19 février 2008

Un petit pas vers quoi ? Vers Cuba bien sûr!

Grande nouvelle tant pour les rêveurs démocrates que pour les anticommunistes primaires, el Fidel cède le pouvoir ! Oui ! Vous avez bien lu, Fidel Castro, à 81 ans, renonce au pouvoir après une domination sans partage depuis près d’un demi-siècle (depuis 1958-1959). Incroyable de longévité, souvent présenté comme une idole médiatique tant par son image de guérilléro infatigable que par son ton aussi arrogant que presque comique, Castro symbolise avec Guevara l’image même de la révolution communiste hors des préceptes et directions des partis centraux Soviétiques et Chinois.

Ne revenons pas sur l’histoire, celle-ci nécessiterait (encore une fois) un véritable livre et non quelques lignes prétentieuses et castratrices dans ce blog, posons nous plutôt les questions vitales que sont l’avenir de Cuba et des changements que pourraient vivre cet état si particulier. Toutefois, rappelons la situation géographique et politique : un pays situé à 77 km d’Haïti à l’est, à 140 km de la Jamaïque, au sud-est et surtout à 180 km des États-Unis, au Nord-Est, l’île principale Cuba (et les quelques autres îles du pays) sont depuis 1959 le symbole du communisme sous le nez des américains. Situation à la fois comique et tragique, ce territoire a été un formidable levier politique pendant la guerre froide (l’affaire des missiles nucléaires soviétiques sur le territoire cubain), médiatique ensuite avec les immigrés fuyant la dictature castriste et économique avec l’apport incessant de fonds soviétiques pour sauver l’économie cubaine exsangue. Subissant l’embargo américain, le petit état reste tout de même une destination touristique à la mode, tant par le fait d’une économie réclamant des devises que par ses qualités climatiques et humaines. L’accueil des cubains pour les touristes est vanté partout…

Revenons à nos cigares, pardon moutons. Quelque part ce pays a une telle singularité dans son maintien du communisme et son existence sous le nez du géant américain qu’il est connu de par le monde et qu’il a toujours attiré les sympathies. Quoi qu’il en soit, il est dorénavant clair que Fidel Castro ne sera plus à la tête du pouvoir bien qu’il conserve une place d’honneur en tant que premier secrétaire du parti Communiste Cubain (PCC), parti unique mais qui n’a plus réellement tenu de congrès depuis près de 11 ans. A quoi s’attendre dans ces conditions ? De par sa longue convalescence qui n’intéressa que peu d’observateurs le pouvoir est sous le contrôle de son frère Raul, 76 ans (pas jeune non plus dites donc !). De cette intérim va découler une décision à prendre entre lui et le vice-président Carlos Lage, un médecin de 56 ans. Qui prendra le pouvoir en définitive ? Certains espèrent la jeunesse du vice-président avec toute l’ouverture d’esprit que cela peut impliquer, d’autres souhaitent conserver le pouvoir tel qu’il est avec un frère avec l’ombre du grand frère en guise de cape.

Il est clair que le pays par lui-même n’a que peu d’espoir d’industrialisation étant donné son retard technologique hallucinant ainsi que par l’absence quasi-totale de fonds à allouer au développement. L’image d’Epinal des vieilles américaines retapées jusqu’à la corde n’a rien d’une tromperie : depuis la chute de l’ancien gouvernement aucun bien de consommation ou presque n’a réussi à pénétrer le territoire. Depuis quelques temps maintenant les devises réussissent enfin à transiter (le dollar notamment) ce qui permet quelques progrès, trop faibles toutefois pour relever le niveau national. Ici, c’est un tiers-monde Caraïbe et non un paradis de carte postale qui attend dorénavant un mieux démocratique pour ensuite attendre un mieux économique.

Quels sont les risques ? Tout d’abord il s’agira d’éviter au maximum un passage à l’économie de marché de manière anarchique. La Russie a vécu un échec cuisant en libéralisant à outrance l’économie, ceci permettant tant à la mafia qu’aux oligarques de s’enrichir très rapidement mais aussi et surtout de prendre le contrôle de secteurs entiers de l’économie. Il est à craindre qu’une ouverture trop brusque mène donc à un résultat similaire. Il est également important de note qu’en allant trop vite les devises se feront une joie de partir à l’étranger dans des banques offrant autrement plus de garanties que celles locales, ce phénomène amenant nécessairement à une perte de valeur de la monnaie locale. Quand les caisses sont vides on ne peut plus raisonnablement valoriser le papier monnaie. De là, ce serait alors une inflation galopante et une dégradation substantielle des conditions de vie du peuple.

L’autre point à soulever est le pouvoir omniprésent de l’armée et des services de sécurité. Ces corps de l’état accepteront-ils une transition vers des élections démocratiques ou bien vont-elles comme trop souvent soutenir le plus autocrate des candidats au pouvoir ? Il est à craindre un coup d’état ou du moins un soutien inconditionnel à la conduite la plus dure des affaires de l’état, ce qui serait alors pris pour une continuité absurde de l’état de fait actuellement en vigueur. Ajoutons également à cela le risque énorme d’une crainte justifiée des agitations qui vont immanquablement apparaître, avec la conséquence logique d’une baisse majeure de la fréquentation touristique, ce qui serait un désastre sans précédent. Le dernier point noir dans la fin de Fidel Castro c’est également la fin d’un soutien populaire de l’étranger. Cuba fut une épine dans le pied du colosse américain, sans Castro cette épine redeviendra poussière comme l’est actuellement Haïti. Plus d’inquiétude, plus de soutien des Russes, bref la fin du dernier de la génération Nasser Tito…

Des solutions ? Les étapes majeures à envisager sont et ce simultanément un assouplissement démocratique de manière à rendre au peuple des libertés fondamentales, l’ouverture progressive des frontière, l’accueil contrôlé des investisseurs, ainsi qu’une libéralisation progressive de l’économie. Pas question d’éclater d’un seul coup tous les secteurs, il s’agira d’agir par étapes de manière à maintenir les activités déjà existantes tout en permettant la libre concurrence locale. Les importations de produits manufacturés devront elles aussi être maîtrisées de sorte à éviter une concurrence déloyale de produits venant de l’étranger : par exemple, pas question d’importer à bas prix des produits déjà fabriqués sur place afin que les commerces locaux restent actifs. L’argent doit circuler à tout prix pour que tous profitent efficacement des réformes. Enfin, il s’agira de réformer les pôles de dépense tout en ménageant les susceptibilités : réduire peu à peu les dépenses militaires pour les réorienter vers l’éducation, moderniser progressivement les infrastructures et ainsi enrichir le pays tout entier.

Finalement, la situation est hésitante mais j’ai bon espoir que le calme sera maintenu par des personnes de raison qui auront l’intelligence de ne pas ruiner cette chance de donner une vérité à la phrase « Cuba libre ! »

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