16 octobre 2008

Est-ce que ?

Le monde est morose, il s’enfonce inexorablement dans le marasme qu’il a lui-même bâti avec indolence. A l’heure actuelle investir est soit un signe extérieur de richesse, soit une prise de risques inconsidérés. Dans un cas comme dans l’autre le regard de ceux ayant perdus tout ou presque au jeu de « celui qui gagnera le plus vite et le plus facilement » se posera comme acide et amer. De toute façon comment apparaître honnête quand on n’a pas été pris dans la tourmente ? C’est ainsi, se refuser à participer à ce genre de stupidité passe pour être un déni d’action, une sorte de refus de participer à la marche du monde. Alors dans ces conditions je me targue de ne pas être un mouton acceptant la tonte forcée par le capitalisme mondialisé.

Alors, être heureux est donc injurieux face à la misère humaine ? Il semblerait que de manger à sa faim, de pouvoir financer son logement est à cacher, comme si la réussite se faisait honte alors qu’elle était pétrie par l’orgueil des années 80. Dans tous les cas la grisaille devient une valeur refuge et nous poussons le vice jusqu’à reporter les couleurs ternes sur nos vêtements. Je suis convaincu que si l’on mettait en parallèle les tendances vestimentaires avec les situations économiques force serait de constater que chaque crise fait réapparaître le brun et le gris cendre. Moi ? Peu m’importe, je m’amuserai des teintes tant que je ne serai pas trop miro pour en savourer l’impact. Tenez, en parlant d’impact, un simple vêtement peut provoquer de véritables crises : prenez des bureaux emplis par un personnel guindé snobant toute innovation et glissez-y un tordu de mon genre arborant fièrement un t-shirt estampillé « Ricard staff » avec le logotype qui va bien. Quelle rigolade ! De fait la crise me fait me moquer du monde et je vis aux crochets des grognements d’autrui à mon encontre. Doux plaisir que de passer pour un dingue aux yeux d’un imbécile…

Certes, on peut estimer que la discrétion est une vertu et qu’avoir l’intelligence d’éviter l’ostentatoire est plus du respect que de la simple nécessité d’être accepté des autres, mais à mes yeux c’est tout le contraire : commencer par se respecter soi-même est autrement plus important que d’obtenir celui de la foule morne, emmitouflée dans ses soucis mêlant crise du logement, prix du baril (qui s’effondre en ce moment même) et pouvoir d’achat. Digressons à nouveau : le pouvoir d’achat ? Tant que la population n’aura pas saisie l’importance de consommer pour que le pays fonctionne nous n’aurons qu’une majorité de râleurs jamais satisfaits par les prix et qui bien entendu se targueront de vivre de manière économe. Etre économe ce n’est pas exiger la gratuité, c’est trouver le juste prix, nuance ! Je sais, il y a des dents qui grincent à cette affirmation, d’autant plus que nombre de ménages vivent réellement la difficulté du quotidien. A qui je m’adresse ? A celles et ceux qui s’offrent les moyens de me lire ici même au lieu de se préoccuper de faire chauffer la casserole. Question de priorités je suppose.

Serais-je donc foncièrement méchant ? A me moquer des gens ruinés, à provoquer voire insulter la classe moyenne française et à revendiquer sans trop de camouflage une certaine passion pour la dictature, je pourrais passer pour un être froid et monstrueux. Erreur ! Je suis pire que cela : j’estime que nous payons bêtement et méchamment notre existence et notre absence de considération pour autrui. Que le financier sautasse par la fenêtre de son building ? Mais je m’en fous, du moment qu’il ne m’atterrisse pas dessus ! Que l’imbécile marâtre battant sa progéniture en vienne à se pendre ? Mais qu’elle le fasse, j’aurai alors l’occasion de me saisir de ses chevilles pour m’assurer de son trépas ! Que le prix du pétrole, du tabac ou de quoi que ce soit d’autre joue au yoyo ? Mais franchement, dans l’absolu, grogner sur le prix des choses dont on n’est pas foutus de se passer, et pour lesquels l’on sait pertinemment que les vendeurs se moquent de notre avis, est-ce que c’est vraiment utile ? L’utile serait d’agir en groupe et non pas dans son coin, à marmonner et ressasser sa rancœur. « Le moral des français en berne » ânonnent les feuilles de choux entassées dans les kiosques puis les salles d’attente impersonnelles des médecins bobos. Grosse erreur d’analyse : les gens ne sont pas moroses, ils veulent juste profiter du beurre, de l’argent du beurre, s’envoyer la crémière et accessoirement prendre possession de la boutique sans la payer. A l’heure des dépenses pharaoniques pour colmater les fuites du navire ivre du capitalisme mondial, force est de constater que nul n’accepte d’écoper, alors que chacun s’est empressé de verser son seau dans la cale !

Rigolons un peu, rappelons nous de Coluche, Desproges, Devos, Bedos… et rions de nous avant que la mort se rit de nous.

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