02 janvier 2008

C’est enfin fini !

Fini ce consumérisme mâtiné de course contre la montre, fini la célébration d’une seconde signifiant que notre échéance mortuaire s’approche inéluctablement, fini ces réveillons pétris par la publicité et la surconsommation ! Je souffle enfin, je respire à nouveau et, Dieu merci, je ne suis pas armé de la gueule de bois commune à bien des fêtards… Le plus amusant, du moins quand c’est le cynisme qui se charge de faire rire, c’est qu’après les batailles de rayonnages et les campagnes Bérézina dans les hypermarchés bondés, c’est à présent la retraite des emballages et la débâcle des sapins déplumés qui commence. Phénomène intéressant, il est utile de se pencher sur le symbolisme de nos poubelles pour y voir poindre nos dépravations ordinaires.

Voyez donc l’empilement glauque d’emballages déchirés et de blocs de polystyrène grand teint, ne sont-ils pas les cadavres de notre mode de vie dont la joie éphémère du déballage ne saurait expier notre besoin maladif de bonne conscience ? Note pour plus tard : trouver le sadique qui a conçu le mot polystyrène et le maudire sur dix générations au moins. Revenons à nos moutons, non à nos étrons : l’homme se vante de ses achats jusque dans la poubelle tant il met un point d’honneur à empiler les cartons et autres sachets vides dans une rectitude stricte d’étalagiste monomaniaque. A tout bien réfléchir, c’est à croire que par cet acte le dit petit malin se fait une publicité racoleuse auprès de ses voisins en leur montrant avec un certain orgueil la nouvelle télévision achetée à crédit ou la console de jeu du petit dernier. Symbole d’un capitalisme, le déchet devient alors un statut social à part entière. C’est donc en conséquence la possibilité d’affirmer sans ciller : « Montre moi ce que tu jettes, je te dirai qui tu es ».

Après les emballages par eux-mêmes, quoi de plus tristes que ces papiers chamarrés et bariolés qui enveloppaient l’instant d’avant ces chers (dans tous les sens du terme) présents qu’on se fait avec un sourire crispé ? Ils n’ont que la nuit d’un noël vite oublié pour exister, briller et symboliser un instant de fête, alors qu’ils devraient porter la signature du bon moment partagé et de la générosité réellement souhaitée. Ne soyons pas si ironiques, certains comprennent plus que d’autre tout le sens de la fête, comme ces gosses qui décollent patiemment les papiers pour les plier et en faire un bon souvenir. Magnifique du pas grand-chose devenant par là une immense richesse… C’est tout de même étrange comme le monde de l’enfance m’assouplit plus que la décharge, pardon le monde des adultes.

Une fois cette tambouille commerciale du gros barbu en rouge sang de bœuf, il reste alors à rejeter tout ce qui fut indispensable au passage d’une année morne vers une année terne. Alignements de bouteilles vides, foie gras pas même savouré mais plutôt dévoré sans satisfaction, saumon fumé devenu si ordinaire qu’il en est fade, et cette foutue dinde dix fois trop obèse et indigeste qu’elle en encombre le réfrigérateur des jours durant, tout ceci finit donc dans nos chers conteneurs sombres, marquant ainsi qu’après la rigolade grisée vient toujours la migraine aux yeux vitreux. Qu’il est agréable de se dire sur le ton de la plaisanterie entendue que la nuit fut bonne, alors qu’elle s’est souvent conclue au mieux la tête sur la cuvette, au pire dans le caniveau… L’Homme est bien incapable de se contenir plus de six mois, c’est bien pour ça que la prise de la Bastille et le changement d’année découpent pratiquement parfaitement le calendrier. Ca permet un excès tous les six mois, non ?

Ne boudons pas notre plaisir : certains se sont embrassés aux douze coups, d’autres, comme moi, se sont assoupis peu après, certains se sont tellement empiffrés qu’ils ont permis aux laboratoires pharmaceutiques de s’enrichir, et les derniers ont simplement pu attraper une grosse crève en trainant plus que de raison dans les rues. Chacun sa vision du passage, la mienne étant peu propice à la démonstration ridicule et limite ordurière. Je vous épargne le couplet sur les misères ordinaires qui se foutent du calendrier, vous connaissez le sujet …

Donc, si le nouvel an doit exister, c’est à mon sens pour avoir une bonne raison de s’en mettre plein la panse avec la bonne conscience de faire « comme tout le monde ». Pour ma part je me contente de ne pas faire du tout, quitte à ce que ce soit à l’opposé de ce qu’attendent les gens de moi. Tant que je n’estimerai pas le moment opportun, je me priverai de ces cris, de ces beuveries, et de ces orgies signes non pas d’une communion mais juste d’une forme lamentable de décomposition de nos repères. Chacun son truc, ce ne fut pas le mien !

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Il me parait pourtant plus que normal de profiter de ces instants privilégiés pour réunir des familles plus qu'éclatées par un monde qui facilite trop les déplacements.
C'est le seul moment de l'année où je peux entamer une discussion enflammée sur tout et n'importe quoi avec mes oncles.
C'est aussi le seul moment de l'année où l'on peut s'offrir les uns les autres des cadeaux aussi inutiles que cher pour ce que c'est... Mais qui démontre qu'on se soucie un tant soit peu de la famille. Mine de rien, faut en sortir des idées quand une famille de 30 personnes se réunit.

J'ai pour ma part une entassement énorme de paquets chaque année... Essentiellement du à mon fils de 3 ans, beaucoup trop gaté, j'en conviens. Mais pour autant, après avoir fair un tour du quartier le lundi 31 au matin (jour de ramassage des poubelles... de noël!). Je n'ai pas assisté à "l’empilement glauque d’emballages déchirés et de blocs de polystyrène grand teint".

Maintenant, pour le nouvel an... Je fais la fête avec mes amis (dont certains que je ne vois d'ailleurs guère plus que ce jour là)... Et j'y vois là encore un intérêt énorme: réunir des potes.

Ces deux fêtes justifient à mes yeux le nombre de cadeaux et de bonne nourriture vendue ces jours là... Je regrette simplement l'oubli plus que général de la symbolique exacte de la fête de Noël. Pour dire, ma femme m'interdit la messe de minuit, qui n'est plus à minuit, mais 21h30 en général; soit en plein milieu du repas familial.

Pour conclure, je dirais que le coté commercial de ces fêtes ne devraient pas vous occulter les fondamentaux... Le ton même de l'article me pousse à croire que le coté commercial a effacé de votre mémoire l'origine même de ces fêtes, alors que vous revendiquez rejetez le coté commercial... Un beau paradoxe non ?

JeFaisPeurALaFoule a dit…

Et le ton ironique du tout fut-il donc si peu visible?