22 mai 2007

Sinistrose valley

Sous quel prétexte insensé taxe t’on les banlieues d’être des zones inaptes à être productives, en dehors bien entendu du marché lucratif de stupéfiants ? Est-ce que ces héritages de quarante ans d’incurie sociale et architecturale sont ils vraiment des fiefs pour une économie parallèle et sont devenues de véritables zones de non droit ? Le cliché a le mérite d’exister et je suis convaincu qu’un sondage à ce sujet, surtout parmi les ruraux n’ayant jamais vu la moindre barre d’immeubles de leur vie, serait particulièrement édifiant sur la perception générale de la France par les Français eux-mêmes.

Il y a quelques décades le territoire pouvait se résumer aux villes, centres économiques et industriels, et aux campagnes pourvoyant aux besoins agricoles. Le cliché béton contre campagne semblait pouvoir suffire à identifier les problèmes de logement, d’éducation et d’assimilation des populations immigrées. De fait, les grandes manœuvres déclenchées durant les années 60 permirent d’établir de grands ensembles d’habitation au milieu de nulle part ; de cette manière l’on assurait un logement et des commodités à tout bas salaire. Aujourd’hui cette lecture est brouillée : les banlieues sont des cités poubelles, le réseau éducatif démembré et les institutions en passe d’être dépassées par les crises récurrentes. En observant de loin on a donc l’instantané de tours de béton dégradées où des jeunes font une loi martiale bien à eux et où ils peuvent pratiquer un commerce illicite en toute impunité. Est-ce bien là une réalité ? La question se pose tant on en a fait les points d’orgue des échecs du passé.

Regardons de plus près ce qu’est une cité aujourd’hui. Une cité c’est avant tout : des milliers de personnes de dizaines de nationalités, des structures vétustes ou nécessitant un rafraîchissement, des espaces verts en option et surtout une image si sombre que personne extérieur à l’endroit n’oserait s’y aventurer la nuit venue. Cette situation n’est pas nouvelle mais se délite depuis trois générations, les grands parents ayant étés « invités » à travailler sur le territoire, leurs enfants ont grandis dans un pays ne les ayant pas spécialement attendus et eux-mêmes sont les parents d’une nouvelle génération sans repère. Ces cités ont-elles jamais étés adaptées aux familles ? Tout au plus aux ouvriers mais sûrement pas à la présence de gosses. L’absence d’équipements collectifs tels que des stades ou même simplement des balançoires atteste de l’absence de cette réflexion.

Le véritable massacre culturel a eu lieu sur la seconde génération, celle née sur le territoire Français après 1965. En quoi se reconnaissent ils ? En une France qui peu à peu semble les refuser par les propos tant que par les actes, ou dans un pays d’origine dont ils ne savent rien ou presque ? La vérité se situe à mi chemin, c'est-à-dire qu’ici ils ne sont pas encore tout à fait citoyens puisque étant désignés comme les dangers contre les Français de souche, et pas citoyen du tout du « là-bas » idéalisé puisque personne ne les y attend. Bien des jeunes ont espérés le salut par un retour au pays… mais tous ou presque retournèrent en France. Autres coutumes, autres mœurs…

La banlieue est réellement sinistrée sur bien des points : les parents abandonnent souvent tant l’éducation de la rue prend le pas sur la loi parentale, et l’école à force d’avoir dû concéder une baisse d’autorité des maîtres se trouve aujourd’hui dans l’impossibilité de sanctionner sous peine de voir dégénérer les choses. Il est odieux de croire que l’Etat doive se préoccuper de l’éducation, c’est aux parents de faire cette part qui leur incombe mais à contrario c’est à l’Etat de se donner les moyens d’avoir une véritable force dissuasive tant à l’école que dans la rue. Chaque chose a un prix et l’abandon des premiers arrivés nous a menés à ce que l’Etat soit perçu comme un accessoire et non une nécessité.

On ne peut pas blâmer si facilement ceux qui habitent ces immeubles : ce sont des communautés qui se sont organisées comme elles ont pu et les jeunes se cherchent des repères qui les parents eux-mêmes ont du mal à offrir. Les priorités sur place sont « comment se payer le loyer » autant que « de quoi vais-je vivre demain » et à ce titre les petits trafics sont autant immoraux pour certains qui profitent d’un revenu facile et quasiment sans risque que d’autres pour qui c’est une question de survie. Ne nous leurrons pas : le marché des stupéfiants ou des marchandises de contrebande alimentent bien plus les caisses de cols blancs investissant les capitaux que dans celles de ceux qui portent un jogging. L’ennui est que les seules solutions trouvées jusqu’à présent étaient des placebos sous forme de stades aménagées ou d’un coup de peinture sur les murs, ou bien de la politique de la matraque. A ce titre il est donc dramatique de voir que personne ou presque n’a confiance dans la police dans ces quartiers. La faute à qui ? A tout le monde je le crains…

Les axes de réflexion sur cette question nationale dépassent, et de loin le simple périmètre d’une cage d’escalier. Il s’agit dès maintenant de se poser quelques questions judicieuses pour lesquelles les réponses sont toujours délicates puisque posées au sujet de l’Homme. Une loi s’impose à la communauté mais ne saura jamais satisfaire tous les membres de celle-ci.
- Comment réinstaurer une autorité parentale ? Sanctionner les parents quand ils démissionnent ou bien inciter à être plus présents et impliqués ?
- Rétablir une véritable autorité dans le système scolaire ou bien rétablir la simple notion de respect élève professeur ?
- Avoir des exigences concernant l’assimilation des populations immigrées ou bien tolérer tacitement que des familles entières ne parlent pas Français ?
- Avoir une politique de laisser faire pour l’immigration ou bien s’imposer des limites ?
- Etre plus répressif ou plus pédagogique ?
- Doit on raser les cités ? Si oui au profit de quoi ? Comment reloger les familles déjà présentes et où loger les nouveaux arrivants ?


Comme on peut aisément le voir ces questions ne sont pas à réponse unique, il est foncièrement impossible d’être ferme sur n’importe quel de ces points sans heurter des sensibilités. Mes réponses sont difficiles à placer car elles seraient immédiatement taxées de tout un tas d’épithètes mal venus.

Question 1 : L’autorité parentale est du cadre privé donc pas question de légiférer, en revanche subordonner les aides sociales à la scolarisation et au comportement correct des enfants en bénéficiant est du cadre du législateur. Prélever le montant des amendes à la source pourrait être une forme de sanction de l’incurie de certains parents démissionnaires. On peut aussi envisager des aides sociales ciblées à ce genre de problèmes.
Question 2 : Le rétablissement du « pouvoir » professoral posera la question de savoir où sont les limites entre enseignant et éducateur. Pour ma part un enseignant n’a pas fonction à être celui qui donne des cours de morale aux enfants, en revanche il doit être symbole d’autorité. En reprenant les idées précédentes, suspendre les allocations familiales si un élève n’est pas correctement scolarisé ou bien si son comportement provoque de graves crises serait une piste à creuser.
Question 3 : L’assimilation des populations immigrées est une obligation. Il n’est pas question que des milliers de personnes vivent sur le territoire sans être capable de faire des gestes élémentaires comme faire des courses ou bien se renseigner dans une administration. Un plan de formation gratuit offrant des mises à niveau pour la langue orale serait une excellente chose, surtout si cela devient une campagne nationale. De plus, imposer un niveau minimal de Français ne serait-ce que parlé pour l’obtention de la nationalité, voire du titre de séjour ne me semble pas être une mesure raciste ou xénophobe mais juste une mesure de bon sens. Comment un employeur pourrait il gérer une personne ne parlant pas sa langue ?
Question 4 : La politique d’immigration est un terrain glissant, tellement glissant qu’il suffit de dire « contrôle » qu’on reçoit l’étiquette « fasciste ». Je poserais alors une question : si dix millions d’immigrés arrivent en une seule année, comment les assimile t’on ? Quelle est la limite que peut tolérer la population et le système administratif ? C’est un sujet qui mérite non pas un voile pudique mais une véritable réflexion. Ne devrait on pas favoriser l’emploi des jeunes nés sur le territoire (immigrés ou pas) que celui qui n’a de cesse d’émigrer en France ? Je comprends la logique de ceux qui veulent venir, mais je comprends aussi ceux qui sont déjà là !
Question 5 : Répression et pédagogie sont les deux facettes d’une même chose : l’Etat. L’équilibre est difficile à trouver, charge aux institutions de faire les bons choix sur chacun des sujets déjà abordés.
Question 6 : Si quelqu’un a une bonne réponse, qu’il me le fasse savoir car là il s’agit de budgets colossaux… nous qui n’avons déjà pas de quoi financer la retraite des cotisants.

Finalement c’est un terrain si sensible qu’un livre serait plus judicieux, en tout cas voici quelques clés que je propose pour avoir une lecture plus pointue des choses. Les cités ne sont pas des repères à bandits mais sont devenus avec le temps des repères à personnes désoeuvrées et n’ayant plus confiance en rien d’autre qu’en eux-mêmes. Soignons en urgence ce mal avant qu’il n’offre une population de jeunes malléables aux intégrismes les plus infâmes. La tendance est apparue, faisons en sorte d’arrêter immédiatement le massacre.

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