26 novembre 2015

En réponse à un commentaire

Je réagis en réponse à une critique argumentée qui nécessite visiblement une mise au point. Remettons les choses en place un instant. Je me contrefous de chercher des responsables quand il est temps de s'interroger sur ce qu'il faut faire dans l'immédiat.

Ce discours de "pourquoi" est tellement confortable! Brasser du vent en disant "untel est responsable, accusons le de tous nos maux" ne suffit absolument pas à résoudre quoi que ce soit. Par analogie, ça me fait penser à un type qui cherche vainement le clou qui a crevé son pneu, au lieu de le remplacer PUIS de s'interroger concernant la crevaison. Il serait temps que les palabres soient remplacées par du réalisme, et plus encore par une action concertée, d'autant plus quand on apprend avec tristesse que les criminels étaient pour majorité connus de nos services de renseignement. Qu'est-ce qui a cloché? Où est le point de rupture? Il se situe précisément là où notre république est éprouvée, à savoir quand elle essaye de concilier les droits vus par les rêveurs, et la réalité du terrain où chacun tire la couverture à lui. Qu'on cesse enfin de croire que chaque citoyen est responsable, pleinement conscient de ses actes, et acceptons également que nombreux sont ceux qui usent et abusent des failles, des laxismes pour en profiter contre chacun de nous.

Ce qui est intolérable, c'est qu'on aille mettre notre façon de vivre en regard de celles d'autres nations. On reproche à la Turquie, au Pakistan et à d'autres nations de ne pas être totalement démocratiques, ou en tout cas pas démocratiques de la même manière que la nôtre. Pour ce qui est des "démocraties" et "dictatures", la bonne question n'est pas de dire "c'est une dictature puisqu'ils sont plus liberticides que nous, alors elle mérite son sort", mais peut-être de se souvenir qu'aussi bien au Pakistan qu'en Turquie, les dirigeants sont des ELUS, et n'en déplaise aux gens qui mettent cela en doute, si la situation ne nous convient pas, c'est peut-être aussi parce que nous n'avons pas la même culture (politique, religieuse...). Les Français aiment faire la leçon, tout en perdant de vue que chaque nation traite sa politique comme cela lui convient. Après tout, chaque Français vomit ses critiques sur les USA, tout en refusant notoirement que les USA nous fassent la leçon. C'est ce qu'on appelle quelque-part le nationalisme il me semble. Dans ces conditions, demandons-nous ce que nous pouvons accepter et ce que nous nous devons de préserver. Est-il acceptable qu'un calife autoproclamé mène une guerre d'invasion sur la région? Non. Est-il légitime de refuser notre aide à des populations parce que cela pourrait déranger certains? Non. Est-on alors en droit de dire que nous devons agir avant que la situation n'empire réellement? Je laisse la réponse à qui veut bien oser le faire.

J'ajoute quelque-chose de fondamental: ce n'est pas en clamant que la balancier oscillant entre laxisme et dictature ira trop loin vers le despotisme qu'il ne faut pas le laisser reprendre une position légitime. Si la pointe est sur une situation par trop laxiste, doit-on refuser de lui refaire prendre une situation "normale"? Je l'ai dit et il me semblait que c'était clair, qu'il faut évidemment un contrôle strict et un cadre légal tout aussi strict afin de ne pas laisser ce fameux balancier aller tout à l'opposé. Ce qui est tout de même "drôle" (ironie), c'est que ce point n'est ni considéré dans le propos, ni même pris en compte dans la critique faite sur le côté "démagogique" qu'on me reproche. Arrêtons de nous réfugier derrière NOS intérêts personnels pour enfin raisonner à une échelle nationale. Le laxisme tant critiqué est pour une énorme part (je le redis, dès fois que cela ne soit pas maîtrisé) NOTRE faute. Oui: la faute du citoyen qui ne voulait plus de policiers dans les rues, le citoyen qui ne voulait pas qu'on le stigmatise parce qu'il est musulman, le citoyen qui a fermé les yeux sur ce qu'il se passait sous son nez. Les urnes sont là pour ça, et les fameuses remontrances nous doivent être faites, puisque NOUS les avons mis en place. Ne sont-ils pas des élus justement?

Complétons le raisonnement. Il n'y a pas d'amalgame, il n'y a pas même nécessité de le faire car dans l'ensemble de la population, qu'elle soit ou non musulmane, qu'elle soit ou non étrangère: fermer les yeux sur les problèmes comme la délinquance, fermer les yeux sur la radicalisation de ceux qui nous entourent, et pardessus le marché refuser d'agir sous prétexte des libertés individuelles, c'est irresponsable et c'en est devenu criminel. Un blogger (dont je ne mettrai pas la vidéo devenue célèbre) a, avec ses mots de banlieusard, a lancé "non, balancer ces "fils de ..." c'est pas être une balance!". Je confirme: à ceux qui hurlent contre la délation, est-ce un choix que de fermer les yeux? Je le martèlerai encore et encore, le citoyen n'a pas que des droits, il a également des devoirs. Et là, bizarrement, j'ai l'impression que la plupart se foutaient littéralement de cet aspect de responsabilité individuelle et collective. Il n'est nul besoin d'instaurer une Gestapo de sinistre mémoire ou une Stasi tout aussi atroce pour que la nation puisse faire des progrès. C'est toute une population qui doit se prendre en main. L'idée est dans les faits de ne pas s'arrêter à des "je ne dénoncerai pas, je ne suis pas un collabo de Vichy" est insultante, tant pour les résistants qui sont morts pour notre liberté, que pour les victimes actuelles des attentats. On parle bel et bien d'agir contre le terrorisme, à une échelle inconnue jusqu'alors. Se réfugier derrière des grands mots pour ne pas avoir à décider ou agir est par trop confortable et lâche.

Petite digression de circonstance. J'entends certains hurler "à mort", avec pour sous-entendu "rétablissons la peine de mort". Fort bien. Allez, admettons, puisqu'il faut savoir écouter toutes les voix. A ceux-ci je pose une seule question: êtes-vous capable d'être le juré qui donnera sa voix pour l'exécution d'un condamné? Ou mieux encore, serez-vous le bourreau? Quand on se sert d'une horreur absolue comme levier pour faire revenir de telles questions, j'en reviens encore et encore à l'idée de responsabilité, car il faut assumer chacun de ses propos, et ce pas uniquement par écrit, mais également dans les actes. Certains envisagent maintenant des milices dans les quartiers... mais où va-t-on aller dans la folie dépourvue de pragmatisme, de bon sens et surtout d'intelligence? Quand on parle de changer des lois, il faut que le citoyen prenne conscience qu'il ne s'agit pas d'en faire des jougs, mais des outils contre ceux qui pensent pouvoir nous imposer le règne de la terreur. Scléroser la société en lui collant une dictature sur le dos est tout aussi criminel que l'inaction, ou bien la prise d'actions comme les milices. Dans les trois cas, c'est le règne de la peur, à savoir la peur de l'état, la peur des représailles d'autrui, ou la peur d'être la cible des autres citoyens en colère. On ne résout pas une crise mondiale avec des pics et des fourches. On ne gère pas le monde à coups de révoltes paysannes.

Liberticide. Ce mot est lâché à longueurs d'articles pour mettre en doute, voire accuser de fascisme latent l'état Français. Qu'est-ce qu'être liberticide? Tout état, par essence, EST liberticide, puisqu'il y a des lois, donc des RESTRICTIONS des libertés. Quand on a des opinions, que l'on prend des décisions, il faut bien entendu (et je me répète, faute de pouvoir enfoncer cette idée dans les crânes) ASSUMER ses responsabilités. C'est si simple de brailler "c'est la faute à X", puis de ne rien faire sous couvert de "je ne veux pas qu'on m'emmerde, alors maintenons le statu quo". Je prends une analogie qui parlera à ceux vivant comme moi le quotidien de se déplacer sur et dans Paris. Des alertes sécurité sont quotidiennes dans les transports. Des trains sont bloqués, des lignes fermées, et cela fait circuler des milliers de personnes dans des trains ensuite bondés. On en entendait plein qui grognaient que "font chier avec vigipirate", ou encore "quels cons à la RATP"... Sauf que là, maintenant, chacun prend conscience que peut-être une seule alerte bien gérée pourrait avoir sauvé la vie à des dizaines, si ce n'est des centaines de personnes. C'est ça aussi, la vie en société, assumer que la sécurité ne passe pas uniquement par les lois, mais par l'action de chacun. Malheureusement, la plupart ne veulent surtout pas être responsables de quoi que ce soit.

Qu'est-ce qui est malsain et malhonnête? C'est que notre peuple se lamente sur nos morts, mais que les plus de 200 russes, eux, n'ont eu que quelques minutes dans une brève dans le JT, que les victimes au Mali n'ont été mises en avant que pour le show en direct, puis silence radio une fois l'assaut terminé, et qu'enfin on se foute ouvertement de Beyrouth et de ses dizaines de morts durant le dernier attentat. Quels sont les quotas de morts pour se décider à agir de concert? Combien faudra-t-il de victimes en France pour qu'enfin il y ait une véritable interrogation sur notre capacité à réfléchir ensemble, et donc à agir en conséquence face à ce terrorisme désormais international et national?

Désolé: la modération est indispensable en politique uniquement si celui face à vous s'est assis à votre table pour discuter. Quand la personne face à vous n'envisage rien d'autre que l'appel aux armes, je ne serai pas celui qui attendra béatement de tendre l'autre joue, et dans le cas présent d'être volatilisé ou mitraillé parce que "je suis pas comme lui".

Je pense que le pacifisme est une belle utopie, indispensable pour contrebalancer l'hypertrophie de certains qui ne pensent que par la violence, mais en tout état cause pas une nation ne peut prétendre avoir résolu tous ses problèmes internes à travers du pacifisme idéalisé. Gandhi a laissé une belle idée, mais son pays est toujours sclérosé dans un fonctionnement par castes sociales, une situation pour la femme indigne, et j'en passe et des pires. Les autres pays pouvant revendiquer une révolution pacifique l'ont faite... de manière pragmatique! J'invite chacun à aller regarder qui fait fonctionner ces nations, qui est aux commandes, qui a retourné sa veste, et surtout comment chacun a fait preuve de réalisme.

Se croire à l'abri de tout grâce à des idées, c'est oublier que pour qu'elles soient effectives, certains se sont battus pour elles. Les libertés fondamentales en France ne sont pas apparues par pure bonté d'âme, et chacune des révoltes, guerres (civiles ou non), ont forgées la France. Se souvenir de ces évènements permettrait à chacun de prendre la mesure que rien n'est acquis, et que c'est au prix du sang que nombre de nos "évidences" sont apparues.

Pour ce qui est de la sécurité, est-ce parce qu'il est irréaliste de tout contrôler que pour autant il faudrait aucun contrôle? Quel est ce raisonnement binaire où faute d'avoir une dictature on devrait tout laisser passer? Je crois comprendre: JE veux vivre tranquillement sans que JE sois emmerdé par quoi que ce soit. C'est ça l'idée? Egocentrisme? Egoïsme? Allons, un peu de lucidité, on ne peut et je ne veux pas qu'on ait un oeil sur chacun, mais ça ne me dispensera pour autant d'espérer qu'il y ait un oeil protecteur. Après tout, le Français veut un état paternaliste, mais uniquement quand ça l'arrange. "Je veux bien que l'état m'aide, me donne des avantages, mais je ne veux surtout pas qu'il se mêle de mes affaires, même si elles se révèlent plus que limites!" Qui est faux-cul là? Nous ou l'état? Qui se moque ouvertement d'un fonctionnement en société? Nous ou l'état qui applique ce que nous désirons?

La responsabilité est une chose qu'on semble ne jamais vouloir prendre ici bas. L'abstention est un refus d'intervenir dans la vie de sa communauté. Le vote blanc, c'est offrir aux autres qui se déterminent un poids unitaire supérieure lors du vote; fermer les yeux sur le monde qui nous entoure, c'est refuser d'admettre qu'il n'est pas, et ne sera jamais idéal.

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