26 juin 2009

Nécro d’un afro au blanco

Jeu de mots pourri s’il en est, je songe donc au non évènement qu’est le décès de Michael Jackson. Comme tous les artistes de renom et de talent, il fut tour à tour adulé, harcelé, sali par la vindicte et la rumeur, ausculté par l’opinion publique à cause de ses frasques, et finalement mort juste avant une tentative de reprendre la route et la scène. Vais-je parler de la justice américaine, des accusations de pédophilie ? En toute honnêteté… Je m’en tamponne les noix avec une babouche ! Ce n’est pas à moi de dire s’il était déviant ou pris au piège pour l’argent, ce fut à la justice de régler la question.

Pourquoi ai-je dit non évènement ? Parce qu’il ne s’agit pas là d’un évènement de l’ampleur d’un essai nucléaire, ou de la chute d’un gouvernement après un putsch militaire, c’est la mort d’une star de la musique, donc rien qui ne soit que très ordinaire finalement. Dans l’esprit, je trouve même malsain ce mouvement mondial de madeleines éplorées, versant eau lacrymale sur la future bière adulée de la vedette. Se rabattre sur un chanteur pour en faire un messie, ça me laisse plus que perplexe, pas vous ? Je n’ai même jamais vraiment compris le principe d’idolâtrer quoi que ce soit : on peut respecter, même se « plier » à une autorité aimée (la religion, et soumission au sens technique d’obéir au dogme), mais pas adorer quelqu’un qui n’a pour tout discours philosophique que « bouge tes miches sur mon morceau ». Dans la même veine, Jeff Buckley, mort en pleine ascension, auteur d’un seul album « officiel » sera mis en scène au cinéma… Comme s’il avait été le fondateur de quelque chose de vital, d’éternellement nouveau ! Ils ne sont pas les Bell, Einstein, Tesla, Fermi ou Curie qui seraient élevés avec autant d’acharnement par les foules ! Il faut donc remuer son cul sur scène, se défoncer sévèrement, avoir une vie dissolue pour être un modèle ?

A vomir.

Et pourtant, j’admets un immense talent aux deux artistes précédemment cites. Difficile en effet, de renier les qualités de danseur, auteur, chanteur et show man de M.Jackson. Tout le monde garde à l’esprit ces clips devenus de véritables films, ces morceaux devenus cultes que toutes les générations connaissent, et puis l’incomparable innovation dans la danse. Créateur de génie, le « king de la pop » s’éteint et l’on se souvient de lui. Pourtant, des années durant, seule la chronique judiciaire et les torchons de la presse se préoccupaient de lui. Qu’on lui foute la paix à présent, il mérite bien de rester propre dans l’éternité, afin qu’on se souvienne de Billy Jean, et pas de Bambi, qu’on revoie avec plaisir Thriller, et pas son entrée dans le tribunal. Avoir la gloire, c’est autant un poison qu’une joie, et M.Jackson aura payé son statut toute sa vie. Est-ce si enviable que ça, d’être constamment traqué, de ne pas connaître le plaisir d’une vie ordinaire, et de devoir se méfier de tout, et surtout de ses proches ?

A 50 ans, Michael Jackson est donc parti en laissant derrière lui un monumental cadeau au monde de la musique du XX ème siècle, avec en point d’orgue une certaine idée de la scène. Il a « inventé » le show pop, la chorégraphie, la provocation quasi sexuelle dans ses attitudes, et puis surtout ouvert la voie à toute une génération d’artistes plus ou moins compétents, mais tous héritiers de sa marque de fabrique. Il était noir, il a fini bizarre, il était afro américain, il est devenu un objet de culte made In USA. Quel retournement, dans un pays resté figé dans un racisme institutionnel jusque dans les années 70 !

Merci monsieur Jackson pour votre talent, votre œuvre. Désolé, je ne pleurerai pas sur votre tombe, je n’ai aucune relation affective avec les vedettes, pas plus que je ne dresserai d’autel à votre mémoire. Tout au plus vais-je me contenter de répéter ce que j’ai dit à l’annonce de votre décès : « Ah bon ? » Sur ce, j'ai une cigarette qui m'attend.

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