19 mars 2008

Cinq ans

Cela fait cinq ans que les américains se sont lancés dans la lessive Irakienne en espérant que les spontex blindés soient plus efficaces que la prise en compte de la situation générale du pays. Comme à leur habitude les questions posées par les observateurs neutres et lucides furent mises de côté et même démontées à coups de propagande. Hélas pour les soldats tout comme pour l’économie mondiale, bon nombre d’analystes furent à la limite de la divination avec des mots tels que « bourbier » et « enlisement inévitable ». En tout état de cause cette guerre qui devrait à mon sens se nommer « situation d’occupation territoriale » ne fait qu’empirer et les sacs poubelles remplacent les fauteuils en première classe pour le retour des boys. Si l’enfer existe, il a un petit goût de Bagdad pour les Gi’s.

Spontanément et ce plus par inimitié avec les USA que par véritable réflexion nombre de personnes se sont opposées à ce putsch qui n’a jamais dit son nom. Les USA ont déposés le président Hussein, et malgré ses crimes, sa dictature et l’usage d’armes atroces, celui-ci avait la légitimité pour lui. La présidence américaine a donc provoquée une haine féroce contre la bannière étoilée, colère totalement justifiée de part l’absence d’un tel précédent dans l’histoire. Se targuer d’être un sauveur tout en poussant dehors le gouvernement en place, il y a comme un non-sens flagrant. Il est d’autant plus dramatique que les troupes américaines soient sur place que les différentes rivalités interethniques se sont exacerbées depuis la chute du parti Baas : chiites, sunnites, tout s’est considérablement délité pour en arriver à une anarchie incontrôlable. L’armée ne peut pas jouer le rôle d’une police et la police recréée de toutes pièces est une catastrophe car le peuple la considère comme à la solde des occupants. Pas de légitimité donc pas de pouvoir sur le terrain.

Revenons sur les critiques formulées dès le départ : l’ingérence américaine fut prise comme un camouflet envers les mandats de l’ONU et notamment contre ses oppositions à cette action. Dans les faits l’ONU est donc devenue une SDN bis, c'est-à-dire un organe verbeux mais totalement inutile dès que les superpuissances décrètent unilatéralement qu’une action militaire est nécessaire. Allons même plus loin, l’organisation s’est vue incapable de sanctionner les USA d’une manière ou d’une autre, ce qui amène donc à la castration pure et simple du dispositif mondial supposé entériner toute action militaire de ses adhérents. La raison du plus fort est la meilleure dirait l’adage, on peut sans conteste lui adjoindre la notion financière : dollar contre Euro, billet vert contre pouvoir mondial, faites vos jeux rien ne va plus ! La plus grande défait médiatique de la présidence Bush au court de ce conflit fut très probablement son incapacité à trouver une justification suffisamment acceptable pour que l’envoi de troupes soit toléré par le peuple, et indirectement par le monde entier. Lors de l’invasion de l’Afghanistan chacun comprit l’idée de revanche après le 11 Septembre, mais accuser l’Irak de soutenir le terrorisme et parler d’armes de destruction massive amena l’administration de l’époque au fin fond du ridicule médiatique. La règle est pourtant simple : n’affirme rien que tu ne puisses prouver !

L’escalade est assez similaire avec celle constatée pendant le conflit vietnamien : plus cela se complique plus on envoie de troupes. Plus il y a de troupes plus la population se révolte donc plus le besoin de soldats se fait sentir…et ainsi de suite. Le bilan de cinq ans de guerre est lamentable : un pays sans économie, sans sécurité, réduit à la féodalité afin de contrôler un minimum les différents peuples, du terrorisme « légitime » de par la relation occupé occupant, et surtout une radicalisation des opinions. Nul ne saurait trouver une réussite dans cette guerre si ce n’est la possibilité de spéculer sur le cours du brut. Le prix du baril a littéralement explosé et il ne diminuera probablement plus jamais. Les pays producteurs de pétroles sont aujourd’hui contraints d’absorber la demande tout en sachant que le débit maximal est déjà atteint. Malheureusement pour les consommateurs américains, ce jeu d’offre et de demande biaisée les as menés à bouder les véhicules produits par Ford et consoeurs… de par une consommation indécente. Quand le portefeuille prend un coup c’est toute l’économie qui tremble.

Dès le premier jour des manifestations et des mouvements « populaires » sont apparus pour dénoncer cette action aux buts obscurs et tout sauf patriotiques. Comme pour tout mouvement contre la guerre, ces actions furent prises pour ce qu’elles sont, un frémissement dans l’indifférence générale. Là où la colère s’intensifie c’est dans les familles des soldats morts qui ne comprennent pas pourquoi leurs fils, leurs filles, leurs frères sont tombés là-bas et sans le moindre résultat tangible. Encore une fois le trauma NAM est très présent parmi les habitants, sans compter l’obstination de Bush à admettre les difficultés rencontrées. La seule chose qui soit visible c’est l’allocation de budgets colossaux à l’armée ainsi que la réduction des libertés individuelles.

A terme Bush disparaîtra des cartes puisqu’il ne pourra légalement pas faire un autre mandat. Cependant, tout comme Nixon avant eux, les candidats en lice pour la présidence auront cet héritage nauséabond sur les bras. Parmi eux Mc Cain continue à soutenir l’action. Intérêts économiques, déterminisme au patriotisme faisandé, ou tout simplement véritable conviction personnelle ? L’essentiel est d’attendre la fin des élections pour voir lequel sera élu et s’il (ou elle) osera prendre le problème à bras le corps. A l’heure actuelle les USA ne peuvent décemment plus se retirer : ce serait d’une part un désastre politique comparable à la guerre de Corée et socialement ils laisseraient un pays en proie au chaos total. Demandons nous donc quelle solution saurait empêcher l’extrémisme de prendre le pouvoir à Bagdad mais aussi comment réduire le plus possible la fuite en avant pour que ce conflit ne soit pas une nouvelle guerre de 100 ans. L’image choisie par certains analystes fut celle des croisades avec son lot de raisons politiques et religieuses, et ne fut en fait qu’un prétexte pour pouvoir contrôler l’économie des flux de marchandises en provenance et à destination de l’orient. Les USA seraient-ils donc les nouveaux croisés, sans le lustre de ces illustres prédécesseurs ?

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