20 septembre 2010

Rien de surprenant, hélas.

Avec le climat politique passablement empoisonné tant par un gauchisme de salon, que par des réactionnaires de droite incapables de se contenir, le débat est, pour le moment, sclérosé sur deux sujets majeurs : l’expulsion des Roms et la gestion des retraites. Quoi que les deux sujets aient été déjà traités, torturés, et surtout relancés par tous les acteurs du petit monde des grandes gueules, force est de constater que cela occulte d’autres informations et débats qui nous pendent au nez. Incrédules, le quidam me demandera, bien entendu, de préciser ce qu’il y a de plus important autour de lui, d’autant plus que les médias se font peu le relais de la situation mondiale, et notamment Européenne.

C’est par hasard que je suis tombé sur un article de l’express, daté d’aujourd’hui, traitant de la réélection de la droite au parlement Suédois, et surtout l’apparition de l’extrême droite dans ce même parlement. Concrètement, la presse ne se fait visiblement pas l’écho d’une information qui me semble majeure ! 5,7% de députés d’extrême droite, c’est un score que même le FN rêverait de faire, car dans l’absolu, si l’on regarde la répartition des partis, cette mouvance pourra systématiquement jouer les arbitres lors des votes d’importance. Malgré tous les engagements que peuvent prendre ces élus, ils sont dorénavant le bras de levier d’une opinion publique qui, visiblement, s’est radicalisée. L’émergence de tels partis n’est pas le jeu du hasard, pas plus qu’un symptôme récent en démocratie. N’oublions jamais que la radicalisation est un résultat commun dans toutes les démocraties en crise. De plus, il faut se souvenir qu’il est aisé de provoquer des crises majeures à travers le truchement d’alliances contre nature. On a bien vu la gauche et la droite se fédérer pour jouer les barrages contre le FN dans certaines régions de France, alors, lors des tergiversations dans les couloirs d’une assemblée divisée, tous les cauchemars sont permis.

Ce qui est inquiétant, ce n’est pas que l’extrême droite existe et soit représentée, car c’est le principe même des élections : si ce parti a des électeurs, il se doit d’être présent à l’assemblée nationale. Je me souviens encore de gauchistes se disant libertaires envisager sereinement l’interdiction du FN. J’avoue avoir été horripilé par ce contresens manifeste, d’autant plus qu’un libertaire se doit, en principe, de donner la parole à tout le monde, et pas uniquement quand ça l’arrange, non ? Dans ces conditions, il est naturel que ces partis qui dérangent soient représentés. Non, ce qui est réellement inquiétant, c’est qu’ils émergent dans des proportions plutôt importantes. Un élu, voire deux, cela n’a rien d’étonnant, car, de manière régionale, on peut toujours trouver de l’exception électorale (voir l’élection d’un député chasse et pêche par exemple), mais là, avec un 5,7%, on parle bien d’un contrepoids. La vox populi a été claire : le nationalisme n’est pas mort, et il veut revenir en politique.

Je dis « rien de surprenant, hélas ». En effet, si la rue exprime son mécontentement, c’est en se radicalisant. Ca n’a rien de surprenant, mais malheureusement les mêmes causes aboutissent aux mêmes conséquences. On se souviendra avec inquiétude que nombre de dictatures sont apparues à travers le truchement d’élections libres, donc de manière raisonnée par le peuple (si tant est que le peuple soit raisonnable en période de crise majeure). Doit-on alors craindre ces phénomènes électoraux ? A mon sens, ce n’est pas tant les craindre que les affronter qui va se révéler difficile. La perspective d’un nouveau duel d’un parti « classique » avec le FN au second tour de 2012 est des plus effrayante, surtout qu’elle incitera, encore une fois, la rue à agir non avec bon sens, mais de manière épidermique. Typiquement, la population s’est plainte d’avoir été « contrainte » à voter Chirac en 2002. Contrainte ? Pas vraiment, si l’on prend en compte le fait que Le Pen n’a pas vu son score réellement varier entre le premier et le second tour, mais que l’abstention, elle, s’est effondrée. Cela démontrait sans doute possible que c’est la rue, et elle seule, qui a remis les clés du second tour au FN. De ce fait, j’espère que les électeurs seront moins stupides et feront acte de civisme pour nous épargner un nouveau coup d’état involontaire du prochain président sortant.

Relevons enfin un autre risque au moins aussi grave, qui est celui de tous les extrêmes. Entre une gauche radicale du NPA, et un FN qui semble pouvoir se targuer de voir ses thèses mises en application, les partis classiques risquent de se voir pris entre le marteau proto communiste et la flamme tricolore. Je crains que l’assemblée nationale devienne le théâtre d’une véritable guerre de tranchées, où chaque parti tirera sur l’autre, et se servira de son poids pour bloquer, figer et pourrir les débats. Aujourd’hui, la majorité absolue de l’UMP ne rend pas la situation plus saine, mais elle a le mérite d’éviter que des élus puissent faire le jeu du contrepoids perpétuel. Gageons que la campagne électorale sera agitée, car entre une droite qui essaye tant bien que mal de se démarquer de Sarkozy, une gauche qui tergiverse entre Royal et Aubry, et enfin un FN enfin délesté de son chef historique, il y aura de quoi assister à des passes d’armes internes, ainsi qu’à des crasses électorales assez savoureuses... Pour qui saura lire entre les lignes.

L'article sur l'express

Aucun commentaire: