18 octobre 2007

V pour Vendetta

J’ai décrété qu’aujourd’hui je resterais stoïque et garderais mes commentaires concernant les grèves combinées de la SNCF et de la RATP (et oui je suis un de ces banlieusards pris en otage… ça y est je râle.) et pourtant ça me brûle les doigts d’enguirlander cette population de salariés. Bref, passons à autre chose avant qu’une saine colère explose et s’exprime avec virulence à travers cette page.

De quoi vais-je donc parler ? D’un film que j’ai eu l’occasion de voir très récemment et que je recommande très chaudement à toute personne ayant comme moi le plaisir d’apprécier le cinéma à plusieurs degrés de lecture. V pour Vendetta s’avère être un représentant étrange de ce que peut être l’expression politique à travers une histoire pouvant au départ passer pour enfantine : un « super » héros (de Marvel pour ceux qui connaissent) s’employant à dénoncer la dictature instaurée en Angleterre suite à un attentat biologique, et faisant acte de résistance face aux manipulations des médias à la solde du gouvernement. Dans le principe, un homme masqué aux méthodes expéditives semble peu propice aux réflexions et plus enclin à faire apprécier l’action régnant avec force sur toute la durée du film, et pourtant, peu à peu des questions fusent : qui, pourquoi, et comment ?

Sans révéler l’essence même de ce petit bijou d’intelligence cinématographique, je peux vous dire sans éventer quoi que ce soit que l’ambiance semble tirée des pires images de la seconde guerre mondiale et que l’Humanité n’y est pas traitée avec charité, loin s’en faut. Trahison, lâcheté et laxisme ambiant sont mis en lumière avec ce qui est le plus dérangeant : le réalisme. La caméra a un œil glacial tout comme le héros l’a et qui plus est aucune pitié n’est accordée à qui que ce soit. La foule sert donc de spectateur d’abord inactif et mollasson, soumis aux médias qui martèlent des messages dont Goebbels n’auraient pas renié la paternité, puis finalement acteur de son destin. Peut-on espérer plus belle réussite que d’inciter l’homme à agir par lui-même et le faire s’affranchir du joug de sa propre « moralité » ?

Je parlais de deux niveaux de lecture du film : le premier est donc l’observation d’une révolution fomentée par un seul personnage clé pour libérer un peuple entier de sa propre soumission aux images et à la parole d’un dictateur. C’est une étape qu’il ne faut surtout pas rater pour en saisir la force une fois la seconde lecture possible, celle où l’on comprend que le sens du sacrifice peut être indispensable pour arriver à ses fins. Le sacrifice d’un pour le bonheur de tous, telle est la réflexion globale de ce film. Bien sûr, certains diront qu’on peut échouer dans cette voie, qui plus est si le geste est désespéré, mais combien de révolutionnaires se sortent indemnes de leurs actions ? Tous ou presque périssent ou finissent solitaires car la révolte n’apporte que rarement la paix…

Ce qui est particulièrement terrifiant c’est de voir que les procédés du film, c'est-à-dire ses ficelles scénaristiques, sous des dehors de grossièreté (complot étatique, prise de pouvoir par un chancelier à la manière d’Hitler…) sont pourtant tout à fait plausibles. En plaçant le calque du film sur la réalité, bien des points communs sont à trouver avec bien des sociétés dites civilisées : lois liberticides, ralliement derrière un chef omnipotent, mise en place de contrôles paranoïaques, soutien d’une population terrifiée par l’ampleur des catastrophes réelles ou supposées. Le droit d’expression est une chose inaliénable et malheureusement on accepte, sous couvert de sécurité de tergiverser avec. En quoi le président Bush est-il meilleur qu’un de ces dictateurs imposant ses lois et ses vues sur le monde ? V pour Vendetta présente avec sagacité tous les aspects de ces phénomènes politiques : corruption des agents de contrôle, actions de propagande par les voies médiatiques modernes (télévision et internet) puis finalement bavures menant la population à la révolte. Vu ainsi ce film change totalement d’aspect et d’une production classée à tort « action » on arrive à « Anticipation politique ».

Rares sont ceux qui ont conscience de l’ampleur du désastre quand il s’agit de la communication de faits : les USA par exemple reprochent à l’Iran de vouloir le nucléaire civil pour se moderniser, et pourtant c’est ce même pays qui a des bases en Turquie, occupe l’Afghanistan et l’Irak, et disposent de postes d’opération en Arabie Saoudite. Aujourd’hui l’Iran est donc cerné et sera très probablement le prochain siège d’une guerre pour le pétrole. Et on nous montre quoi : un pays rétrograde, un gouvernement fanatisé et une population dégénérée. Où est la vérité ? Le président Poutine a donné son soutien pour le programme nucléaire civil Iranien, ce qui est somme toute normal vu qu’un pays doit se développer, quitte à investir sur ce genre de plans. En quoi nous avons le droit de refuser le progrès aux autres ? V pour Vendetta présente ce genre de schéma de pensée via l’image réaliste des circuits de l’information qui finalement abreuvent le peuple de demi vérités et de faux semblants. Ne soyons pas des moutons mais des analystes perspicaces. Et ce n’est qu’un exemple flagrant parmi tant d’autres…

L’ennui malgré tout c’est le manque de vraisemblance pour une chose : le héros qui arrive finalement à ses fins. J’espère sincèrement qu’il n’existera pas de tels états totalitaires où la parole sera celle de la télévision, l’opinion celle de l’Etat et la Foi celle du chef. Pas question pour moi de tolérer un seul instant l’indolence généralisée qui malgré tout est plus que flagrante dans nos états riches. Tout y est finalement toléré, plus rien ne nous semble scandaleux, du moins pas plus d’une semaine. Un massacre au Darfour ? Où ça ? Du trafic de drogue ? Oh ça on n’y peut rien. La violence ordinaire ? Quelle importance tant qu’elle ne me touche pas directement. La haine raciale qui refait surface ? Pas grave on chopera les plus virulents. Et on terrifie la population avec un terrorisme exalté par l’image et le son, et on impose des contrôles de plus en plus effrayants sur nos libertés, « pour nous protéger ». Désolé je ne crains pas mon voisin pas plus que je ne crains l’agent de police. J’estime que nous devons tous vivre en bonne entente, car c’est CA le principe de démocratie : l’équité, le gouvernement PAR le peuple et POUR le peuple.

Voici donc l’affiche de ce film, en cliquant dessus vous accéderez au site officiel. Il est sorti en DVD, ne vous privez pas !
Sinon, en dessous je vous mets le trailer (en Anglais malheureusement) du film: regardez et vous aurez une bonne idée de l'ambiance ...
V pour Vendetta sur Amazon.fr


3 commentaires:

Anonyme a dit…

bonjour, je viens de lire votre très bon texte, et avec le recul de toutes ces années j'aimerais vous relire pour savoir votre ressenti par rapport a votre texte, êtes vous dans le même état d'esprit ?
merci

JeFaisPeurALaFoule a dit…

Réponse simple: je ne suis pas de ceux qui changent sur ce genre de terrain et mes convictions sont suffisamment solides pour rester identiques dans le temps.

Donc oui: je suis dans le même état d'esprit.

Anonyme a dit…

Bonsoir,
Tout comme vous, j'ai vu VFV, et je peux meme dire que j'ai dut le regarder 30 fois.. si c'est pas de l'acharnement !!
Il est une "refference" sur bon nombre de points, qui sont à la vue de tous dans notre dur realité..