11 juin 2008

Santé

En voilà un domaine qui est devenu en l’espace d’une décade une véritable obsession dans les pays riches ! Plus qu’aucun autre domaine (si l’on excepte les cosmétiques et la lutte contre le vieillissement visible), la santé s’avère être un marché plus que rentable, qui plus est qui touche toutes les couches sociales. Tant par son côté inquiétant que son aspect quotidien, elle est donc indiscutablement plus importante que toute chose ; ne dit-on pas « tant qu’on a la santé... »

Après la seconde guerre mondiale, suite à la découverte du macabre traitement des déportés (génocide et expérimentation humaine), la question de santé publique a commencé à devenir un sujet sensible. Jusque là, il était difficile de dire que les états prêtaient réellement une attention soutenue aux pandémies, et ce malgré la grippe espagnole des années 20 ou bien les graves effets des maladies vénériennes. Somme toute, il semblait bien évident que c’était au tout à chacun de prendre soin de soi, quitte à laisser entendre que le pauvre n’ayant pas les moyens d’accéder aux soins était fatalement condamné à errer de dispensaire en dispensaire, de devoir prendre sur lui de financer ses traitements. La « découverte » du cancer, ses premiers traitements (radiothérapie et chimiothérapie) furent déjà une alerte sur l’obligation d’être concret pour les états, d’autant plus que la menace ne se contente pas de cibler une population à risque, mais au contraire susceptible de toucher chacun d’entre nous. De fait, l’aspect social (avec la création d’organismes gérant les remboursements, la prise en charge des médicaments/interventions chirurgicales/hospitalisations) fut mis en place afin que tous ou presque nous soyons sous une tutelle supérieure, une organisation apte à nous fournir une médecine enfin abordable.
Nous savons tous ce qu’il est advenu de ces systèmes : faillite dans certains pays (Suède en tête qui a renfloué celui-ci via des ponctions énormes sur les revenus), endettement abyssal (la France), système privatisé au maximum (USA) ou bien système réduit au minimum, invitant tacitement à s’adresser aux caisses privées (Grande Bretagne).

De là, tout un marché du médicament s’est développé à une vitesse ahurissante. En quelques années les brevets plurent et les laboratoires devinrent rapidement les détenteurs de la santé publique. Donc, de patient nous sommes devenus esclaves tacites de sociétés dont le but premier n’est pas le bienfait de l’humanité mais le profit. Bon, soyons honnêtes, toute société d’un système capitaliste doit faire acte de bénéfices, ou du moins de couvrir ses frais pour survivre, mais de là à instaurer un racket des patients... Sans cibler qui que ce soit, remarquons tout de même que nombre de laboratoires produisent les mêmes molécules, et ce même avant le passage de la dite molécule dans le domaine public (le délai actuel est de 20 ans). La poursuite du bénéfice rapide afin d’amortir les études mène donc à la publicité, au démarchage des médecins, à l’incitation à la consommation et enfin à la revente des produits aux concurrents de sorte que tout le monde y gagne. Et au bout des 20 années, le médicament devient libre de droits, les industriels produisent alors des « génériques » vendus 50% moins chers que le produit originel. En conséquence, tant le prix du médicament que son apparition dans le paysage médiatique et publicitaire deviennent inévitables.

Dans cette logique de course aux bénéfices nous sommes devenus des cibles marketings avant d’être des patients à sauver. Dans cette optique il n’est pas anormal (d’un point de vue économique s’entend) de constater des médecins acceptent des « pots de vin » des laboratoires, ceux-ci prenant la forme d’avantages en nature comme des voyages, des séminaires bidonnés ou bien des billets d’avion (la liste est longue). Comment procèdent-ils ? Merci à la sécurité sociale de leur fournir les statistiques aisément analysables : tout médecin fournit une ordonnance donnant lieu à la délivrance de médicaments. Si le médecin « favorise » une marque, alors le chiffre d’affaires sera plus important pour ce labo le concernant... Cercle vicieux, ce modèle mène donc non à un choix raisonné des traitements mais à une analyse financière de ceux-ci. Je ne dis pas que tous les médecins sont ainsi, loin de moi toute généralisation, d’autant plus qu’il existe encore une part non négligeable d’entres eux qui ont la fibre médicale, celle qui parle de serment d’Hippocrate et de respect de la personne humaine. Toutefois, songez-y lors de votre prochaine consultation : vous pourriez être surpris de voir le même et unique laboratoire sur chacune des boîtes de votre traitement.

Là où la santé devient vraiment un enjeu économique c’est aussi sur les « médicaments » (qui n’en sont pas tous) vendus en libre service ou presque, ces fameux produits sans ordonnance que le tout à chacun a en stock démesuré dans un placard : aspirine, paracétamol, crèmes diverses et variées, sans compter le petit sirop pour la toux ou la pastille qui soulage quand on a abusé de la bonne chère. Mine de rien, n’est-on pas bombardés par ces références ? C’est dingue, des termes tirés de marques deviennent des noms communs ou presque... Je vous en cite quelques uns pour la bonne bouche : VOXPAX, ASPRO, DOLIPRANE, STREPSIL, ALKA-SELTZER, ASPEGIC, DAFALGAN, HUMEX FOURNIER... la liste serait trop longue pour la décliner ici ! Aussi peu sinistre que cela puisse paraître de prime abord, nous vivons dons dans la crainte permanente de la maladie, avec la possibilité d’automédication. De produit de soin le médicament est donc devenu produit de consommation courante. Je suis terrifié rien qu’à l’idée de songer à une personne hypocondriaque et à son budget annuel.

Maintenant que les problèmes de santé deviennent mondiaux, les états sont tenus de se mobiliser. De part notre mobilité est devenue mondiale (en moins de 48 heures vous pouvez aller de l’autre côté du globe), ainsi que par la capacité d’être « porteur sain » (malade non déclaré mais contaminant ses petits congénères), on en arrive donc à des désastres sans commune mesure avec les autres pandémies. La peste fut une horreur, que dire du SIDA ? Maladie pernicieuse car ne se déclarant pas immédiatement (voire jamais pour certains), cette bombe à retardement s’est chargée d’envahir le monde et de mettre les gens dans la terreur des toxicomanes, des homosexuels (merci les clichés !) pour finalement trembler à l’idée que n’importe qui peut être porteur de la maladie (séropositif comme on dit). La fin du siècle précédent (donc le vingtième pour ceux qui sont largués question dates) fut aussi le théâtre d’une petite révolution sanitaire : prion (la vache folle pouvant nous contaminer par la nourriture), sa sœur chez le mouton (la tremblante), la grippe aviaire (H5N1 ou Influenza virus A sous-type H5N1), la nourriture est donc devenue, elle aussi, le terrain de chasse des laboratoires. Je tiens juste à rappeler une petite particularité intéressante : aucun virus n’est détruit par les médicaments ! Et oui, un virus est éliminé par l’organisme soit par le processus de vaccination (qui consiste à nous coller un peu de la souche virale dans la paillasse pour le corps réagisse et se protège contre), ou en faisant en sorte de soulager la machine en traitant les conséquences (on soigne la grippe en faisant baisser la fièvre en gros...). Poussons à l’extrême le raisonnement final : si l’état instaure des vaccinations (ou les rembourse intégralement ce qui revient au même), les laboratoires se gaveront sur le dos de qui ? De l’état, donc le nôtre, enfin celui de ceux qui cotisent ! Magnifique détournement de fonds, non ? Une étude de juillet 2006 annonce une dépense annuelle de 284 Euros par habitant ! Dites, qui dépense la part de mes parents qui ne consomment jamais rien ???

Dernier point : la France est une dévoreuse de médicaments, dont énormément de pilules du « bonheur ». Et oui : anxiolytiques, antidépresseurs, calmants, somnifères... la France se gave littéralement de produits chimiques pour moins s’angoisser du lendemain, mieux dormir malgré le stress, pouvoir rester calme au jour le jour, et finalement le tout avec la bienveillance d’un dealer envers ses toxicomanes. Non content d’avoir des influences sur le comportement, ces médicaments créent une forte dépendance au moins aussi terrible que celle à la morphine par exemple. Qu’on m’explique s’il s’agit d’une solution que de faire des gens des légumes au lieu de les faire communiquer. Bien que je ne sois pas totalement convaincu par l’empirisme des médecines de l’esprit (psychologie et psychiatrie), je leur concède des résultats probants quand le praticien est compétent et surtout conscient de l’impact de ses propos. Pourquoi le généraliste se substitue-t-il souvent à ces méthodes ? Raisonnablement je crains qu’il est plus simple d’inhiber que de soigner, et qu’à terme nous fassions de ces personnes des zombies accrocs et non pas des personnes « saines ». Le client parfait du laboratoire ? Possible...

A lire avec attention... (rapport des services de santé de notre pays)
Ventes d'antidépresseurs entre 1980 et 2001

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