30 avril 2008

Bientôt la guerre en Russie?

« Tiens, il fait son oiseau de mauvais augure » me toisera le lecteur non averti qui débarque par ici, le visage blêmi par l’absence de soleil et les neurones pétris par le boulanger grouillot du journal télévisé. En ce moment même il s’avère que les tensions entre la Géorgie et la Russie sont à un point que l’on pourrait taxer de « culminant », mais à mon sens il est plus qu’étrange que cette situation ait mise autant de temps à se dégrader. Oh, je sais, c’est facile de dire que tous les pays fantasment sur la guerre, et que « ah caca la bombe, et ah que beurk les bombardiers »… Dites les enfants, au lieu d’envisager les conflits comme une partie de monopoly, ça ne serait pas plus malin de les regarder comme elles sont réellement, c'est-à-dire comme un exutoire économique et moral ?

Lorsque l’URSS s’est effondrée avec la bienveillante aide des USA en tache de fond, nombre de personnes avertirent l’opinion mondiale sur les risques inhérents à l’éclatement d’une telle structure. Représentant le plus grand empire territorial du monde à son époque, étant un des acteurs majeurs de la production de matières premières et surtout en étant la seconde superpuissance atomique de notre jolie planète, l’URSS fut un désastre alors que la majorité des gens crurent à un bienfait. Pourtant, nous avons là le syndrome de l’orange et du mur. Je m’explique : prenez une orange, elle semble ferme, elle contient son jus et résiste à la pression de vos mains. A présent jetez la violemment contre un obstacle immuable comme un mur. Il s’avère que le fruit éclate, se sépare en morceaux sans pour autant totalement se disloquer, et son jus se répand un peu partout, souillant tout ce qui se trouve aux alentours. Ramenons cela à l’URSS : l’empire s’est pris de plein fouet la mondialisation des échanges ainsi que l’obsolescence de ses moyens de productions, le tout surchargés par une bureaucratie vacillante. De là, lorsque enfin l’étoile rouge fut déposée, les différents nouveaux états indépendants se retrouvèrent jetés aux quatre vents, sans économie stable, avec en charge une armée démesurée et disposant de la force de frappe nucléaire, et au surplus des velléités nationalistes trop longtemps étouffées par le pouvoir central. Donc, tous ces morceaux se sont vus expulser du noyau, se sont vus essorés par le choc, et ont tentés de survivre comme ils purent.
Maintenant que nous avons jetés les bases (des pays mal gouvernés, gangrenés par la corruption, disposant d’armes sans possibilité de les entretenir), il faut alors prendre en compte un autre facteur déterminant : l’énergie. Depuis l’arrivée de Poutine au pouvoir, les entreprises qui furent démantelées par une privatisation à outrance (et majoritairement illégitime) se virent nationalisées pour revenir dans l’escarcelle de l’état. Cela fait, il fallut bien aussi admettre la disparition de nombre de ressources auparavant produites dans les satellites (ex républiques devenues autonomes). Difficile d’encaisser un tel manque à gagner. Ce n’est pas innocent si nombre de pays se sont associés de manière « officieuse » pour s’offrir des droits douaniers avantageux ou des échanges de ressources sans taxes exorbitantes. Maintenant, regardons alors ceux qui se refusent à participer à ce jeu de dupe qui est de reconstituer l’URSS sous l’égide d’une Russie toute puissante. La Géorgie n’est pas, loin s’en faut une démocratie. Ne nous leurrons pas : sa situation géographique favorisée (frontière commune avec la Turquie qui est une porte ouverte sur l’OTAN, accès à la mer…) ne saurait l’inciter à se plier aux exigences de Moscou. Pire encore, ce serait même intéressant pour eux de les provoquer de sorte à maintenir un climat d’absence d’entente, et faire ainsi un appel du pied vers les USA et l’Europe, deux pôles qui se voient aujourd’hui pris à parti par le Kremlin.
Si la crise en Abkhazie existe, c’est par l’aspect sécessionniste de ce territoire à majorité Russophone au cœur de l’état Géorgien. Il est d’autant plus difficile d’obtenir une stabilité que Moscou offre son soutien armé aux habitants (et aux soldats) de cette région. Techniquement on ne peut que qualifier cela que d’ingérence dans les affaires de la Géorgie, et contrairement à l’idée de Tbilissi de se rapprocher de l’OTAN Moscou pense à raison que faire dégénérer le conflit fermerait les portes de l’organisation à un président Saakachvili espérant un soutien de l’ouest. En effet, qui dit instabilité et conflit avec la toute puissante nation russe dit obligation tacite d’engagement des forces de l’ONU, situation inacceptable étant donné les possibilités de l’ex armée rouge.

A l’heure actuelle, Abkhazie et Ossétie du nord sont deux objectifs de regroupement basés sur l’appartenance ethnique russe, ce qui est un aspect très commode pour justifier une guerre d’agression. N’oublions pas par exemple que les Sudètes furent « saisies » par le Reich d’Hitler pour des raisons (prétextes ?) similaires. Je n’ai guère envie de comparer deux chefs d’état différents, toutefois je crains fort que la problématique soit biaisée au titre que la Russie fournit une part trop importante de gaz à l’Europe pour que celle-ci se permette de se mettre à dos ce fournisseur énergique. En ce moment il ne fait évidemment pas bon d’alourdir la note, surtout qu’elle suit l’augmentation graduelle du pétrole… Allons-nous donc devoir économiser le butane pour ne pas prendre un contrecoup économique de cette crise ? Si la Russie a besoin de financer une guerre, nul doute qu’elle le fera en augmentant ses tarifs, prix qui seront de toute façon à payer vu notre absence de solution de rechange. Je conseille donc vivement à l’Europe d’inciter la Russie à ne pas commettre l’irréparable, de ne pas mettre le feu dans les anciennes républiques, et qui sait réveiller les idéologies nationalistes qui sont latentes dans les pays de l’est.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

On a l'impression de revenir dans les années 1800 avec les volontés pangermaniques et panslaves... Il serait bon de lire les écrits de Bakounine aux enfants de cette partie du continent. Peut-être que cette lecture leur apprendrait que le débat n'est pas nouveau et qu'entre ces écrits et eux, il y a quelques millions de morts. Que ce cimetière n'a pas résolu la question et leurs problèmes. Peut-être alors, comme Bakounine, chercheraient-ils une autre solution?

JeFaisPeurALaFoule a dit…

Il y a tant de solutions que chacune d'elles pourrait tout à fait permettre l'écriture d'un ouvrage. Hélas, entre les "écriveurs", les "historiographes" et les vrais porteurs d'un message, il ne reste généralement que les propagandistes sans foi ni loi... Alors si l'on parlait de Bakounine, je crains que nombre d'idiots iraient exiger en retour la lecture de Marx!

Et merde!