03 octobre 2007

Bons à rien et prêts à tout…

En une phrase, on plante un décor qui est non seulement désagréable pour la personne ciblée mais surtout tout à fait révélateur d’un état d’esprit qui, à mon sens, est aussi vieux que le monde. Bien souvent on taxe notre époque d’être favorable aux arrivistes et aux requins, comme si l’ambition personnelle n’avait jamais existée avant. Pourtant, l’Histoire ne se prive pas de nous offrir quelques personnalités célèbres dont quelques perles dignes d’un inventaire.

Ah comme il est heureux de croire que l’ambition peut être vertueuse, ça nous permet de rester totalement dignes et même de se glorifier d’une réussite qui est pourtant passée par le piétinement impitoyable de nos congénères. Si aujourd’hui nous avons des présidents, c’est que d’une certaine manière nos aïeux ont compris qu’il fallait mettre en place une véritable hiérarchie cloisonnée, ceci dans le seul but d’encadrer nos excès et notre manque total de constance. Croyez-vous en toute sincérité que la France de la cinquième République soit l’œuvre de vrais démocrates, ou plutôt d’autocrates convaincus que le pouvoir du peuple doit se concentrer en un seul homme ? Dans l’absolu le général de Gaulle (« de » minuscule, enfin c’est un débat sans fin au sujet de sa particule) a « exigé » que le président de la République ne soit plus un coupeur de rubans mais un chef d’état digne de ce nom. Obscur colonel avant la guerre, il fut un homme avisé de s’offrir les faveurs des Anglais par sa présence à Londres. Il devint donc un interlocuteur favorisé pour parler de l’avenir de la France d’après-guerre. Sous cet éclairage, notre dictateur… pardon démocrate a-t-il légitimement été élu sur sa seule compétence ou sur le fait que la BBC lui a offert une publicité sans précédent ? Comme si les vrais résistants (pas ceux ayant échangés le brassard de milicien pour celui de FFI) avaient eu besoin d’une harangue certes fort intéressante et bien construite, mais somme toute majoritairement ignorée de tous en 1940… Si ce n’est pas de l’opportunisme ça… Pour le bon à rien je ne juge pas trop, finalement il n’a pas été un « mauvais » chef d’état malgré l’enlisement dramatique de la situation en Indochine puis en Algérie. Hériter de tels dossiers laisse des traces indélébiles.

C’est amusant de remonter le temps et d’aller taquiner de l’icône comme certains iraient taquiner le goujon. Dans le genre symbole fort notre Napoléon 1 er (et non pas le guignol qui s’est fait élire empereur sous le chiffre 3) est un morceau de choix : Corse –ça commence mal-, atteint d’un probable ulcère (qui a médit en parlant de cirrhose ?) et au surplus obnubilé par sa petite taille, on a tout pour faire le genre de profil désagréable du requin caricatural. Et pourtant, sur bien des points l’homme méritait sa légende : un stratège incroyable pour son temps, une mémoire exceptionnelle (on dit de lui qu’il était capable de parler des enfants de n’importe quel de ses grognards) et une compétence hors du commun pour la politique (rédiger la constitution d’un royaume en 48 heures, faut le faire !). Là, d’accord, j’avoue avoir cédé à la tentation de l’encenser, mais n’oublions pas non plus d’autres évènements : c’est un coup d’état qui l’a mis au pouvoir, c’est également une auto proclamation qui a fait de lui un empereur, il a liquidé des centaines de milliers d’existences dans ses guerres d’invasion, et pardessus le marché s’est octroyé le luxe d’être l’origine de nouveaux concepts comme la bérézina (du nom d’un fleuve Russe), le grognard (pour le soldat qui grogne mais qui obéit) et la fanfreluche de la légion d’honneur (car aujourd’hui c’est ce qu’elle est).
Petite chose amusante : il aurait déclaré un jour que « Si j’avais fait de la politique en Corse, jamais je n’aurais eu la moindre chance ». Révélateur de l’ambition du personnage…

Deux exemples de l’ambition, de l’opportunisme politique et du travail sur l’image de marque, et pourtant nos voisins, nos amis et même certains membres de nos familles sont ainsi faits qu’ils ont le désir de réussir, quitte à écraser ce qui pourrait être un obstacle. Combien sacrifient une existence paisible, l’amour et la famille sur l’autel de la profession ? Combien de couples ne supportent pas le choc de la promotion ? Oublier que l’orgueil humain est démesuré c’est s’exposer à des risques : on ne compte plus les hommes qui deviennent jaloux de leurs épouses et de leur position d’homme du foyer… quand l’épouse commence à gagner plus que lui. Dramatique et triste à la fois, l’ambition personnelle ressurgit alors. On devrait effectuer une analyse statistique sur les salaires des couples et y observer les tendances des augmentations. Nul doute qu’on aurait de quoi rire en voyant qu’étrangement, lorsque l’un des deux réussit, l’autre fait tout pour le rejoindre, quitte à changer d’emploi ! Après tout, un bon à rien pourrait en faire autant puisqu’il serait décidément prêt à tout pour être dans le haut du panier, du moins dans le haut du panier de son foyer.

Que nous sommes cons parfois…

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