31 janvier 2007

Travailleurs

J’entends déjà la foule entonnant l’internationale, la gorge noyée sous la coulante barbarie d’une villageoise industrielle, le tout acidulé par des collations merguez dont le seul aspect rappelle que le Fuca sait se faire salvateur. La valeur du mot travailleur est devenue péjorative, un peu comme si le fait d’être autre chose qu’un nanti engoncé dans un costume de mauvaise facture fait de l’homme un personnage respectable. Le prolétaire deviendrait-il une plaie, les mains souillées un signe de faiblesse tant intellectuelle que morale ? plus je regarde les cadres sans vrais bords plus j’admire l’encadrement de l’ébéniste compétent. L’arrogance de ces cravateux pétris de racisme de classe qui ne regardent que par le bout d’une paire de lunettes aux verres biseautés me donne envie de rendre le myope muet et d’offrir la parole au grouillot silencieux. Est-il possible que ces imbéciles admettent que sans basse main d’œuvre courageuse il n’existe pas de société digne de ce nom ?

Je suis stupéfié par les railleries que provoquent les diatribes d’une Arlette Laguiller revendicative et ulcéré par le manque de considération pour une femme qui, en toute sincérité et inconscience de ses retards historiques prône encore, 30 ans après la méthode communiste révolutionnaire. J’admire, je souris béatement quand la retraitée s’emporte contre les salauds de patrons, les escrocs de ministres et les pourris de planqués d’un état malade. Quelle pugnacité, quelle volonté d’intervertir les rapports de force ! Si j’avais une seule remarque à faire à cette femme de bonne volonté c’est simplement de se départir des œillères politiques dont elle s’abêtit le regard pour redevenir un rien lucide sur la situation nationale. Madame, permettez-moi de vous signaler que la classe majoritaire est devenue petite bourgeoise, satisfaite de pouvoir tant bien que mal s’offrir à terme un logement chèrement payé sur 30 années de remboursements castrateurs, que ces personnes ne veulent plus entendre parler du travail manuel de papa, des ménages de maman et qu’il leur est à présent intolérable de soutenir une masse grouillante d’ouvrier bêtifiés.

Je regrette les poings levés (pas les mains tendues merci ça n’a rien à voir !) qui ne parlent pas de destruction mais de construction sociale équitable et je comprime une larme de tristesse à la douloureuse acceptation que les idéaux sont aujourd’hui des produits mercatiques soigneusement calibrés : la voiture, la maison, le jambon Herta et les frites Mc Cain. La société est-elle donc à l’image de ces hypermarchés, sans personnalité, rangés et classés par genre et taille puis finalement totalement dénués du petit côté humain indispensable à tout commerce ? rendez nous nos prolos bordel ! qu’ils puissent râler et dire le fond de leurs pensées !

Je concède tout à fait que les extrêmes peuvent se gargariser d’avoir des scores honorables par des procédés déloyaux comme cultiver les plantes de la discorde dans les cœurs secs des électeurs déçus. Combien de ces maçons, peintres ou mécaniciens plébiscitent des Le Pen (désolé la majuscule est par convention, pas par plaisir…) braillards et populistes alors qu’ils laissent la dernière survivante d’une foi inusable en la fin des luttes de classe. Arlette, merci encore d’être un symbole vivant de ce que pouvaient rêver les communistes : un monde moderne mais humain.

Enfin, de guerre lasse (sic) les combats pour les ouvriers cesseront quand nous changerons la société Française pour une société panaméricaine, et que les banderoles ne seront plus que reliques poussiéreuses dans les placards des derniers survivants. Adieu à vous, camarades anarchistes, adieu à vous syndicats (parfois véreux) et finalement adieu à cette plèbe qui savait se faire entendre dans toute sa simple et franche sincérité.

29 janvier 2007

La secte des bien pensants.

« Ô rage, ô désespoir… » non je ne vais pas vous rejouer le Cid de Corneille, bien qu’il me semble de plus en plus judicieux de faire le parallèle entre cette pièce et l’existence de plus en plus policée de la masse informe et populaire que nous sommes. Rien n’est plus frustrant que d’être d’une part traité en enfant, et d’autre part en inconscient notoire. Quid de la réflexion, de l’autonomie et de l’intelligence individuelle ? je sais, c’est une formule plutôt comique que de prêter une chose à quelqu’un qui ne sait pas s’en servir, mais tout de même doit-on pour autant refuser la capacité de décision sous prétexte que la majorité des gens sont idiots et égoïstes ?

En cela le système actuel m’horripile. Ce n’est plus une démocratie mais la dictature du bien pensant. De plus en plus de personnes adhèrent à cette secte maudite où l’édulcoration systématique est la règle : que ce soit l’alcool, le tabac, le fait de posséder une voiture voire même de se vêtir selon ses choix la secte veut mettre en œuvre tout l’appareil répressif dans le seul but d’instaurer une norme. Pour ma part comptez sur ma résistance citoyenne ! si je dis cela ce n’est pas dans un but purement vindicatif et égoïste, c’est aussi pour rappeler que moi, comme toute personne ayant des droits et des devoirs envers la Nation j’exige qu’on ne me prenne pas pour un imbécile.

Prenons dans un premier temps l’alcool (un bon verre de vin blanc d’Alsace pour commencer). C’est LE crime que de consommer ! allons, vous tous amateurs des miracles viticoles, vous l’ignorez probablement mais vous êtes estimés comme étant des terroristes de la route en puissance. Votre verre est une arme terrifiante, au moins aussi inquiétante et cruelle que pourrait l’être une arme bactériologique. Pire encore, ignoriez-vous que votre liquide est (selon des études de bien pensants) un poison mortel provoquant d’atroces souffrances et accessoirement des altérations affreuses du comportement ? aujourd’hui boire est estimé à peu près avec la même considération que les stupéfiants, c’est-à-dire de manière purement répressive et sans la moindre prévention ou éducation des masses. Ca ne dérange personne de marquer sur les bouteilles « l’abus d’alcool nuit gravement à la santé » mais penserait-on à étiqueter les boîtes de cassoulet avec la mention « en abuser fait monter le taux de cholestérol » ? j’aime boire un verre de temps en temps, la modération aidant je n’abuse jamais (au titre que deux verres me semblent suffisants), et je n’estime pas être une brute dénuée de sensibilité et d’esprit quand, une fois le repas terminé je rentre dans mes pénates. On va me dire « tu défends la picole mais tu te rends compte, les morts sur la route… » j’entends bien, je comprends on ne peut mieux le phénomène, mais pour autant que je sache c’est tout d’abord et avant tout une question d’éducation. Apprenons aux enfants ce qu’est le terroir, la richesse gustative et précisons leur que l’alcool c’est une bonne chose à petites doses. Comme toute chose, en abuser est mauvais, voilà tout.

Mon cendrier fume encore du dernier mégot tassé de mes doigts gourds et je le regarde avec désespoir : ça y est, ce geste fait de moi le criminel le plus scandaleux qui soit. Matraque télévisuelle en tête, le fumeur est l’assassin des foules, le barbare ignorant de ses risques et le fou qui gêne tout le monde avec sa fumée. Hypocrites que vous êtes, ça ne vous dérange pas que des dizaines de milliers de français soient accros aux calmants, somnifères et anxiolytiques sous contrôle médical ? visiblement même si la légalité et la légitimité de la consommation de tabac ne fait aucun doute, c’est le lieu de consommation qui fait de nous des bourreaux. Entre les lois interdisant la consommation dans de plus en plus de lieux et pour autant que je sache une augmentation à venir des taxes ne joue-t-on pas les hypocrites (pour changer) ? Allons-y franchement, prohibons dans le monde entier le tabac, faisons disparaître son existence de manière à ce que cela devienne un monument de notre société rétrograde et jamais avare en substituions chimiques à nos névroses morales. Bien sûr on va me dire que je suis radical, excessif et idiot parce que le tabac fait vivre des industries et des salariés. Quelle blague alors : on entretient donc des problèmes de santé à l’échelle planétaire sous prétexte que des groupes d’influences crient au chômage ? n’a-t-on pas plus de morts par an par cancer que de salariés dans le marché de la fabrication et la transformation du tabac ?
Je suis un fumeur, c’est mon vice principal (en dehors de celui de vous casser les oreilles de mes frustres gueulantes inutiles) et je l’assume en le finançant sciemment, et je n’accepte pas d’être dorénavant traité en paria alors que je ne fais rien d’illégal ! c’est tout de même un scandale ce discours du « tu peux fumer mais là où NOUS vous TOLERONS ». Et si je ne tolère pas la connerie humaine, dois-je demander sur le champ le vote d’une loi me permettant de parquer les cons dans des enclos ? on me traiterait alors (à raison) de fasciste, mais jusqu’où la secte du bien pensant ira-t-elle ?
Et je n’aborde même pas la question des patchs qui sont ENFIN remboursés, et encore remboursés jusqu’à une certaine somme alors que les traitements contre les autres addictions le sont pleinement, mais là je m’éloigne…

A présent l’Etat a l’intention de nous tenir par la main, de nous suivre pas à pas (jusque dans ma salle de bains… SALAUDS !) et de nous dire comment et où vivre « sainement ». Ca n’empêche nullement le monde de s’autodétruire à coups de pollutions diverses et variées, de consommer jusqu’à plus soif nos ressources limitées et de clamer haut et fort que l’année sera écologique. Quelle imbécilité ! je ne suis ni idiot ni exigeant, je ne demande qu’une chose, c’est qu’on me foute la paix : si vous ne voulez plus de fumeurs, prohibez. Vous ne voulez plus d’alcooliques, prohibez, mais merci ne jouez pas les faux culs (et je pèse mes mots) pour de simples vues politiques. Oui ! On emmerde le monde non pour des questions de santé publique mais de vulgaires raisons sociales : les non fumeurs nous prennent pour des pourris à assumer NOTRE vice légal mais ça ne les dérange visiblement pas d’avoir une attitude raciste envers ceux qui PAIENT l’état pour avoir le droit de consommer.

Je m’énerve là, tiens je vais m’en fumer une et l’arroser une petite vodka sans glace (nota : si vous servez de la vodka, laissez la au congélateur et ne mettez pas de glace dedans. Jusqu’à nouvel ordre on ne rafraichit pas un vin avec de l’eau… à moins d’être Américain).

A bon entendeur…

25 janvier 2007

Le vedettariat religieux.

La médiatisation des hommes et femmes d’église n’est pas un phénomène récent, surtout d’un point de vue revendicatif (pour ne pas dire vindicatif) de ces personnes ayant vouées leurs vies à Dieu. J’avoue, et ce non sans une pointe d’ironie sous-jacente que ça me fait sourire et même parfois rire jaune et pas uniquement à cause de mon addiction à la nicotine frelatant peu à peu mes organes respiratoires de constater qu’on puisse voir s’étaler sur les mêmes papiers (journaux) une toge ornée d’un crucifix et la dernière robe délurée d’une starlette en quête des appareils photos. Non que je sois contre la prise de position (sinon je ne serais pas présent ici à déblatérer ma bile glaireuse aux yeux de mes lecteurs), mais je trouve qu’il est fatalement difficile de tenir une position quand on parle de la Foi et non des choses bassement terres à terres. A chacun son boulot prétend-on dans les troquets au bord des comptoirs élimés par les chopes déposées négligemment par les serveurs épuisés, alors pourquoi la personne convaincue par la foi irait nous ressasser sa manière de voir sur la politique intérieure de sa nation ? n’a-t-il pas choisi comme emploi de soigner les âmes et non les portefeuilles. Bon… il est vrai que l’aumône sous la voûte assombrie et la légère pénombre méditative incite à la générosité, mais tout de même, peut-on demander au prélat de juger des impôts, des taxes foncières et autres prélèvements ?

Si je prends ce discours râleur concernant l’engagement politique et par conséquent médiatique des religieux c’est que je songe au décès de l’abbé Pierre. Vaste sujet que cet homme qui a, une fois n’est pas coutume au cours de son existence, rejoint paisiblement une demeure où nulle personne n’aura à lui faire de remontrance. Brave homme s’il en est, humble face à Dieu et courageux face aux hommes, il s’est battu pour la protection des faible, ces sans logis et sans espoir qu’on classifie aujourd’hui sous le trigramme SDF. Grâce à lui la mort d’un homme sur le bitume parisien n’est plus « normale », elle est simplement devenue « triste mais banale ». J’exagère à peine, mais ne doit-on pas les prises de consciences collectives grâce à ceux qui bougent de leur retraite (qu’elle soit dorée ou bien camisolée) ? C’est le portrait type de l’homme que j’apprécie, revendicatif et fier de ses opinions.

Là évidemment, vous allez me dire que c’est un non sens, je gueule à tue tête qu'un cureton ça n’a pas à foutre son nez dans les gamelles des politicards, puis que d’un autre côté j’admire la grande gueule de l’abbé Pierre. Non sens, reniement de mes opinions ? Pas le moins du monde, laissez moi finir (et par la même occasion écraser mon mégot)! Reprenons le fil de mes propos : l’âme oui, la politique non. C’est pourtant évident ! l’homme a bien agi en protégeant, en créant la fondation Emmaüs, en montrant à la face égoïste des français farcis de préjugés et d’indifférence que la rue n’est jamais plus éloignée du foyer que de quelques loyers en retard ou bien de la faillite d’une entreprise. Là où je vilipende le personnage (toute proportion gardée) c’est sur sa propension à vouloir amener le débat face aux parasites que sont nos experts en langue de bois. Voilà l’homme d’église, vêtu de son éternel pardessus et de son fidèle béret faisant remontrance aux hommes cachés derrière des cravates de soie aux motifs improbables. Le débat est-il seulement crédible ? Hélas non, d’une oreille distraite on a bien voulu entendre mais certainement pas écouter, et de fait plus l’abbé a braillé plus la caméra a flouée son image. Que nous reste t’il de lui si ce n’est ses interviews tonitruantes à la télévision, ses coups de gueule à tout propos, on est sûrement allé le chercher pour ses pronostics sur les coupes du monde depuis ces 30 dernières années…

Dramatique mon pauvre abbé, vous avez servi la cause médiatique au lieu de celle de Dieu. Qu’il me soit donné de vous offrir un épitaphe et je le ferais en ces termes :
« A vous homme de foi qui avez choisi l’image comme moteur pour sauver les hommes, à vous qui avez représenté la volonté inébranlable d’être humain, je vous dédie ces regrets pour vos actions charitables et ces remontrances pour vous être mêlé à la crasse politicienne ». Ca n’a rien de bien tendre de ma part, mais franchement, n’était il pas mieux à sa place, à aider et faire preuve de ce qu’il était dans le fond : un homme pas très loin d’être un saint.

Bon voyage au paradis Monsieur (majuscule) l’abbé Pierre.

18 janvier 2007

(xéno)Phobies

Depuis la nuit des temps jusqu’aux nocturnes crises d’angoisses, obsédés par de petits riens tels que l’attaque imminente des terroristes sur la capitale, la présence de dioxine dans l’air ambiant ou bien plus prosaïquement les hululements scabreux des chats en chaleur, l’humain est la victime d’un mot cruel : phobie. La phobie est partout, elle est moqueuse ou logique selon ses victimes et vous attrape à l’intellect comme le ferait une nuée de fans échevelées (précision d’une importance capitale : le féminin est choisi à escient) au corps d’un Patrick Bruel miaulant ses ritournelles (qu’est-ce que je disais…). Que ce soit la terreur face à une araignée (arachnophobie), une foule trop grande (agoraphobie) ou pire encore de l’étranger (xénophobie), c’est toujours un processus intellectuel tortueux qui mène à la répulsion spasmodique de la rencontre systématiquement dramatisée. HIIIII !!! (cri de la jeune femme en crise de panique devant une araignée) TUE LA !!! Je tiens à préciser que la dite bestiole atteignait la taille d’une pièce de un euro, pattes comprises.

Non, qu’on ne me taxe pas de moquerie face à ces maux douloureux et impossibles à réprimer ! Phobiques de tous les pays, je vous ai compris ! je pourrais même ajouter « ich bin ein Phobique »… bon… tout de même, je suis bien loin de l’emblématique président à la bannière étoilée tombée sous les balles ensorcelées d’un tireur solitaire (en effet la commission Warren a entérinée l’explication d’une balle pour plusieurs blessures…), tout au plus je saisis bien l’ampleur de votre douleur morale. Gageant qu’il vous est intolérable d’aller au devant de la chose repoussante, il me semble alors de bon ton de vous proposer de vous socialiser plus fortement, ceci afin que votre partenaire soit par procuration le sauveur des situations délicates. Quoi de plus charmant (sic) que celui qui se dévoue pour débarrasser la chambre de la saleté d’abeille ayant eue la mauvaise idée de venir pourrir votre petit nid d’amour ? quoi de plus séduisant que le bras tendre et léger de la demoiselle vous accompagnant entre les rigoles bétonnées et les épanchements d’humanité d’une foule crasse dans le métro parisien ? C’est bien LA solution, le salutaire contact d’une personne pouvant vous offrir l’action indispensable au soulagement de votre être opprimé.

L’histoire le prouve : il suffit de confier à un tiers la charge de traiter un problème pour se retrouver soi-même soulagé. Le xénophobe n’a-t-il pas traité sa crainte de l’étranger en plaçant sa confiance dans les triques et les arrestations des milices de noir vêtues ? n’a-t’il pas apprécié Pinochet qui a réussi pendant un long moment à endiguer la vague de ces salauds de communistes qui sont pas comme nous ? et ici même, en France, les collaborateurs n’ont-ils pas énormément faits pour le soulagement des phobies raciales de la masse silencieusement emmitouflée dans sa « nationalité française » ? l’œuvre (disons plutôt l’action) de bienfaisance des compensateurs est, à une échelle autrement plus grande, un acte béni des vœux des xénophobes. Ca expliquerait aussi (du moins je pense) l’unité radicale de ces personnes dans le mouvement vers une seule voie (celle du bras tendu et des bottes claquant sourd le bitume des métropoles) et la fascination pour les étendards. D’ailleurs, les drapeaux, fanions et brassards sont-ils inscrits sur les fiches maladies de ces xénophobes ?

N’ayez pas peur, soyez sereins. Aujourd’hui la foule abêtie par la propagande clignotante des téléviseurs complices se charge d’offrir une audience aux candidats atteints de xénophobie. Rien qu’à ce titre on peut sans conteste affirmer qu’une part des minorités françaises s’est bien intégrée et a bien comprise le système électoral, et qu’on va au devant de sacrés progrès (c’est comme ça qu’ils définissent ce qu’ils appellent réformes et que d’autres appellent scandales), à condition qu’ils passent. Je n’ai rien contre les minorités, bien au contraire j’approuve sans ambigüité leurs présences aux élections, mais de là à devenir militant et affirmer qu’ils ont raisons, et que ce sont tous les autres qui ont tort il y a une marche qui me semble bien difficile à gravir. Je me contente de les observer, de dire que le droit est pour tous, et puis ma voix ne leur sera pas dévolue, voilà tout.

Rien n’est pire que d’isoler un groupe minoritaire, c’est la meilleure manière de les rendre encore plus radicaux. Les allergiques, les maladifs, les chétifs, les quelque chose – phobe doivent-ils être en marge d’une société tendant vers l’aseptisation et la standardisation ou bien carrément choisir l’exil moral ? Il me semble difficile de demander à une personne (par ailleurs bien portante hormis ses troubles phobiques) de fuir le monde sous prétexte qu’il y a trop d’araignées dans les pavillons, les campagnes et les caves des villes. Restez parmi nous, vivons ensembles ! n’ayons plus peur, aidons nous les uns les autres (pour moi si possible une demoiselle splendide au tempérament d’acier et à l’humour radical… mais on peut toujours rêver.). Pour se faire je propose donc aux xénophobes de France de se trouver une compagne de nationalité (et si possible de couleur de peau) identiques à la leur puis, se faisant, de supplier l’être aimé de tabasser sans vergogne tout ce qui n’est pas comme eux. En agissant aujourd’hui (et en espérant que la révolution éclate avant le prochain hiver) ils auront acquis le droit d’être reconnus comme des phobiques ayant lutté contre leurs maux, et puis… d’ici quelques années (une fois que l’armée et la police auront soldé les derniers foyers de résistance) on pourra alors les traiter efficacement en testant sur eux les vertus de notre système pénitentiaire.

Agissez xénophobes, ouvrez les portes de vos cœurs pour que s’ouvre les portes de Fleury Mérogis !

12 janvier 2007

Homicide volontaire.

«J’ai envie de tuer quelqu’un. C’est assez urgent. Ca aussi, j’aurais peut-être dû en parler à mon psy, mais finalement, j’ai préféré me confier à mon armurier.>
Vous allez me dire : « Et le respect de la personne humaine ? », mais où avez-vous vu qu’elle était respectable la personne humaine ?

Vous avez entendu chanter Francis Lalanne ?
Vous avez entendu penser un footballeur ?
Vous avez vu les yeux morts des terrifiants zombies à chapeau mou alignés devant les chars apocalyptiques des 1er Mai moscovites ?
Avez-vous entendu le décérébré radiophonique meugler les résultats du « Top 50 » ?
Avez-vous reniflé les effluves de sang lourd épanché du taureau sacrifié au crétin bariolé qui brandit sa queue fauve au nez des connes humides des étés madrilènes ?
Avez-vous touché du doigt le fin fond de la bassesse au front des marchands de femmes accroupies ?
Avez-vous, sans bouillir, essayé Génie ?
Vous avez lu Télé 7 jours ?
Vous vous êtes regardés ?
Vous m’avez vu dans la glace?

Pierre Desproges.

Merci maître, je confirme de ma basse existence terrienne à votre inexistence spatiale supposée par les blouses blanches des laboratoires du CNRS, l’envie d’homicide est quelque chose qui titille bien souvent mes neurones accablés par l’imbécile vacuité de ma résistance temporelle. Effectivement, rien n’est plus tentant que de placer dans une mire vitrée d’un fusil assassin le visage flasque des humains barbares, puis de presser sans pitié la détente et de provoquer l’élan éjaculatoire d’une balle chemisée. Mais qui exécuter ? qui placer sur le billot expiatoire sur lequel on laisserait tomber empli de joie la hache du destin ? la liste est longue, bien plus longue que le bras manchot de notre justice défaillante. Se contenter d’un tiercé gagnant du triumvirat des ordures reconnues et d’en séparer la substantifique moelle de l’adipeuse et inutile chair, et ce sans toucher les bords (s’il vous plait) ? ce ne serait qu’un pis aller, une façon comme une autre de désarmer la rage continuelle de cette haine pathétiquement ordinaire qu’on (enfin moi et mon égo) voue au monde et à ses dirigeants.

« Comment espérer en l’homme? Peut-on attendre le moindre élan de solidarité fraternelle chez ce bipède égocentrique, gorgé de vinasse, rase-bitume et pousse-à-la-fiente? »

C’est à se demander si l’on peut se contenter d’une épuration concernant nos criminels car si l’homme peut être un assassin c’est au peuple que revient la force d’être collaborateur. Oublier que dans l’élan patriotique l’on peut caser sans sourciller la déportation, les dénonciations et la ferme résolution d’apprendre une langue étrangère c’est alors renier la volonté du quidam à faire comme tout le monde. Je sais, résister est une valeur morale haute et symbolique tant la différence de force entre le faible terroriste et le fort oppresseur est grande (sachez qu’à toute fin utile terroriste signifie « qui use de la terreur pour changer une situation politique » et non « qui tue aveuglément ») cependant est-ce pour autant qu’on doit assimiler le courage à tout un peuple ? Je ne suis pas chien, bien que les vertus du canin sont bien souvent plus grandes que celles de l’être l’humain, donc je disais je ne vais pas être chien je laisserai le bénéfice du doute… mais douter, douter de quoi ? De l’idéal colporté puis déformé par la masse insensible aux vrais idéaux ? douter de qui ? des propagandistes hurleurs de fausses bonnes nouvelles sur les canaux radiophoniques délabrés par les censeurs bien pensants ? La valeur des hommes en allant au fond des choses, c’est une infamie que de parler du pluriel des âmes égarées et c’est un compliment d’en faire l’estimation à l’unité. Finalement les marchands d’arme ont compris le concept : vendre en quantité de manière à ce que les individualités se taisent face à la parole franche et précise du fusil d’assaut.

« Pourquoi, Dieu me tripote, faut-il toujours-z-et-encore que, siècle après siècle, civilisation après civilisation, se répète inlassablement le terrible adage qui nous enseigne que le plus court chemin de la barbarie à la décadence passe toujours par la civilisation ? »

C’est donc ça ! voilà pourquoi je ne sais qui placer entre moi et le poteau salvateur de mon peloton d’exécution personnel : la civilisation n’est en fait que le tampon instable et miséreux entre le totalitarisme de la haine et l’anarchie d’une fin d’époque ! n’est-ce donc que cela à qui l’on doit l’effondrement du bloc soviétique ? est-ce finalement la réponse à toutes les faillites politiques ? on ne peut donc pas accuser une personnalité, ou même des gouvernements, on doit donc en conclure (en tressant pendant ce temps la corde de notre pendaison et dresser la potence salvatrice) que nous, humains, déchets biologiques d’une nature qui pourrait se passer de notre présence, sommes responsables de l’échec de notre existence commune. Je frémis de ma responsabilité, je tremble rien qu’à l’idée terrifiante qu’on puisse m’imputer le naufrage planétaire. Je n’ai pas les épaules larges du titan soutenant le monde, moi pauvre erre imbécile confinée dans mon existence maniérée je ne me vois pas jouer les bouc émissaires. Non merci ça ira je me contenterai de mes propres erreurs (et d’un petit café bien serré sans sucre merci).

« Dieu a dit : "tu aimeras ton prochain comme toi-même", c'est vrai. Mais Dieu ou pas, j'ai horreur qu'on me tutoie, et puis je préfère moi-même, c'est pas de ma faute. »

Voilà, on va encore prendre Dieu à témoin, comme s’il devait assumer notre existence en dilettante désespérément prisonnière de notre carcan éducatif. Verrait-on une jeune fille de bonne famille se jeter sur les baïonnettes des encagoulés tortionnaires ? on va me répondre oui, question d’éthique et de droiture morale et moi je rétorquerai qu’il est moins imbécile de se coller une bouillie musicale informe dans le fond des tympans (et accessoirement sur des vêtements hachés menus par la mode) que face à une rangée organisée de militaires préparés à l’émeute. Rien n’est plus déprimant qu’une révolution qui se finit en bain de sang, qu’une révolte héroïque mais futilement vaine, et bien que j’admirasse cette indéfectible volonté de changement, je me demande encore et encore si le bon sens n’est pas la première chose qu’on perd quand on devient révolutionnaire (ça mériterait une ritournelle ça tiens…). Simplement, dire que Dieu a le droit de regard et le devoir de réponse c’est en oublier nos propres obligations. Qu’on ne me dise surtout pas qu’il y a Dieu en toute chose, il y a surtout notre acharnement à produire, créer puis détruire en chaque endroit de ce monde. Que ce soit… tout en haut des plus splendides montagnes, jusqu’au plus bas fond des océans, en passant par les plaines et les déserts, nul endroit n’est à l’abri des inconséquences de l’Homme et Dieu ou pas ce foutoir mondial n’est que notre fait, pas celui d’une Vie supérieure… quoique le théologien irait bien prétendre à notre décharge que cette garce d’Eve nous a gâché le paradis… mais là c’est une autre histoire !

« Tout dans la vie est une affaire de choix, ça commence par la tétine ou le téton, ça se termine par le chêne ou le sapin. »

Alors au fond je n’ai pas pressé la détente, point de mort à mon actif si ce n’est celle de mes propres illusions sur l’humanité toute entière. J’ai choisi le doute en guise d’hostie, je le garde sur la langue en attendant qu’il devienne pour moi la saveur d’une divinité au-delà de toutes les mécréances de la chair humaine. Maître, vous disiez vous-même « la seule chose dont je sois certain c’est d’être dans le doute. ». Je vous confirme, c’est bien par le doute que l’Homme n’échouera plus en politique, en diplomatie, en écologie ou en négociations sociales menées tambour battant (et non au son trompeur des bottes cirées s’échinant dans l’imitation ratée d’une percussion de fanfare).

Merci à vous, Maître à penser majuscule du minuscule scribouillard que je suis.

08 janvier 2007

Hypocondriaque politique et névrosé militant.



Comment résumer la morne réaction que provoque en moi l’exultation populaire lors du changement d’année ? y a-t-il réellement une expression capable d’identifier sans aucune contestation possible l’indifférence qui se manifeste en moi face à la foule sautillante devant un feu d’artifice, d’un but lors d’un match de football ou bien en plein meeting politique ? le fait est je ne surveille le calendrier qu’à deux occasions qui sont d’une part la célébration de mon entêtante survie (terrible camouflet à Darwin qui prétendait à tort que les plus adaptés survivent) et à la non moins savoureuse délectation quotidienne que je pratique en découvrant la dernière bavure humaine quelque part dans le monde, et qu’ainsi la nouvelle année n’est qu’une façon comme une autre de constater sans équivoque que tout corps imbibé d’alcool à l’excès a une flottabilité inférieure et une densité surprenante. On ne compte en effet plus le nombre de noyés, éventrés par accident, écrasés dans un véhicule (qui a eu la mauvaise idée de croiser la route d’un chêne en goguette…) et ce sur la courte période séparant noël et le jour de l’an. Suis-je donc allergique aux fêtes populaires et aux évènements populistes ? pas le moins du monde, simplement mon aversion pour la foule provoque en moi l’urticante sensation d’être au milieu d’une foire aux bestiaux mâtinée d’un vibrant hommage aux producteurs de boissons alcoolisées.

De ce constat le psychologue me taxera rapidement d’être misanthrope et d’une mauvaise foi à faire pâlir un politicien. Soit. Je concède non sans une ironie dans le rictus que j’ai du mal avec les humains et qu’au surplus leurs excès ont le don au mieux de m’agacer, au pire de m’infliger une sévère migraine. J’avoue également qu’il m’est difficile de comprendre et encore plus de cerner la personnalité de ces gens qui fêtent non pas un évènement mais le temps qui passe ! incroyable, on arrose, dispose et disserte sur la vitesse à laquelle on approche de la mise en bière et sur un ton dramatiquement souriant. En hélant le quidam courant après la trotteuse pour lui demander s’il ne se sent pas idiot de célébrer la fin d’une année, celui-ci vous répondra toujours qu’il souhaite que l’année à venir soit pleine de bonnes choses, et patati et patata… ah parce qu’il faut croire que les vœux pieux se réalisent ? j’ai dû rater un épisode parce que généralement le dicton veut que les bonnes résolutions pour le nouvel an sont les premières à s’envoler et à ne pas être tenues… quoiqu’en y réfléchissant bien Bush fils s’était engagé à prendre position sur la suite à donner à la guerre en Irak, et il l’a fait avec (soyons hypocrites ou cyniques) élégance en jetant un 20.000 à la tête de ses détracteurs. Oui ! 20.000… de plus ! chapeau bas cowboy, tu me laisses sur le séant.

Là mon psychologue légèrement désarçonné par la contorsion intellectuelle allant du champagne à l’Irak pour voguer entre les deux sur le nouvel an se gratte la base du crâne, m’observe avec circonspection et me soupçonne d’être hypocondriaque. Non docteur, je ne souffre pas de tous les maux et surtout pas de ceux qui se distribuent par la vox populi ou par les médias. Suis-je allergique au monde ? certes oui puisque je revendique mon côté « haine ordinaire » (merci Maître) mais je me sens plus comme un parasite accroché au dos d’un chien que comme un chien accroché au dos de son maître. Comment ça je n’ai pas compris la réflexion toubib ? vous parliez donc de maladies mentales de base comme être sociopathe, névrosé ou bien maniaco-dépressif ? qui ne l’est pas docteur ? je croyais que ces termes étaient associés à une définition somme toute très fidèle de 98% de l’humanité !

Je sens que mon médecin conventionné fulmine intérieurement à mon sourire narquois. Le Vidal dans une main, un Freud dans l’autre en guise de bible expiatoire le voici lancé dans une recherche digne d’une quête épique du Saint Graal pour découvrir mon fonctionnement intérieur. Pas à pas dans l’avancement dans ses élucubrations il me tance de toute sa science (si science il y a dans l’analyse de l’intellect du tout à chacun…) et me fait bien comprendre que je suis un hamster prisonnier de son Savoir. Amusant, laissons le croire qu’il comprend quoi que ce soit et amusons nous. Alors doc’ ce que vous voyez dans mon karma est bon ou pas ? s’astiquant le menton (non, pas le reste …) de deux doigts il sourit comme un illuminé à la veille de se faire sauter en plein marché en braillant un slogan religieux quelconque. Oui ! j’ai compris vous êtes névrosé chronique ! il se gargarise le bougre, fier de sa trouvaille péremptoire. Moi névrosé ? grande nouvelle docteur, c’est une découverte pour moi, à croire que cette révélation est de l’ordre du divin ! Après Fatima me voici à Paris voyant la lumière ! ah non, ce n’était qu’un tube néon jouant les funambules clignotant au-dessus de mon crâne. Puis-je ajouter que je suis névrosé militant docteur ? oui, ce n’est pas que j’aime prendre parti (quoique…) mais c’est surtout que je revendique ce côté déprimé (et parfois déprimant) de ma personnalité qui n’a pour seul et unique but que de provoquer l’agacement chez les interlocuteurs qui m’irritent.

Il enrage, rougit de colère et jette ses précis de psychologie. Du calme, inutile de s’énerver pour si peu ! oui je sais, c’est frustrant d’avoir un patient qui s’amuse à loisir à naviguer entre le bon et l’atroce, qui se joue des conventions en prétendant pèle mêle adorer la liberté et vouer un culte au militarisme, et qui pardessus le marché savoure la dégradation morale et sociale du monde comme on dégusterait un plat pantagruélique. Le voyant se visser le doigt sur la tempe je le soupçonne de me croire fou, bon à enfermer, digne d’une étude psychiatrique et non psychologique et qu’au final la science se contentera d’une camisole et d’électrochocs. Une petite chose docteur, j’oubliais de vous préciser que je n’ai rien d’un dangereux psychotique armé prêt à tout pour d’obscures raisons incompréhensibles (bien qu’il me semble plus intellectuellement satisfaisant de paraître fou -chose qui est aisée- aux yeux d’idiots que de leur sembler être un génie qu’on est pas). Je n’ai rien de bien dangereux si ce n’est qu’au final je suis bien un hypocondriaque politique (la façon de traiter la politique aujourd’hui me donne la colique) et un névrosé militant.

Revenez toubib, je déconnais, allez analysez mon moi profond, celui qui se cache dans les entrailles noueuses de mon cerveau dégénéré ! faites moi comprendre qui je suis réellement, mes différentes personnalités demandant une trêve des confiseurs pour se mettre d’accord sur un plan d’action (si possible ratifié par l’ONU). Soyez sympa merde, j’ai besoin qu’on m’explique de quoi je suis (ou pas) fait… mais revenez… le con il court vite !