difficile à outrepasser. Durant les années Moubarak, le pouvoir s’est entêté à interdire les partis d’opposition. De là, ce fut donc l’activité souterraine qui fut privilégiée pour leur permettre de survivre à la répression. Malheureusement, qui dit activité illégale dit souvent radicalisation, et les frères musulmans s’avère être le parti d’opposition le plus en vue. Bien qu’interdit, son action est visible tant dans le social (financement de dispensaires, fourniture gratuite de médicaments, formation religieuse et politique dans les mosquées…), que dans le politique. Les autres partis, par contre, refusant l’action trop extrémistes, sont donc condamnés à devoir faire très rapidement preuve d’agressivité dans leur communication, afin de redevenir visibles sur la scène politique. Mais auront-ils le temps ? On parle d’une échéance de six mois, et cela paraît particulièrement court pour que de petits partis puissent reprendre une place légitime dans l’esprit des gens. La répression a pour principal effet de disloquer les petites structures, tout en s’assurant, en cas de retour à la démocratie, une présence trop forte des partis radicaux. Tout va donc se jouer non pas sur la liberté de choix dans le vote, mais sur la présence de bulletins autres que ceux des frères musulmans. Le plus dangereux sera donc si un parti radical prend le pouvoir par les urnes, car non content d’être extrême dans son fonctionnement, il aura la légitimité d’action grâce aux urnes. Il ne faut surtout pas oublier le passé de l’Europe, avec le fascisme Italien et le nazisme Allemand, tous deux parvenus au pouvoir de manière totalement démocratique.

On se réjouit à raison de la chute des despotes, il ne faut en revanche surtout pas pavoiser, car il suffirait d’un rien pour que la situation empire très rapidement. Le pouvoir attire et corrompt, ce qui en soi pourrait mener l’armée à être qu’une autre forme de dictature en Egypte. A l’autre bout du spectre, la démocratie, une présidentielle anticipée pourrait tout autant mener au despotisme d’état, via l’élection d’un président issu d’un parti radical. Le soutien des partis multiples et trop anonymes serait, à mon sens, une priorité absolue de la communauté internationale. Charge à nous d’offrir une aide tant logistique que politique à tous les partis, de sorte à ce que le débat de fond soit sain, et que le peuple Egyptien ait accès à un vrai choix, et pas à un choix fait par défaut de concurrents crédibles.


EDIT : Merci à celle qui m'a précisé mon erreur... pas le Maroc mais la Tunisie! Va falloir que j'envisage de prendre de grosses vacances moi!

11 février 2011

Si les mots sont souvent tristes

Si les mots sont souvent tristes,
Que les gens ne sont pas altruistes,
C’est qu’ils se demandent pourquoi,
Les choses de la vie sont comme ça…

Qui saura répondre pourquoi ?

Si la chance de la naissance,
Amènent à une vie rance,
C’est qu’on refuse de croire en soi,
Et que la vie c’est comme ça…

Qui pourra changer tout ça ?

Si l’espoir n’est qu’une chimère,
Que les gens restent terre à terre,
C’est qu’ils ont perdu la foi,
Et que leur vie est comme ça…

Qui relèvera l’homme de tout ça ?

Mais les souvenirs reviennent en force,
On se rappelle ceux qui bombaient le torse,
C’est que l’espoir renaît parfois,
Et que la Vie reprend ses droits…

Est-ce que l’homme y croira ?

Je l’espère en tout cas… du moins ça m’arrive parfois.

10 février 2011

Nous ne sommes pas seuls

Par ces quelques mots s’affirment l’opinion qui voudrait que l’univers est si vaste que, potentiellement, il existerait d’autres formes de vies, a fortiori intelligentes. Dans l’absolu, les statistiques pourraient tendre à faire admettre ce principe. En effet, raisonnons ainsi : l’univers est si immense que même si les chances que d’autres formes de vies existent sont infinitésimales, elles n’en demeurent pas nulles, ce qui, en conséquence, aurait tendance à démontrer qu’elles existent. Bon, il est vrai que la démarche est plutôt saugrenue, ou juste très osée, mais à défaut d’avoir prouvé le contraire, ce n’est pas totalement absurde. De grands scientifiques se penchent régulièrement sur la question, à tel point qu’on pourrait presque parler d’une science quant à l’édification de théories sur le développement de la vie extraterrestre. Cependant, encore faut-il faire attention à plusieurs thématiques très différentes, mais qui, en soi, poussent à s’interroger sur l’opportunité de rencontrer ces formes de vie.

Tout d’abord, le plus élémentaire s’avère être la foi. Nous avons tous en tête des images assez précises de la « création », notamment sur le principe d’Adam et Eve qui seraient les deux premiers êtres vivants. Bien sûr, il s’agit là de l’allégorie de la création des hommes, mais dans l’absolu, cela s’avère susceptible de rejeter toute possibilité d’admettre qu’une vie antérieure à la nôtre ait existée. A ce titre, nombre de personnes sont dans le déni face aux dinosaures, ou encore la datation au carbone 14. Le propos n’est pas de dire que la religion est un handicap, puisque nombre de scientifiques de renommée mondiale sont à la fois croyants et pragmatiques dans leurs théories. L’âme et les équations se dissocient fort bien à mon sens, mais la science a été régulièrement un « ennemi » pour les grandes religions, au titre qu’elle a été source de doutes et de contradictions avec les Ecritures. Par conséquent, si l’homme considère qu’il est le seul être intelligent de la création, il aura d’autant plus de mal à tolérer qu’une autre forme de vie puisse être intelligente, si ce n’est même supérieure à lui. Il s’agira donc de savoir pondérer et expliquer à ces personnes que l’existence d’une autre forme d’intelligence n’est pas une agression, mais peut-être une opportunité de progrès majeur.

Ensuite, la seconde problématique est l’intelligence de l’homme elle-même. Déjà, parler d’intelligence me semble surfait, au titre que des dizaines de siècles de progrès social et scientifique n’a pas suffi à enrayer ni les guerres, ni les injustices comme la famine ou la maladie. Au contraire, l’exploitation de l’homme par l’homme a encore de beaux jours devant elle, à tel point que le principe menant à utiliser l’homme comme esclave est totalement d’actualité. A partir de là, se dire intelligent, c’est faire preuve d’une énorme arrogance, notamment si nous pensons pouvoir discuter avec des êtres d’intelligence au moins équivalente. Prenons un exemple concret pour bien saisir la problématique : si des extraterrestres étaient amenés à venir nous faire un petit coucou sur terre, on devrait alors admettre qu’ils ont pratiqué le voyage spatial, soit une chose dont nous sommes actuellement quasi incapables. Le saut de puce fait vers la lune paraîtrait simplement minuscule et sans intérêt pour eux, et quant à notre système politique, difficile de le vendre tant il est fait d’arrangements bancals, d’accords confinant au chantage ou à la menace atomique, et impossible de légitimer notre modèle économique tant il est injuste et barbare avec les moins favorisés. Ces êtres, voyageurs de l’espace, seraient donc plus avancés technologiquement, plus armés pour comprendre les mystères du monde, et nous serions au mieux traités avec condescendance, ou au pire anéantis pour ne pas représenter une menace dans le futur.

Le pire des freins, à mon sens, est la xénophobie. Nous avons peur de la différence, nous craignons les changements radicaux, et notre paranoïa permanente nous mèneraient immanquablement à nous méfier des autres. Cette attitude suspicieuse nous suffit à justifier la guerre, le racisme, ou encore des politiques sectaires envers nos voisins, alors difficile de croire que nous accepterions sans renâcler que des êtres supérieurs à nous puissent nous expliquer comment progresser. D’ailleurs, que demanderions nous en premier, si ce n’est des sciences, dont celles utiles au progrès des armes ? Notre soif de connaissance s’accompagne majoritairement d’une soif de pouvoir, à tel point que les deux se confondent souvent dans un intérêt tout particulier pour la destruction en masse. D’une crainte de l’autre, jusqu’à une guerre déclarée par prévention, il n’y a guère qu’un pas assez terrifiant, à tel point que je suis d’avis qu’il faudrait trouver les mots pour expliquer à ces extraterrestres que nous sommes encore trop peu évolués pour pouvoir assimiler la différence sans la craindre. Notre peur instinctive pourrait donc nous mener à notre perte.

Et que se passera-t-il si, un jour, nous voyageons dans l’espace, et que nous trouvons des civilisations « inférieures » ? Nous serons soit des Cortes, colonisateurs capables de massacrer des populations entières, pour obtenir des ressources rares, ou des évangélistes tentant de faire adopter notre mode de vie et nos croyances, quitte à user de la violence pour y parvenir. L’humanité n’est pas un exemple d’intégration, alors aller l’appliquer ailleurs reviendra sûrement à mener à sa perte des civilisations qui se seraient bien passées de nous. Et puis, reste à voir si l’hypothèse du peuple non belliqueux s’applique : que ferons-nous si les êtres qui viennent chez nous sont comme des sauterelles dévastant un territoire avant de le quitter pour un autre ? Nous serions donc potentiellement condamnés à disparaître, et les fantasmes de Hollywood au sujet d’un héroïsme capable de nous sauver ne valent rien face aux réalités de la science. Faisons une analogie : si nous revenions dans le passé, est-ce que les chevaliers en armures seraient capables de résister à une attaque de blindés ? Non. Et là, ce serait nous, les chevaliers… Donc, probablement morts avant même d’avoir approchés l’ennemi.

Je ne sais pas s’il est conseillé que nous rencontrions la différence, si tant est qu’elle existe. Je ne sais pas non plus s’il est judicieux d’espérer que cette différence soit source de progrès, tant les chances qu’un peuple supérieur, et conscient de cela, nous traite avec mépris ou indifférence. Certains fantasment sur une présence extraterrestre parmi nous. Cette théorie du « nous sommes déjà envahis » me laisse simplement perplexe, parce que je ne vois pas l’intérêt technique d’observer les hommes de la sorte. Nous sommes déjà bien assez fous pour ne pas mériter la moindre observation, et qui plus est, nos sciences sont si balbutiantes que cela tiendrait plus à de l’archéologie qu’à autre chose. L’avenir nous dira si, oui ou non, nous serons confrontés à une telle situation. Je ne la crains pas, pas plus que je ne l’espère. Nous verrons alors quel parti prendront les humains, même si je sais que, par défaut, de deux solutions l’homme préfère choisir la pire…

09 février 2011

Juste un peu hostile

Les objets qui nous entourent sont tous adaptés à nos désirs et nos besoins. Ainsi, nous avons créé la machine à laver, parce qu’il faut bien faire la corvée de lessive, et parce que nous sommes devenus particulièrement fainéants. En l’espèce, l’immense majorité de ces bidules, machins, choses se vouent corps et âme à nous servir, ceci sans jamais se plaindre. Les rares fois où elles réagissent, c’est en tombant en panne, ceci en signe de fatigue prononcée. Sorti de cet aléa toujours pénible, nos objets sont juste efficaces et pratiques. Pourtant, force est de constater que chacun d’eux possède un démon, une face cachée capable au mieux de nous pourrir une soirée, au pire de nous mettre en danger. Regardez autour de vous, et posez vous des questions sur ces trucs en plastique et métal qui, en apparence placides et paisibles, sont vos ennemis les plus vicieux… Car ils vous attendent au tournant.

La cuisine regorge d’équipements capables de transformer une existence à tout jamais. Il y a trois catégories d’objets distincts : ceux qui coupent, ceux qui écrasent, et ceux qui chauffent. La première semble tout à fait évidente, comme le couteau, le mixer, ou encore un mélange des deux, le couteau électrique ! Ca, cela semble évident qu’en cas de mauvaise manipulation, vous pouvez y laisser vos doigts, votre main, ou encore quelques morceaux de votre anatomie. Pour le coup, c’est l’homme qui se révèle maladroit au possible, et que le mixer, ou la trancheuse à pain ne fait que sont travail. Définitivement, nous pouvons donc affirmer que les objets en apparence les plus dangereux sont ceux qui sont les moins retors. En revanche, dans la catégorie « j’écrase joyeusement les doigts de pied qui ne sont pas protégés », il y a la cocotte en fonte de grand-maman, la pile de vaisselle posée sur le bord de l’évier pour sécher, ou encore le poivrier à la con tout en métal qui date du dernier noël. Ceux là, méfiez vous d’eux : ils prétendent servir comme contenants, ou encore comme décoration, mais ils sont susceptibles de vous déglinguer un doigt de pied ou un bras en quelques instants. Et les derniers sont des fourbes. Les trucs qui chauffent savent comment vous faire souffrir. Le four traditionnel, on s’en méfie, donc on ne l’approche qu’avec précaution. Mais le plat de lasagne, tout juste tiré de sa gueule béante et brûlante, qui n’a pas eu le moment de douleur atroce en le touchant par inadvertance ? C’est sadique, cruel, d’autant plus quand on a la dalle. Et que dire du micro-onde ? C’est un équipement sorti de l’esprit d’un malade mental profondément atteint ! La tasse, là, l’autre pour le café, elle sort toujours froide, mais ce qu’il y a dedans… bouillant, fumant, un désastre, et potentiellement un séjour aux urgences pour votre bouche et votre langue. Sans compter que les plats qu’on réchauffe cumulent : plat chaud, surface de la nourriture encore froide, et centre de l’amalgame de nourriture en ébullition. Nous en avons tous fait l’amère expérience je crois, donc inutile de préciser. Ah si, il y a la cafetière, la saloperie qui se met à transformer l’eau en vapeur, et qui donc vous ébouillante, mais sans pour autant faire couler la moindre goûte de nectar noir dans le verseur !

Le salon n’est pas mal non plus : le tableau fixé dans une cloison de placoplâtre qui vous tombera sur la tronche en pleine nuit, la télévision qui implose au moment le plus important d’une série inédite, ou encore le décodeur qui, joyeux drille, se fait un malin plaisir de corrompre votre carte d’abonné, vous condamnant ainsi à la télévision hertzienne et aux programmes de TF1. Si ça, ce n’est pas de la cruauté ! Mais le panel d’objets cruels n’est pas fini ! La table basse dont on a pris soin de choisir les pieds de forme carrée (juste pour y laisser ses petits doigts tous nus quand on s’y cogne), le canapé dont les ressorts ressortent au pire moment pour vous labourer le dos ou les fesses, et la chaise de salon, la robuste (en apparence) chaise de bois qui se disloque au moment où vous vous installez dessus… Et après, on va me dire que le salon est un havre de paix ! Ben voyons, j’ai connu des champs de mines qui sont plus paisibles ! Le tapis est pas mal dans son genre aussi il faut dire. Se recourbant au pire moment, immanquablement provocateur de chutes, il réussit à peupler les urgences d’un hôpital plus vite que n’importe quelle gastroentérite saisonnière.

Enfin, notons que toutes les pièces sont ainsi : la salle de bains avec la douche soit bouillante, soit glacée, le savon qui vous fait glisser sur le carrelage humide, le rasoir scalpe visage/jambes (selon l’utilisateur), le sèche cheveu qui transforme la chevelure en brasier d’été en Corse, ou encore le miroir assassin qui vous rappelle votre tronche de déterré au lever… Il y aurait de quoi faire un inventaire pour chacune des pièces de la maison. Je vous le soin d’y jeter un œil, et de prendre vos précautions. Tout est une menace, tout est dang… aïe, j’aurais dû faire gaffe, ce pourri de fauteuil vient de s’affaisser, et donc de me mettre bien trop bas pour travailler. Enflure de chaise !

08 février 2011

Les aventuriers

Par essence, les aventuriers sont des personnes fortes, que ce soit physiquement ou moralement. On leur prête des qualités fortes comme la franchise, l’honnêteté ou le courage, et pardessus le marché, ils vivent des aventures extraordinaires. Typiquement, Indiana Jones est l’archétype de l’aventurier qui, bien qu’il soit en fin de compte un vulgaire pilleur de tombes, se révèle pétri de bonnes intentions. Mais franchement, je trouve particulièrement agaçant ces gens trop lisses, trop propres sur eux, et qui pardessus le marché s’offrent le luxe de vous faire la leçon. Ah ça, pour vous fourguer du bon sentiment par boites de douze, ça sait y faire, mais pour être simplement veule, cupide, humain quoi, il n’y a plus personne !

Je ne connais pas d’aventurier au sens cinématographique du terme. Tous, nous avons de petits travers qui vont de l’anodin entêtement, jusqu’à l’insupportable tendance à mentir sans arrêt, ce qui en soi met à mal toute velléité d’être un aventurier. Pire encore, l’homme ordinaire n’ira certainement pas risquer sa couenne pour une « aventure » sans certitude, ni pour une cause aussi douteuse qu’improbable. Il y a bien quelques illuminés qui arpentent le monde en quête d’extraterrestres, des cinglés qui confondent fouilles sauvages et archéologie, ou encore deux ou trois tarés qui se supposent aventureux les fesses bien confortablement posées sur un deux roues hors de prix. Et puis, la plupart ne sont pas des aventuriers, tout au plus des gens en quête d’un accomplissement très personnel, ou éventuellement financier.

Au-delà de ça, l’aventure est une chose difficile à définir. C’est quoi, partir à l’aventure ? Laisser sa carte bleue sur la table, prendre un sac à dos et déambuler sans but sur les routes du monde ? Peu sont réellement enclin à comprendre ce qu’est la spiritualité, si ce n’est pour ensuite toucher un subside issu de la vente des photos et autres vidéos du trajet. Aussi méchant que cela puisse paraître, ceux qui sont réellement « aventuriers » sont finalement des anonymes, des gens qui ne se targuent pas de leurs actes. Ils agissent, et c’est déjà pas mal. Le marin qui affronte la mer chaque jour, le pompier qui risque sa peau dans les brasiers, ou encore le pilote de ligne qui sauve son avion en perdition, ça, ce sont des aventuriers au sens noble du terme. Là encore, j’aimerais en croiser un, histoire de lui serrer la main pour le remercier d’avoir fait montre de courage.

L’aventure, c’est la vie, en tout cas j’en suis convaincu. Il faut avoir vécu quelque chose pour pouvoir le raconter à titre personnel, il faut avoir traversé des épreuves pour en avoir tiré des leçons utiles. Les philosophes ne se sont pas privés pour nous expliquer que le chemin devant nous reste toujours obscur, et que l’expérience est une lanterne qui ne fait qu’éclairer le chemin parcouru. En ce sens, nous sommes trop peu nombreux à accepter que nous ne sommes que des mal voyants cherchant la meilleure route à prendre dans une plaine saisie par la brume. Malheureusement, l’erreur étant humaine, nous choisissons souvent la mauvaise route, et ce en toute bonne foi. Quelques soient ces choix, j’estime qu’il est plus important d’avancer que de rester là, à regarder les caravanes passer sans nous. C’est là que sont les vrais aventuriers, ceux qui avancent, ceux qui tracent un chemin qui leur est propre, pas ceux qui se contentent de regarder et de critiquer les autres. Nous en connaissons tous, ces conseillers jamais payeurs, ces « j’ai tout vu » qui, au fond, ne font que fantasmer sur le vécu des autres. Dommage qu’ils ne comprennent pas qu’en restant là, attentistes inutiles, ils ne font que légitimer les doutes fondés sur leurs expériences propres.

J’ai envie de dire que celui vit a choisi le bon chemin. Les errements intermédiaires ne sont là que pour écrire l’Histoire, avec au milieu nos histoires, ces minuscules digressions dans le temps, ces étranges lignes qui se mêlent, se nouent et se dénouent, au gré du hasard. Je ne suis pas plus aventurier qu’un autre, je ne crois pas avoir choisi des routes qui me mènent à Katmandou ou à La Paz, j’avance, et c’est déjà pas si mal, finalement. « On verra » est bien plus le propos d’un véritable aventurier, que le « J’ai déjà vu »… Alors, nous verrons !

07 février 2011

Elle râle, elle couine...

Mais c'est une amie, et ses textes sont du vécu. Vous me trouviez féroce? Allez donc la lire... Sacrée mère Nawel!

Le blog de la mère Nawel

Le défi religieux

Les différentes crises rencontrées dans le Maghreb semblent vouloir mener nombre de ces nations à des systèmes plus démocratiques, ou tout du moins plus efficaces. En effet, les dictatures en place, cédant à la pression de la rue, doivent à présent se déterminer soit à réprimer dans le sang, ou au contraire à intégrer une tolérance envers les partis d’opposition. Ainsi, la Tunisie a réussi à déboulonner Ben Ali, et l’Egypte semble vouloir aller jusqu’à déposer Moubarak. Malgré les errements et les doutes émis par les autres nations du monde, force est de constater que sont nombreux ceux qui espèrent un véritable progrès politique et social dans ces différents pays. Cependant, il y a une question fondamentale à poser : déposer un dictateur est une bonne chose, mais dans quel but ? Est-ce pour mettre au pouvoir un régime plus dur encore ?

L’observation générale tend à faire penser que les populations veulent avant toute chose un peu de liberté d’expression. Après plusieurs décennies de censure et d’oppression policière, il est certain que la voie de la libéralisation des médias est vitale. En revanche, il ne faut pas perdre de vue que les partis les plus modérés sont malheureusement ceux qui sont généralement les moins entendus, et surtout les moins financés. En effet, le radicalisme politique amène plus aisément des fonds, que les groupes qui désirent la transition. Les exemples, dans la région notamment, nous rappellent facilement à l’ordre. L’Iran, par exemple, est l’archétype de ce que pourraient devenir les pays actuellement en révolte, si les extrémistes religieux arrivaient à récupérer le pouvoir durant la crise. Ceux qui prennent le pouvoir sont nécessairement les plus ambitieux, mais pas forcément les plus compétents. Toute la problématique va donc provenir non de la chute des dictatures, mais de la répartition des pouvoirs. Tant localement qu’à l’échelle nationale, si le fondamentalisme religieux parvient à obtenir suffisamment de poids, ce seraient rapidement la fin du multipartisme.

Qu’on ne se leurre surtout pas. Les partis religieux sont tous financés par les gouvernements s’appuyant, eux aussi, sur la foi comme doctrine politique. Arabie Saoudite, Koweït, ces états n’hésitent pas à déverser les milliards des pétrodollars pour s’assurer la connivence des factions locales. De ce fait, au lieu d’amener à la paix, ce serait alors une prise de pouvoir, par les armes, avec l’accord tacite de certaines autorités religieuses, et dans l’oppression des contradictions. L’Egypte subit actuellement un véritable noyautage moral et politique de la part des « frères musulmans » : financement de dispensaires pour créer une gratuité des soins, embrigadement des jeunesses cultivées, prises de position ostensibles pour « assurer la sécurité » durant les émeutes, ainsi qu’un noyautage moral des écoles. De ce fait, et ce malgré un score plutôt moyen d’opinions favorables, ce parti politique pourrait bel et bien changer la donne. Il ne faut surtout pas se leurrer : ceux qui, aujourd’hui se posent en guides rebelles sont nécessairement ceux dont les ambitions sont les plus fortes. Pire encore : en étant financés par l’étranger, ces chefs en puissance seraient, en cas de victoire, totalement tributaires de ces nations, ce qui, en soi, représenterait une véritable menace pour l’autorité politique du pays. Au surplus, laisser de nouveaux états dont la politique est dictée par la religion ne peut qu’amener à des crises majeures. Réfléchissons quelques instants : en admettant que l’Egypte devienne une nouvelle république islamique, force est de constater qu’Israël serait alors en fâcheuse posture. Jusqu’à présent, Moubarak représentait un interlocuteur crédible et acceptable avec l’état Hébreu. Sans lui, ce serait alors une opportunité pour une nouvelle ligue arabe, et une nouvelle attaque en règle sur les territoires occupés. Et là, malgré la présence Américaine aux alentours, l’avenir d’Israël serait très précaire.

Je ne crois pas qu’il soit aisé de se mêler de la politique locale. La France, avec son héritage terrible de colon, et surtout de « grand frère » pour les dictatures du Maghreb, ne peut guère escompter avoir le droit d’exprimer son opinion. Il sera indispensable que la diplomatie internationale soit là pour non seulement suivre et assister les mouvements de libération, mais également pour trouver des méthodes pour bâillonner au plus vite les plus radicaux. Laisser le pouvoir à ces partis, c’est offrir de nouveaux soutiens à l’Iran, à la guerre en Palestine, mais en plus risquer une nouvelle crise majeure à propos du canal de Suez. Un pays isolé, acculé, peut tout à fait envisager de saboter cette voie navigable, et ainsi poser d’énormes problèmes tant stratégiques qu’économiques. Reste à voir si ces peuples vont se tourner vers un islam fait constitution, ou vers un modèle intermédiaire où la religion reste une forme de conseil, mais pas la base des lois. L’Egypte n’est pas un pays rétrograde, pas plus qu’il n’est comparable avec l’Iran. Cependant, quelques mois peuvent suffire à transformer le visage d’un état, d’autant plus si celui-ci instaure des lois drastiques, avec des sanctions extrêmes. Toutefois, étant donné les mauvaises expériences vécues par les nations arabes, la plupart n’offrent plus un portrait aussi radicalisé qu’à l’époque de la gloire d’Al Qaeda. Espérons que cette pondération, fondée sur l’idée que l’argent peut acheter la conscience religieuse et politique, saura bloquer les groupes les plus enhardis par l’effondrement des despotes.

06 février 2011

Quand la technologie est fantastique

Merci à sebsauvage.net d'avoir mis à disposition cette vidéo. Elle est simplement impressionnante, et offre quelque chose d'inédit: cliquez du bouton gauche sur la vidéo, maintenez le bouton... et bougez votre souris. De la magie technologique, qui devrait, à mon sens, être plus souvent utilisée pour faire découvrir la beauté de notre monde.

04 février 2011

Rien ce soir

Pas le temps...

03 février 2011

Conditionnel

On se croit courageux. On essaye de s’en convaincre, à tel point que cela en devient presque une thérapie. A chaque fois que les gens discutent, l’usage du conditionnel est courant « Moi, j’aurais… », et j’en passe. Le conditionnel, c’est la meilleure manière pour la langue de nous signifier notre outrecuidance, à tel point que s’en servir a tendance à me déranger. N’ayons pas peur des mots : prétendre pouvoir se mettre à la place d’un autre, c’est majoritairement un mensonge, ou juste de la vanité. Nul n’est, à mon sens, en position de pouvoir présumer de ses actes, d’autant plus dans un contexte très défini.

J’ai déjà entendu des bêtises telles que « j’aurais résisté contre l’occupant ». Voilà qui est plus que prétentieux, non ? Reprenons un peu le contexte. Première chose, nous jugeons le passé à la lumière de notre connaissance, c'est-à-dire que, par exemple, nous pouvons affirmer que le nazisme a été un échec atroce. Mais à l’époque, qui aurait pu décréter, sans avoir peu de se tromper, que les nazis finiraient par perdre la guerre ? Etre résistant, ce fut aller au-delà de la seule notion de courage. Il fallait avoir des convictions aussi fermes que définitives, avoir la détermination et le sens du sacrifice suprême. Le culot, la gouaille, toutes ces notions sont utiles, mais insuffisantes pour pouvoir se permettre de dire « j’aurais été un résistant ». Rien ne prouve que ce même orgueilleux n’aurait pas été un collabo de la pire espèce, ou, plus grave encore, un volontaire pour agir de manière barbare. L’engagement personnel se juge en fonction d’une situation, pas à partir d’une autre. Je ne saurais affirmer avec certitude ce que j’aurais fait, et c’est en cela que je me refuse à juger les gens d’une époque donnée.

Vous avez peut-être déjà entendu ces coqs qui revendiquent leur force physique pour affirmer sans frémir qu’ils auraient agi lors d’une agression. Pourtant, les statistiques démontrent plutôt le contraire, et cela, malheureusement, me semble normal. Qui n’a pas peur de prendre une balle perdue, un coup de couteau dans le dos, ou d’être pris à parti par une dizaine de voyous ? Se vanter d’agir, c’est alors se mettre dans des situations dangereuses, voire mortelles. Bien sûr, certains vont au bout de leurs actes, mais bizarrement, ce sont des gens qui ne font pas étalage de ce courage, estimant que celui-ci est finalement un acte civique et normal. Je crois, avec un sincère respect, que ceux qui agissent sont généralement des gens qui ont simplement un sens aigu de la justice et de l’équité. Eux, toute notion de revendication ou de glorification est mise à l’index, car, au fond, défendre le voisin, protéger une jeune femme agressée, c’est avant tout un acte naturel, du moins qui devrait l’être pour tout le monde.

Parmi les phrases du conditionnel, une m’agace tout particulièrement. Le « si j’avais su », est une excuse lamentable pour tenter de s’affranchir de sa responsabilité personnelle. En effet, rien n’est plus lâche qu’un « si j’avais su ». Que croit-on affirmer de la sorte ? Qu’on aurait tenté d’éviter un désastre, qu’on aurait tout fait pour retenir l’ami qui s’est planté en voiture parce que trop ivre pour tenir le volant ? Assumer que le destin nous impose des choix aux conséquences imprévues, c’est autrement plus normal et logique que d’aller affirmer « si j’avais su ». Oui, on a envie de revenir dans le passé, de réécrire l’histoire, d’effacer les accidents, les errements, mais cela, nous ne le pouvons pas. Alors, se lamenter ainsi n’a pour seul effet que d’assombrir encore un peu plus la situation. On se doit d’assumer, d’aller de l’avant, car le conditionnel se révèle ici n’être que de l’impossibilité. Le temps s’écoule, inexorable, et nous devons l’accepter.

« Moi je, moi je… », toi rien du tout ! Tout comme moi, comme tout le monde, nos convictions ne survivent que si nous sommes mis en situation de devoir les éprouver. Nombre de personnes revendiquent des appartenances politiques ridicules, d’autant plus quand il s’agit de doctrines mal comprises et mal connues. Je hurle de colère quand on me parle de « néo nazi ». Non : ces idiots ne sont pas plus nazis que je le suis, ils ne sont que le reflet d’une bêtise profonde, d’un nombrilisme acharné, prompt à affirmer « si j’avais le pouvoir, je ferais… ». Comme tous les prétentieux, force est de pouvoir affirmer que le coq stupide ne ferait rien d’une part, et ne serait (comme il l’est déjà d’ailleurs) qu’un outil malléable pour des personnes plus informées que lui. La volonté, la doctrine, ce sont des choses qui ne supportent ni l’à peu près, ni le conditionnel. Dans ces conditions, prêtez bien attention aux propos tenus par ceux qui se pensent revendicatifs, et méditez sur le fait qu’ils ne sont que des braillards qui jouissent de la liberté d’expression. Combien seraient encore prompts à râler en cas de réduction de ces libertés ? Peu, voire aucun. Nous tolérons bien souvent des restrictions de nos libertés, à tel point que nombre de lois passent sans même que la foule s’en préoccupe. Malheureusement, la foule préfère les promesses aux actes, car quand les actes arrivent, on reprochera à l’élu d’agir (justement !).

Le ridicule ne tue pas, et bien heureusement. De toute façon, je me cantonnerai à espérer être capable d’assumer mes opinions, et ce jusqu’au bout. Je l’espère, je ne prétends pas en être capable. Peut-être vais-je virer lâche comme la majorité silencieuse, ou au contraire virer extrémiste, comme certains qui confondent revendication et action violente. Faites que cette erreur ne soit jamais mienne !

02 février 2011

Le téléphone

J’ai, par le passé, évoqué le fameux téléphone rouge qui servait aux communications entre le Kremlin et la Maison Blanche, ceci à la grande époque révolue de la guerre froide. Objet symbolique s’il en est, le téléphone a eu son heure de gloire au cinéma, et justement dans le ton rouge sang du plus bel effet. Cependant, nous autres les civils, nous nous sommes équipés de ces machines à cadrans dans des teintes plus neutres comme le gris ou le noir, peut-être parce que nous ne sommes pas des personnages importants, et parce que le rouge n’est pas quelque chose d’aisé à intégrer dans un intérieur ordinaire. D’ailleurs, je me demande si qui que ce soit ait jamais eu un téléphone rouge chez lui. Enfin bref, que ce soit un chef d’état, un fonctionnaire de police, ou encore l’un d’entres nous, le téléphone a révolutionné notre façon d’appréhender la communication.

Notons d’abord que son invention n’est pas récente. Entre les premiers essais et aujourd’hui, plus d’un siècle nous contemple. Nous avons su passer du filaire à manivelle, à l’appareil sans fil et à clavier, ce qui en soit représente une véritable avancée technologique. Bien entendu, il ne viendrait à l’esprit de personne de chercher la dite manivelle de charge, ou d’espérer avoir une opératrice pour demander « Clignancourt 13 35 ». Mais n’est-ce pas là la fin d’une forme de charme désuet ? Je trouve presque dommage la disparition de l’opératrice, au titre qu’elle humanisait un peu l’inévitable attente de son correspondant. Et puis, mine de rien, cela donnait du boulot à énormément de gens. Bon, oui, il est vrai que retenir un numéro et le taper sans contrainte sur n’importe quel terminal est plus pratique, mais tout de même, écouter la voix suave d’une jeunette… Je m’égare. Bref, nous avons modernisés notre manière d’envisager la téléphonie, et celle-ci nous rend énormément plus de services qu’avant : fax, minitel, informatique à travers Internet, le signal d’appel, les répondeurs, toutes ces innovations sont venues changer notre abord à la communication vocale !

Cependant, à y regarder de plus près, la téléphonie a aussi changé notre abord à la société. En effet, avoir un numéro, c’est être joignable. De fait, plus d’excuse potable pour dire « je n’étais pas au courant », puisqu’un coup de fil est supposé faire foi pour une prise de rendez-vous. De là, ce fut donc la mort du petit mensonge confortable, le refus de décrocher entraînant un harcèlement sonore, à tel point qu’on finit par soulever le combiné pour avoir la paix. Ce qui est encore plus redoutable, c’est que les appareils modernes présentent le numéro de l’appelant ! C’est pervers : si vous savez qui c’est, vous pouvez envisager de jouer la sourde oreille, or, la cacophonie de votre téléphone sera si pénible que vous cèderez. Et que dire de ceux qui camouflent le numéro ? C’est encore plus vicieux : vous ne savez pas qui appelle (comme dans le temps), et au surplus vous vous faites des idées. « La police ? Les pompiers ? Quelque chose d’important ? ». Hé non, c’est votre insupportable petit cousin qui, pour s’assurer votre décroché prompt de combiné, se fera un malin plaisir de camoufler son identité. Haïssable !

Le bon vieux téléphone a d’autres tares congénitales absolument intolérables. Que faire avec un interlocuteur bavard qui ne vous lâche pas une heure durant ? Comment couper court à une conversation pénible avec un parent ? Comment s’affranchir du colporteur qui, sous couvert de vous offrir un set de couteaux, tente de vous caser une cuisine hors de prix ? Certains ont trouvé une parade que trop temporaire : le téléphone mobile. Malheureusement, prétendre à une rupture réseau, ou à une panne de batterie ne fonctionne qu’un temps. Tôt ou tard, vous avez alors des comptes à rendre, notamment sur la fiabilité douteuse de votre équipement. On saura alors vous conseiller de vous offrir le dernier cri, le bidule qui fait tout (sauf l’essentiel, à savoir le café et briquet pour ma part), et dont vous n’aurez jamais qu’un usage très limité. C’est ainsi : à l’ère de la communication, mettre un terme à celle-ci est alors considéré comme une impolitesse. Et le plus agaçant, c’est que vous êtes joignable partout ! Plus de paix ni aux toilettes, ni en voiture, pas plus que chez des amis/maîtresses/famille (rayez les mentions inutiles). Hé non : où que vous soyez, vous devez communiquer.

Finalement, tenir ces damnés appareils hors fonction, cela devient aujourd’hui salutaire. Par le passé, le téléphone était cher, et donc les gens prenaient soin à ne pas trop parler ni trop appeler ? Là ? Avec des offres illimitées, nous voici condamnés au supplice de la parlotte, au lieu de se retrouver autour d’un café, d’aller déjeuner. Le téléphone est supposé permettre la communication, et le voici le maître de la fracture sociale. Est-ce que je déteste le téléphone ? Non, j’ai juste en horreur qu’on me tienne la jambe pour rien ! Allez hop, tais toi le bidule en plastoc, je veux la paix !

Et merde, répondeur plein !